Poutine et Medvedev affichent pour la première fois un désaccord ouvert

Poutine et Medvedev affichent pour la première fois un désaccord ouvert

Vladimir Poutine et Dmitri Medvedev ont fait montre pour la première fois ouvertement d'une possible rivalité au sommet de l'Etat russe en vue de la présidentielle qui aura lieu dans un an, en affichant lundi un très net désaccord sur l'intervention occidentale en Libye.

En visite dans une usine d'armements en Sibérie, Vladimir Poutine s'est lancé dans une attaque en règle contre l'intervention occidentale en Libye et les Etats-Unis.

Devant des ouvriers, le Premier ministre a dénoncé pêle-mêle une résolution de l'ONU qui "fait penser à l'appel aux croisades du Moyen-Age", et une tendance à l'intervention militaire qui devient selon lui "une constante" dans la politique des Etats-Unis après l'ex-Yougoslavie, l'Afghanistan et l'Irak.

Tout cela "montre encore une fois que nous avons raison de renforcer les capacités militaires de la Russie", a-t-il ajouté, promettant de multiplier par deux la production de missiles en 2013, alors que Moscou et Washington viennent de ratifier START, un traité de désarmement nucléaire.

La réaction de Dmitri Medvedev, le jeune président adoubé en 2008 par Vladimir Poutine, qui avait effectué les deux mandats consécutifs autorisés par la Constitution, et qui a souvent été effacé sur la scène politique russe par son puissant mentor, a montré une contradiction inédite au sommet de l'Etat russe.

M. Medvedev, filmé en blouson de cuir à l'extérieur de sa résidence de Gorki, près de Moscou, a jugé "inadmissible" et "inacceptable" l'accusation de "croisade" lancée contre les Occidentaux, car ce genre d'expressions mène selon lui au "choc des civilisations".

Il n'a pas cité M. Poutine, mais n'a guère laissé de doute sur la personne visée, et a défendu la politique étrangère dont il est, en qualité de chef de l'Etat, le seul responsable.

"La campagne pour les élections a commencé", a estimé le politologue indépendant Dmitri Orechkine.

La Russie, qui dispose du droit de veto au Conseil de sécurité de l'ONU, s'est en effet contentée de s'abstenir et d'émettre des réserves lors du vote la semaine dernière de la résolution fustigée par Vladimir Poutine.

Pour M. Orechkine, Dmitri Medvedev, qui a affiché depuis son élection des positions plus libérales que son prédécesseur, "a défini sa position, qui est avec l'Europe".

"Poutine garde la sienne, orientée vers le conservatisme", a-t-il jugé.

Pour Alexandre Konovalov, président de l'Institut des évaluations stratégiques à Moscou, il ne fait pas de doute non plus que les déclarations de Vladimir Poutine "sont un élément de politique électorale intérieure" à l'approche de la présidentielle.

L'ex-agent du KGB "se bat pour renforcer sa cote de popularité, pour que tous les ouvriers et les paysans entendent: +un Etat fort, c'est Poutine+", a-t-il ajouté.

"Il est absolument clair que le président et le Premier ministre symbolisent des parties différentes de l'élite russe, qui sont en désaccord non seulement sur les questions de politique internationale, mais sur l'économie et les questions sociales", a estimé de son côté Leonid Gozman, co-président du parti libéral Pravoe Delo (Juste cause).

Andreï Riabov, analyste de l'antenne russe du centre Carnegie, reste pour sa part fidèle à l'interprétation non d'une rivalité mais d'une communication bien maîtrisée par le "tandem" Poutine-Medvedev.

Selon lui, la critique par M. Medvedev des propos de son Premier ministre aurait visé à "calmer les partenaires occidentaux de la Russie".

Une analyse rejoignant celle, exposée par certains médias russes, selon laquelle les dirigeants du pays se partagent les rôles au gré des opportunités politiques.

MM. Poutine et Medvedev ont eux-mêmes indiqué à plusieurs reprises qu'ils se "mettraient d'accord" sur la candidature la plus opportune à la présidentielle de 2012.

AFP

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