Monsieur le Président, pour l’Algérie, démissionnez !

Le président Bouteflika vit reclus dans sa résidence ne recevant plus aucune personne en dehors de ses proches.
Le président Bouteflika vit reclus dans sa résidence ne recevant plus aucune personne en dehors de ses proches.

"L’état naturel de tout individu est sa parfaite égalité avec tous ses semblables. L’homme auquel échoit la charge de présider au destin d’un peuple agit extérieurement avec les hommes selon son rang, mais, la vérité est qu’il n’a rien naturellement au-dessus de ses concitoyens. Cependant, il arrive qu’un homme installé au pouvoir par un simple concours de circonstances, voire, par erreur, vienne à oublier tellement sa condition naturelle qu’il s’imaginât que le pouvoir lui était dû, qu’il le méritait et qu’il lui appartient de droit" ("Discours sur la condition des Grands", Blaise Pascal).

"Chez les peuples animés d'un même esprit de corps, le commandement ne saurait appartenir à un étranger." (Prolégomènes d’Ibn Khaldoun)

Le continent africain et le monde arabe offrent une pléthore d’exemples de ce genre de situations anachroniques qui perdurent, le plus souvent, du fait, notamment, de la complicité et de la complaisance des anciennes puissances coloniales qui veulent les voir se pérenniser dans le but de préserver leurs intérêts économiques, en particulier.

En la matière, l’Algérie constitue un exemple typique. L’histoire, plusieurs fois millénaire de l’Algérie nous enseigne que, si les Algériens ont toujours su se débarrasser des envahisseurs, en revanche, ils n’ont jamais su se rassembler pour bâtir leur pays qui regorge de richesses humaines et naturelles transformées en un incroyable gâchis par ses dirigeants assoiffés de pouvoir dont le seul objectif est leur maintien aux commandes, à travers l’asservissement du peuple et au moyen de la distribution de la rente.

Dès la guerre de Libération, des rivalités et ambitions personnelles sont apparues ; elles ont toutes été réglées dans le sang et cela a continué même aux premières années de l’indépendance, sous Ben Bella puis Boumediene, marquées par de nombreux assassinats politiques en terre algérienne et à l’étranger.

En fait, aux premières heures de l’indépendance, des choix inopérants, guidés par la seule stratégie de prise et de confiscation du pouvoir par les différents acteurs, ont été faits dans les domaines politique et économique. Il en est résulté une longue période d’incertitude et de tâtonnements qui dure à ce jour et dont le peuple algérien, placé en situation d’incapacité permanente, n’a pas fini de payer les frais. La démocratie réelle, la liberté (dans toutes ses formes et acceptions) et une vraie justice n’ont toujours pas droit de cité dans une Algérie victime de l’attitude complaisante de ses partenaires étrangers à son égard et souffrant de la résignation dramatique d’un peuple réduit à l’état de tube digestif.

Depuis le 3 juillet 1963, date de la proclamation de l’indépendance, et "l’été de la discorde" sur lequel Maitre Ali Haroun, dans son livre du titre éponyme, a longuement épilogué, l’Algérie n’a jamais effectivement rompu avec les épreuves douloureuses qui se sont multipliées et ont contribué à élargir, toujours davantage, l’énorme fossé entre le peuple et le pouvoir.

Après l’été de la discorde vint le coup d’Etat du 19 juin 1965 suivi d’attentats contre Boumediene, de la tentative de coup d’Etat conduite par Tahar Zbiri et d’autres tristes évènements connus ou moins connus.

L’arrivée de Chadli n’a pas aidé à améliorer la situation ; loin s’en faut. Les évènements d’octobre 1988, les timides ouvertures politiques qui s’ensuivirent, et qui ne furent que des replâtrages de façade pour assurer la survie du régime, ont conduit à une crise politique majeure qui a failli conduire à l’effondrement de l’Etat et à la fameuse décennie noire dont le pays ne s’est pas encore totalement remis.

C’est dans ce contexte de crise périlleuse que les décideurs de l’époque ont fait une première fois appel à Abdelaziz Bouteflika pour lui proposer un rôle de premier rang dans l’espoir de sauver le pays. Malheureusement, ce n’est qu’une fois le terrorisme vaincu militairement que l’actuel président de la République a accepté la magistrature suprême ; suite à la démission du valeureux Général Zéroual.

Hélas, si Bouteflika accepta le pouvoir offert sur un plateau, ce n’était pas pour édifier, enfin, un Etat, mais, pour construire son pouvoir personnel et prendre sa revanche sur le sort. Il ne s’en cacha point. L’une de ses toutes premières déclarations après son élection était qu’il "n’accepterait pas d’être un trois quarts de président". Il s’attacha à accomplir ses desseins personnels en liquidant ceux-là mêmes qui lui avaient offert l’opportunité de revenir aux affaires, notamment, le Général Lamari, le Général Belkheir et, enfin, le Général de corps d’Armée Mohamed Mediene (Toufik) qui ont tous été écartés du centre de décision, les uns après les autres. La restructuration des services de sécurité, qui n’est en vérité que leur démantèlement et leur affaiblissement, s’inscrit dans la même logique et participe de la même démarche de consolidation d’un pouvoir autocratique totalitaire afin de neutraliser toute force capable de s’opposer aux dérives du clan au présidentiel.

Comme les deux mandats prévus par la constitution ne pouvaient évidemment pas suffire pour étancher sa soif inextinguible de pouvoir, Abdelaziz Bouteflika a entrepris de réviser la Loi fondamentale de façon à se tailler un costume sur mesure et à s’ouvrir la voie pour une magistrature suprême à vie. Il en est aujourd’hui à son quatrième mandat.

Dans l’incapacité totale, sur les plans physique et mental, d’assumer ses prérogatives et missions constitutionnelles, il sert de simple faire-valoir à une bande de prédateurs qui ont mis le pays en coupes réglées et risquent de le mener vers l’irrémédiable, à très court terme.

Ainsi, il est de notoriété publique que c’est son jeune frère Said qui gouverne sans aucune légitimité, en usurpant les fonctions présidentielles au grand dam de la République. Usant sans vergogne des sceaux et armoiries, le Duce de Zéralda menace de limogeages, aussi humiliants que brutaux, tous hauts commis de l’Etat ou hauts gradés de l’ANP qui réprouveraient sa régence clandestine.

La situation catastrophique de non gestion et de blocage dans laquelle se trouve aujourd’hui l’Algérie ne peut se prolonger indéfiniment sans risque d’emporter ce qui reste encore de l’Etat. C’est ce qui explique le débat public dense engagé ces derniers temps à propos de la succession de Bouteflika à longueur de colonnes des différents titres de la presse indépendante. Initié timidement depuis le retour aux affaires de Ould Kaddour, à la tête de Sonatrach, et les tentatives de remettre en selle Chakib Khelil, ce débat s’est singulièrement intensifié depuis ce qui est devenu l’affaire Tebboune, la liquidation politique de l’éphémère premier ministre ayant révélé la choquante collusion du clan présidentiel avec les oligarques de bas étage ! Connivence mafieuse affichée avec arrogance et indécence au cimetière d’El Alia, lors de l’inhumation de feu Rédha Malek, au mépris de tous les principes et valeurs moraux et humains.

La scène politique s’est, depuis, beaucoup emballée, chacun allant de son analyse et de ses propositions pour une action de salut public pouvant permettre de sauver ce qui peut l’être encore de cette Algérie livrée à une destruction programmée.

Une opération de sauvetage de la République d’autant plus difficile à mener parce la classe politique a été minée de l’intérieur par un discrédit financé par le régime qui a corrompu, intimidé, réprimé, infiltré, sapé et démobilisé les formations politiques afin de les couper de leur base militante et de verrouiller durablement le champ politique contre toute alternance au pouvoir. Si bien qu’aujourd’hui, personne n’attend plus de solution qui pourrait émaner d’une opposition de façade, malgré l’intégrité morale intacte d’un bon nombre de ses militants et de ses responsables.

Même l’Armée, le dernier rempart, se trompe pour l’instant de mission. En effet, contrairement à ce que clame son chef, une armée républicaine assure la défense de la République et non celle d’un homme ou d’un clan. La loyauté à l’endroit du peuple, du territoire et de ses institutions devrait primer sur la loyauté envers un homme qui a perdu ses facultés mentales et physiques. Plus grave encore, l’ANP laisse apparaître les signes inquiétants d’une cohésion contrariée, plusieurs de ses officiers supérieurs étant impliqués dans l’affairisme ambiant, directement ou par le truchement de leur progéniture, et donc forcément favorables au statu quo.

Les droits de l’homme sont totalement bafoués et ce n’est pas la commission des droits de l’homme onusienne, qui admet en son sein une Arabie Saoudite archaïque et obscurantiste, qui pourrait convaincre du contraire, à cet égard.

La santé, l’éducation et la justice sont totalement aux antipodes de la modernité et des normes qui leur permettraient de remplir leurs missions au bénéfice de la société et du citoyen. Nos hôpitaux sont des mouroirs, notre système éducatif, sans cesse réformé, produit des diplômés très mal formés tandis que la justice aux ordres du pouvoir est totalement dévoyée.

L’économie, aujourd’hui anémiée et en crise, est dominée par l’informel qui, pour sa survie, entrave les efforts entrepris depuis 1986 pour l’adhésion de l’Algérie à l’OMC. Les transferts sociaux représentent 28% du PIB. Le programme de deux millions de logements pour acheter la paix sociale n’est toujours pas réalisé ; malgré des financements colossaux engagés et l’importation d’une main-d’œuvre étrangère surpayée qui a disqualifié le recrutement national et provoqué d’énormes frustrations chez les chômeurs algériens. Sans résultat probant sur les chantiers de ces entreprises au personnel étranger ni en ce qui concerne les délais d’exécution ni la qualité des travaux.

Plus d’un demi-siècle après l’accession à l’indépendance, le problème fondamental du pouvoir d’achat du salaire reste entier. A ce jour, la disponibilité de la pomme de terre et du lait en sachets constitue un problème récurrent, illustrant, ainsi, l’incapacité des pouvoirs publics à favoriser la mise en place d’une économie moderne arrimée à l’économie mondiale. Nos opérateurs économiques sont, dans leur écrasante majorité, des importateurs qui s’enrichissent sur le dos de l’Etat et du citoyen. Alors que plus de 1000 milliards de dollars ont été dépensés depuis de début de la baraka financière engrangée par la rente du pétrole. Des revenus exceptionnels qui ont coïncidé avec l’arrivée au pouvoir d’Abdelaziz Bouteflika mais qui ont été gaspillés.

La diplomatie. Voilà un autre domaine où la régression est visible à l’œil nu, de jour en jour, avec le désengagement de l’Algérie de causes pour lesquelles elle a toujours été un soutien sans faille, comme le Sahara Occidental, le Sahel et le Mali sans omettre le théâtre de recolonisation en Libye… L’image actuelle que l’Algérie projette d’elle-même est franchement hideuse, comparée à sa vocation de puissance régionale sabotée par les régents d’Alger qui compliquent dangereusement la tâche quotidienne des services de sécurité aux frontières et à l’intérieur du territoire national.

Tous ces maux ont une source : C’est l’embrigadement et l’asservissement d’une élite qui a accepté de prêter allégeance à un système dont elle connaît tous les travers. Une intelligentsia qui a donc péché par lâcheté en acceptant les postes de responsabilité dans les structures de l’Etat et en se délectant des avantages que ceux-ci procurent.

Dans la conjoncture critique que connaît l’Algérie, le clan présidentiel et ses alliés objectifs sont en passe d’installer au pouvoir une bourgeoisie compradore totalement inféodée à l’étranger et qui n’a cure des intérêts de notre pays. Laisser se concrétiser ce projet criminel serait funeste pour l’Algérie du million et demi de martyrs et autres milliers de victimes pour la démocratie et le progrès social depuis l’indépendance.

Bouteflika - qui aime citer Napoléon Bonaparte et préfère se comparer à un héros français plutôt que de puiser dans nos référents historiques - est à mille lieues d’avoir accompli pour l’Algérie ce que Bonaparte a laissé à son pays comme héritage.

Napoléon avait une grande ambition pour sa patrie. Comme l’histoire le lui reconnaît, il a "tenu la carrière ouverte aux talents, sans distinction de naissance ni de fortune, il a livré et gagné de nombreuses guerres, il a mis en vigueur un code de lois qui a fait passer son nom à la postérité, il s’identifie à tant de monuments, d’institutions, et d’actes nationaux dont il est difficile de l’en séparer sans faire injure à son pays…".

Quelles sont les réalisations de son admirateur Abdelaziz Bouteflika ? Le désordre, l’injustice, le népotisme et la corruption à une échelle jamais égalée avant lui, la transformation de nos villes et villages en dépotoirs à ciel ouvert, la prostitution généralisée, une déstructuration de l’économie nationale, une dilapidation des deniers publics, la drogue qui abrutit notre jeunesse et les germes d’un sécessionnisme dans des régions du pays meurtries par les intrigues jacobines du pouvoir d’Alger … N’est-ce-pas là déjà plus qu’il n’en faut de raisons pour que le Président songe à passer la main, d’autant plus qu’il est, aujourd’hui, dans l’incapacité totale d’assumer ses charges constitutionnelles ? Tous ceux qui l’ont approché savent qu’Abdelaziz Bouteflika est atteint d’aphasie totale irréversible le privant de parole en sus de graves problèmes de motricité des membres inférieurs et supérieurs.

C’est pourquoi il ne reçoit plus les officiels étrangers en visite à Alger, il ne reçoit plus les ambassadeurs étrangers, que ce soit pour présenter leurs lettres de créances ou faire leur visite d’adieu, il ne se déplace plus à l’extérieur pour porter la voix de l’Algérie, ni, d’ailleurs, à l’intérieur où toutes les manifestations d’importance sont ponctuées par des messages lus en son nom. Lorsqu’il y est contraint et forcé, il fait de rarissimes apparitions à l’occasion desquelles il révèle aux Algériens, comme aux étrangers, une image bien affligeante de lui-même et du pays.

Bouteflika doit donc cesser d’écouter le chant des sirènes et tous ceux qui, du matin au soir, lui tressent des lauriers et lui chantent des louanges, tels les Djamel Ould Abbes, Amar Saidani, les membres du gouvernement, à commencer par le premier d’entre eux, et tous les hauts fonctionnaires qui n’ouvrent jamais la bouche sans oublier de rendre un hommage appuyé à Fakhamatouhou et à son inénarrable programme. Le seul but de ces rapaces lèche-bottes, sans aucune dignité, est de se maintenir à leurs postes et de préserver leurs intérêts et avantages. Bouteflika, enfant du système qui connaît fort bien cette engeance, a le devoir moral de mettre un terme à cette mascarade.

S’il reste encore à M. Abdelaziz Bouteflika un brin d’amour-propre ainsi qu’un peu respect pour lui-même, son pays et son peuple, il devrait prendre la seule décision, qui s’impose d’elle-même, de se retirer dignement du pouvoir pour permettre à l’Algérie de tourner cette humiliante et sombre page de son histoire et d’œuvrer à redorer son blason en s’attachant à construire un Etat digne de ce nom. Ce faisant, il aurait une possibilité de bénéficier de l’indulgence et de la compassion de ses compatriotes pour entrer, d’une certaine façon dans l’histoire. Peut-être, a-t-il besoin d’être convaincu que sa démission est véritablement dans son intérêt et celui de l’Algérie. Ce serait là, selon sa propre expression, "un bégaiement de l’histoire", l’Algérie étant déjà passé par là avec la démission de feu le Président Chadli qui n’a pas su gérer la crise née du simulacre d’ouverture politique en 1989.

Ce n’est là ni un appel à la sédition, comme le journal en ligne Algérie1 s’est empressé d’en accuser injustement M. Boukrouh, ni un appel à un coup d’Etat. Non, ce n’est rien de tout cela. Il s’agit de rendre l’Algérie à son peuple quand des courtisans diaboliques profitent de l’état grabataire du président de la République pour usurper son pouvoir.

C’est un rappel du danger imminent et gravissime qui pèse sur notre pays et notre peuple et un appel à la sagesse pour que le premier magistrat du pays prenne pleinement conscience, s’il en a encore la capacité mentale, des effroyables conséquences de son entêtement à s’agripper au pouvoir, et, en moudjahid qu’il est, prendre la décision qui s’impose et qui ne pourrait que l’honorer finalement, avant qu’il ne soit trop tard…

Parce qu’il s’avère qu’un processus irréversible a d’ores et déjà été déclenché par des patriotes pour éliminer la vermine qui a confisqué le pouvoir et voudrait finir de détruire le pays.

Puisse l’esprit du Congrès de la Soummam hanter les bureaux les plus calfeutrés de nos hautes institutions pour que la République démocratique et sociale de Ben M’hidi et Abane triomphe enfin sur celle des parasites d’El Mouradia.

Monsieur le président, pour l’Algérie, démissionnez !

Gloire aux Martyrs

Vive l’Algérie

Coordination des Elites Patriotiques d’Algérie

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Commentaires (12) | Réagir ?

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algerie

merci

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algerie

merci

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