Hassan Hattab, une reddition en trompe l'œil Par Hassane Zerrouky

Hassan Hattab, une reddition en trompe l'œil  Par Hassane Zerrouky
Pourquoi Hassan Hattab aurait-il décidé de cesser son « djihad » et pourquoi propose-t-il ses bons offices au pouvoir pour convaincre ceux restés au maquis d’arrêter « leurs activités criminelles » ?

Le fondateur du GSPC avait déjà été approché au lendemain de la promulgation de la loi sur la Concorde civile par des émissaires du pouvoir, via l’imam Hachemi Sahnouni, afin de suivre l’exemple de l’AIS. Déclinant cette offre, stigmatisant au passage les dirigeants de l’AIS d’avoir abandonné la voie du « djihad », il a claironné sur l’air des lampions sa volonté de poursuivre son « juste » combat jusqu’à l’établissement du califat islamique. Mieux, il avait entrepris de rallier sous la bannière du GSPC tous ceux –ex-GIA et mécontents de l’AIS – qui voulaient poursuivre le combat contre le « taghout ». Et de fait, il a structuré et transformé le GSPC en une redoutable machine de guerre contre l'Etat et la société, poursuivant un « djihad » ayant fait des centaines de victimes dans les rangs des forces de sécurité entre l’année 2000 et mai 2004, mois où sur la base d’informations fournies par un « repenti », l’Expression annonçait la mort du chef du GSPC en Kabylie. Pour mémoire, d’autres journaux avaient annoncé de bonne foi, sur la base de sources non établies, son exécution par ses rivaux au sein du GSPC pour avoir refusé de rallier la Qaïda. Et d’autres, enfin, avaient annoncé sa mise à l’écart de la direction du GSPC par les « durs » de son mouvement, pour avoir pris langue avec le pouvoir dans le but de négocier sa « reddition ».

La vérité est que Hassan Hattab, qui n’est pas né de la dernière pluie, est resté fidèle aux idéaux du FIS, version Ali Benhadj. Si, par hypothèse, il a décidé de se rendre, c’est parce qu’il a compris que le « djihad » n’a pas été vain et qu’il s’est traduit par des résultats notables. Le premier est que la loi sur la réconciliation nationale ne contraint pas les islamistes radicaux au pardon à leurs victimes. Elle les absout de fait de tous leurs crimes. Ils sont amnistiés. Mieux, la loi stipule expressément l’arrêt de toutes poursuites judiciaires à leur encontre.

Sur le plan politique, ces islamistes ont toutes raisons de penser avoir remporté la partie. En plus du fait que le pouvoir feint d’ignorer les fortunes colossales acquises par leurs chefs – certains sont devenus des chefs d’entreprises - et du moment que la loi ne les prive pas de leurs droits civiques, ils peuvent activer de nouveau. C’est ce qu’ils font, chaque jour que Dieu fait, mais de manière différente que durant la fin des années 80 et au début des années 90 avant l’interdiction d’activité du FIS.

Plus généralement, le fait que le pouvoir politique ait affirmé que les islamistes – le terme n’a jamais été utilisé par le discours officiel – ne sont pas les seuls responsables de la crise qui a ensanglanté le pays, les a rassurés sur le fait que leur « djihad » n’a pas été un coup de sabre dans l'eau. En effet, dans un discours prononcé au BIT à Genève ( je crois que c'était en 2005), le président Bouteflika n’a-t-il pas accusé ouvertement les « laïcs », à savoir les démocrates, d’avoir jeté de l’huile sur le feu par leurs écrits et leurs discours ? Le fait également que le pouvoir ait renoncé à la perspective de réformer l’école afin qu’elle forme à la citoyenneté, de réformer le statut avilissant de la femme, alors que le Maroc, si décrié par certains, l’a entrepris, sont autant de gestes ayant conforté les islamistes à ne pas renoncer à leur raison d’être. Autre exemple, la condamnation à 20 ans de prison d’un ancien chef moudjahid de la guerre de libération nationale pour avoir exécuté un chef de l’AIS à Souk Ahras – il ne s’agit pas ici de cautionner un tel geste – alors que des criminels du GIA, coupables de meurtres massifs, sont rendus à la liberté, a été apprécié comme il se doit par les islamistes. Enfin – la liste serait bien longue – les multiples attaques dont la presse ( exemple du Matin) et les syndicalistes ainsi que de nombreux militants démocrates ont été l'objet ces dernières années, le verrouillage du champ politique et médiatique aux seuls démocrates, alors que c’est un secret de polichinelle que les islamistes continuent d’utiliser les mosquées ( et même les écoles pour recruter des jeunes au maquis comme l’a rapportée la presse) pour développer leurs discours et leur endoctrinement, est aussi un autre geste encourageant ces mêmes islamistes à ne pas décliner l’offre d’amnistie du pouvoir. Et cerise sur le gâteau, la loi sur la réconciliation nationale stipule bien que passé six mois après sa date de promulgation, elle n’est plus applicable à ceux qui ont refusé de se livrer aux autorités. Normalement, si elle était appliquée, Hassan Hattab devrait être jugé et condamné. L’amnistie – je n’ai rien contre – devrait être promulguée, une fois la justice rendue et non l’inverse. Comment penser, dès lors, que les islamistes radicaux ne soient pas encouragés à poursuivre leur djihad si, par ailleurs, ils sont assurés de bénéficier de la loi sur la Concorde civile au cas où ils déposeraient leurs armes.

Au regard de ces faits, que Hassan Hattab se soit livré ou cherche à jouer au médiateur auprès de ses petits amis, importe peu. En revanche, une chose est sûre – d’aucuns estimeront, c’est leur droit, que j’enfonce des portes ouvertes – tant qu’il n’y aura pas de séparation du politique et du religieux, je crains que la situation n’aille en empirant. Et que l’Algérie se retrouve un jour, si elle n’y est pas déjà, dans la même situation que l’Egypte, où des intellectuels et des journalistes sont poursuivis pour le simple fait d’avoir écrit des articles, voire des livres qualifiés par les religieux d’anti-islamique !

H.Z

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Commentaires (2) | Réagir ?

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kacem

pourquoi ne pas dire que ce qui se passe chez nous concernanla lute contre le terrorisme est une methode purement algerienne et elle a donne ses fruits et qu elle poura etre suivi par tous les pays concerne

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popeye_dz wali

La France via Claude CHEYSSON en 1997 avait annoncé à l'insu de Zeroual une trêve entre l'armée régulière ANP et un groupe de terroristes alias AIS embusqué dans les maquis de Jijel. Quel est donc le rôle réel de France dans cette trêve ? Pourquoi la France ? Pourquoi justement au moment ou Zeroual avait promis l'assaut final contre les hordes intégristes ? Quels sont les termes de cet accord ? Pourquoi Zeroual a-t-il préféré démissionner ? Nous devons exiger que le contrat signé à notre insu entre le pouvoir et les terroristes soit porté à l'opinion publique ; réconciliation, indemnités, amnistie ? Si les terroristes remontent au créneau à chaque fois c?est pour faire valoir leurs « droits » acquis dans les accords ANP-AIS. Le pouvoir n?a pas confiance en son peuple car il sait que son peuple ne l'aime pas. C?est pour cela qu?il préfère négocier directement avec des terroristes que de laisser le peuple trancher et jeter dehors la vermine islamiste et ce pouvoir avec. Les islamistes ne sont puissants que par la terreur qu?ils exercent sur les populations grâce à une mainmise sur l'école et les mosquées ; nous devons combattre les intégristes et éradiquer en parallèle l'intégrisme en commençant par récupérer l'école et la remettre au service du savoir universel.