"Elections législatives" en Algérie : vers la validation du statu quo !

Les islamistes sont en embuscade avec la complicité de pans entiers du pouvoir qui fait leur jeu pour se maintenir.
Les islamistes sont en embuscade avec la complicité de pans entiers du pouvoir qui fait leur jeu pour se maintenir.

Deux semaines après le lancement officiel de la campagne électorale des législatives, le pays dégage insidieusement l’image d’une ambiance de fête foraine ou, attractions et manèges séduisent plus d’un.

Il s’y produit simultanément des spectacles qui enchantent d’innocents admirateurs, et des clowns qui évoquent à tour de rôle leur propre défaite pour se consoler d’ores et déjà avec les postures victimaires postélectorales. Paradoxalement, d’autres passés maîtres dans la prestidigitation, qui trompent même l’œil vigilent des plus avertis, vivent l’euphorie d’une victoire prématurée. Cette description métaphorique du contexte politique actuel n’est que la face visible de l’iceberg, les enjeux sont beaucoup plus profonds.

Quel que soit l'angle d’analyse, la réalité du paysage politique nous rappelle désespérément toutes les contradictions qui la caractérise. Le dilemme de la participation ou du boycott continue d'alimenter l'hystérie collective dans les deux camps par médias interposés et sur les réseaux sociaux. Les partisans de ces deux options, chacun avec ses arguments, s’accusent mutuellement de vouloir servir les intérêts du pouvoir et ceux de tous les tenanciers, sur lesquels ce dernier s’arc-boute. Ils se disputent le monopole de la vérité. Mais en fait, qui a tort et qui a raison ? La question est complexe et compliquée.

Sur le plan politique rien n’est mystérieux dans l’approche du FFS, tout comme celle du RCD et du PT d’ailleurs. De "la construction du consensus national" du premier, aux craintes du deuxième d’assister impuissant à la "mise à mort du multipartisme", en passant par l’intention du Parti des travailleurs de ne pas "laisser la place aux forces obscures ou à l’oligarchie à l’appétit vorace qui cherche à s’emparer de tous les leviers du pouvoir", il y a de la substance, un fond admissible au débat. Du coup, il n’est pas tout à fait catholique de les vilipender pour leur engagement en faveur de la participation même si elle fera d’eux des acteurs de second rang, des figurants nécessaires pour concéder, à leur corps défendant, le caractère pluraliste à la prochaine assemblée. Ils assumeront le rôle de trouble-fête dans la forteresse parlementaire d’une part, et d’autre part ils ne resteront pas en marge de la prochaine élection présidentielle qui promet d’ores et déjà une redéfinition des équilibres tant à l’intérieur qu’a l’extérieur du système.

Le désintéressement exprimé par une catégorie de citoyen sur le vote suite aux fraudes électorales qui ont entaché les précédentes élections et la défaillance des députés en général, se traduit à juste titre par l’exacerbation de leurs rejets et l’amplification de la tendance du boycott. Ce n’est pas sans raisons qu’ils tournent en dérision l’enthousiasme participationniste de certains dans la blogosphère nationale. C’est dans cette optique que Talaie El-Houriet et Jil Jadid croient avoir tiré leur épingle du jeu en refusant de s’impliquer dans des élections qu’ils jugent a priori "biaisées". Leur position est une posture de confort qui ne gênerait aucunement le pouvoir à persister dans sa démarche jusqu’au-boutiste.

Cette problématique de bipolarité désarçonne l’opposition démocratique, et amenuise l’énergie des acteurs sensés remettre l'Algérie sur les rails du progrès, qu’ils soient boycotteurs ou participationnistes. C’est évident pourquoi ils n’ont pas montré d’ambitions pour rivaliser avec les partis du pouvoir et les islamistes. Prétendre jouer les premiers rôles dans les conditions politique actuelles serait tout bonnement une fumisterie, une fabulation qui les exposera aux foudres de leurs bases respectives et celles de toute la population.

Tout compte fait, les deux options se valent et se neutralisent au même temps. Elles n’auront de sens et d’effet que si l’une d’entre elle est envisagée dans un cadre unitaire, qui promeut une synergie dans la perspective de constituer un pôle démocratique mûr en faveur d’un véritable changement du système, sans quoi ce sera l’éternel recommencement. Visiblement, nous nous acheminons vers la validation du statu quo, lequel sera pour la nouvelle majorité, la condition nécessaire pour "servir la messe" avant la présidentielle.

Dans le contexte actuel où des voix susurrent un possible cinquième mandat, une majorité parlementaire en dehors du FLN et du RND et d’autres supplétifs comme le MPA, TAJ, est une chimère. La question est de savoir qui des deux aura le privilège de conduire la flotte. Cet antagonisme de circonstance se traduit, peu ou prou, par les allusions à peine voilées du premier responsable du FLN sur le fait que le chef de l‘Etat est le président légitime du vieux parti dont le programme en est l’arme, et les rappels réfléchis de Ahmed Ouyahia qu’il est le chef de cabinet de la présidence. Il n’y a donc aucune surprise de les voir en course vers l’allégeance.

Quid des islamistes ? Le prochain parlement sera indubitablement contrôlé par les deux partis du pouvoir certes, mais il sera également marqué par la présence non négligeable des islamistes. Leur réapparition au prochain gouvernement est plausible, a fortiori quand Boudjerra Soltani, ancien chef du MSP fait le mea culpa de son parti en déclarant qu’ils n’auraient pas dû quitter le gouvernement "ni couper les liens avec le FLN et le RND au sein de l’Alliance présidentielle". Voilà un clin d’œil qui résume les intentions des tenants de l’islam politique en Algérie. Les alliances qui ont été tissées entre certaines parties de la même tendance en disent également long et s’inscrivent dans une autre perspective que les élections législatives. La campagne en catimini qu’ils sont en train de mener témoigne de leur certitude que l’électorat islamiste n’a pas régressé.

Tous ces paramètres ne sont pas de simples conjectures mais au contraire, ils annoncent de sérieuses velléités d’assoir les fondements de la continuité au détriment d’un changement radical du système. Les forces démocratiques et du progrès payeront rubis sur l’ongle les frais de leur incapacité à s’affranchir de leur ego, et d’avoir hypothéqué leur autonomie dans la décision politique.

Cid Kacioui

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Commentaires (18) | Réagir ?

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msilaDSP DSP

merci bien pour les informations

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