Vingt ans, une idée, trois feuillets

Vingt ans, une idée, trois feuillets

En journalisme, plus qu’ailleurs, il n’y a rien de pire que d'avoir vingt ans et quelques idées : tout le monde y trouve à redire. On échappe rarement aux leçons de « journalisme professionnel », - dit aussi « journalisme responsable » -, un métier nouveau que des esprits doctes enseignent à la « presse adolescente » et qui se mesure à la tranquillité qu'il procure à ceux qui le pratiquent.

Je crois bien cependant, à sa façon de ne douter de rien, surtout pas de lui-même, je crois bien que le Soir d’Algérie a toujours eu vingt ans. Il revendique, avec un certain panache, de faire partie de cette caste d’ingénus qui ne répugnent pas à faire du journalisme avec les choses les plus méprisées par les détenteurs du bon goût. Regardez-le continuer sa guerre contre l’islamisme alors qu’elle est passée de mode auprès des croque-mitaines de la presse et de la littérature ! Tant pis. Ne dit-on pas qu’à vingt ans, on craint le ridicule mais on aime l'excès, on abhorre la solitude, mais on s'isole par son zèle ?

Ce zèle-là a épargné au Soir d’Algérie de faire partie de l’honorable confrérie des trois singes, ce dont je me réjouis encore, ce journal ayant, à la différence de bien d’autres, « vu » un confrère jeté en prison, « entendu » les cris de colère et « dit » ce qu’il fallait en dire.

Que souhaiter d’autre au Soir, avec ses jambes vingt ans, donc faites pour aller au bout du monde, que de s’éloigner encore plus de ce journalisme rassurant par ses demi-vérités, complice par ses demi-mensonges, où l'on passerait la moitié de sa vie à parler de ce qu'on ne connaît pas et l'autre moitié à taire ce que l'on sait ? Bref, d’avoir toujours vingt ans, cet âge furtif où l'on croit encore que tout est possible. Et qui sait ? Ce goût qu’on a à vingt ans, de vouloir tout transformer, c’est peut-être un peu de cette ferveur qui nous interdira de trop tôt vieillir.

M.B.

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Commentaires (5) | Réagir ?

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Ghanima

Aprés la disparition du journal Le Matin, le Soir d'Algerie est devenue mon quotidien préféré, je ne rate jamais les chroniques de la page 24 de Hakim Laalam, Boubakeur Hamidechi, Arezki Metref, Ahmed Halli, Maamar Farah, Ammar Belhimer, Bouzidi, Hassane Zerrouki etc... Il y avait aussi dans le temps Malika Boussouf. C'est aussi un régal de lire les contributions de grandes personnalités parmi elles l'ancien directeur de notre journal-fétiche Le Matin : Mohamed Benchicou.

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Farid M

Dans le paysage médiatique national, composé essentiellement d'un florilége de journaux sans lecteurs à la solde du pouvoir, il est offusquant de constater que, profitant de la manne publicitaire que leur prodigue le régime à la mesure de la promotion qu'ils lui assurent, certains directeurs de publication roulent en 4x4 dernier cri. Les journalistes, par contre, loin dr rouler sur l'or et travaillant dans des conditions difficiles (notamment pour faire face à la rétention de l'information et aux pressions de tout genre) perçoivent des salaires qui leur permettent à peine de vivre décemment (30000 à 40000 DA pour les plus chanceux) Beaucoup font plus un travail de propagande consistant à glorifier le sérail qu'à informer les citoyens de ce qui se passe dans leur pays avec honnêteté et objectivité. Alors qu'en 2000, le défunt Matin rémunérait ses correspondants pigistes à 500 DA et 1000 DA, les articles respectivement parus dans les rubriques régionale et nationale, amerturme est de constater qu'en 2010, certains journaux francophones ne donnent qu'entre 300 et 400 DA, la parution d'une pige quel que soit l'espace de sa diffusion. Pourtant, les journalistes régionaux contribuent largement à la confection de ces journaux et font un travail de terrain pendant que beaucoup de ceux, employés dans les rédactions, rédigent, ne sait-on comment, des papiers sur le terrorisme, par exemple, depuis leurs confortables bureaux. Alors là que dire des journaux arabophones qui emploient même de jeunes journalistes sortis de l'école en les avilissant avec des forfaits mensuels pouvant aller (tenez-vous bien) de 3000 à 10000 DA. Dans ces conditions scandaleuses d'exploitation, nos journaux font dans une nouvelle forme d'esclavagisme tandis que dans leurs éditos ils nous éblouissent avec leur " engagement" pour les droits de l'homme. Quelle honte! Enfin, on s'étonne qu'il y ait sur leurs colonnes du n'importe quoi ou qu'ils ont tendance à nous parler beaucoup plus de choses virtuelles par nécessité de rabacher pour remplir leurs pages que de nous relater notre réalité fusse-t-elle bonne ou mauvaise. Tout est osé pour vendre: on voit quelques canards, tirés à des centaines d'exemplaires, achalander tout sur leurs colonnes pour accrocher des clients. Le plus impressionnant est qu'ils passent subitement de leur petite vocation de bas étage à imiter la presse people occidentale ou celle, dans les pays du tiers-monde, empoloyée quaziment à forger les esprits par les dogmes et les idéologies religieuses afin de régenter les comportements. Je me souviens qu'en 2006-2007, le pouvoir Algérien, par la voix de son ministre de la communication en place a promis une dépoussiérisation du noble métier des journalistes. Voilà que 3 ou 4 ans après, le projet consistant à établir un équilibre entre la liberté d'expression et la protection de la société de la diffamation, par la mise en oeuvre d'un code d'éthique pour la profession, ce projet demeure, hélas, un voeu pieux. A mon avis, il y a une volonté politique de ne pas améiorer la situation de la presse en formant davantage les journalistes et en leur offrant un statut socioprofessionnel digne de leur noble profession. Résultat: on a d'un côté un lot de chiffons qui se plaisent à répéter en parlant du systéme:" c'est parfait!" et de l'autre quelques publications dites idépendantes lesquelles cherchent, pour leur survie, à se ficer une ligne rouge pour ne pas subir le triste sort réservé au Matin. Il me semble que depuis que le Matin a disparu des kiosques, on assiste à une certaine autocensure des journalistes même si de rarers journaux s'efforcent d'accomplir leur mission d'informer à peu prés normalement. Selon des aveux de nombreux journalistes, il n'est pas possible de tout dire. Cette situation, je suppose, n'est pas spécifique à l'Algérielaquelle a arraché le pluralisme politique et médiatique suite à l'insurrection populaire de 1989. Les médias sont-ils totalement libre en France, en Grande Bretagne ou aux états unis? La presse occidentale elle-même reconnait que l'information obéit exclusivement à la puissance de l'argent et des hommes politiques. Alors inutile de rêvasser d'une presse entièrement indépendante. Néamooins, il faut reconnaître que notre presse, avec tous ces défauts, a plus de liberté de ton et se distingue au moins à l'échelle des pays arabes comme la Tunisie, le maroc, l'egypte etc... Dernier mot: il reste beaucoup à faire pour que le peuple Algérien épris de libeté d'expression et de démocratie puisse aspirer à une presse indépendante digne de ce nom. Pour ce faire, il faut vraiment, comme on dit, faire un grand ménage pour mettre un terme au bricolage qui prédomine et aux errements tous azimuts de calomnie qui prend pour cible autant des personnes morales que physiques. Il n'y qu'à voir sur le web toutes les campagnes de diatribe qui sont actionnées par des extrêmistes de tous bords et parfois des appels au meurtre lancés par des extrêmistes religieux quand ce n'est pas des espaces incitant à la haine raciale. Faut-il poser des balises pour que les humains sachent jouir de la liberté d'expression sans que d'autres n'aient à faire les frais de la calomnie et de la diffamation. Un débat qui revient même dans les pays où l'on considére que la liberté d'expression ne pose aucun probléme. La précarité dans notre presse semble jouer en faveur de ceux qui, en 2002, ont, pour rendre docile la presse, fait voter la pénalisation du délit de presse se donnant ainsi le droit de pouvoir obtenir par la poursuite judiciaire l'emprisonnement des journalistes s'ils étaient reconnus coupables de diffamation. "Hommage" à AHMED OUYAHIA, pour le nouvel arsenal répressif judiciaire brandi à l'époque où il était ministre de la justice. Saha Ftourkoum.

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