Amel est revenue… réveiller nos consiences

Amel Zanoune Zouani, pour s’adresser à nos consciences a emprunté la voix de sa sœur Anissa.
Amel Zanoune Zouani, pour s’adresser à nos consciences a emprunté la voix de sa sœur Anissa.

J’ai lu la lettre par laquelle elle a tenu à revenir se rappeler au souvenir de ceux qui l’ont oublié et se présenter à tous ceux, trop jeunes, qui ne l’ont pas connu ! Puis-je garder le silence après cette lecture ? Amel Zanoune Zouani, pour s’adresser à nos consciences a emprunté la voix de sa sœur Anissa.

Dans son émouvante lettre, elle parle avec simplicité. Etudiante en droit à Ben Aknoune elle rêvait du jour où elle se ferait la voix des plus humbles, où elle défendrait la veuve et l’orphelin. Du haut de ses 22 ans, belle et pleine d’espoirs elle tirait sa force de l’amour des siens. L’avenir pouvait-il faire autre chose que lui appartenir ?

Mais il y a eu ce dimanche 26 janvier 1997. Un jour glacial, choisi dans le calendrier de ses assassins, 17ème jour du mois de ramadhan occasion à une commémoration sanglante de «ghazouat Badr» ! Elle avait quitté Alger en direction de Sidi Moussa, dans le bus, elle ne pensait qu’à la chaleureuse ambiance familiale qui l’attendait chez elle. C’était sans compter sur les macabres desseins des djihadistes du néo islam. Une heure avant la rupture du jeûne (17h14 mn dans la temporalité des gens ordinaires) au lieudit Benedja près de Bentalha, une meute armée attendait une cible identifiée. Ils arrêtent le bus, y montent et la font descendre...

Elle nous dit le sort qui l’attend au dehors. Elle sait cette infâme condamnation à l’immolation en offrande à un Dieu devenu barbare dont les anges ne retiennent plus la main de l’officiant pour lui offrir un bélier en substitut à l’humain entravé. Elle se sait condamnée parce femme, femme en quête de son émancipation par les études et le savoir. Elle n’ignorait pas l’atrocité qui l’attendait, mais elle ne supplie pas ces monstres ligués contre sa frêle personne. Elle a regardé les autres passagers pour que son limpide regards s'imprime dans leurs mémoires. Pour que ce souvenir les amène à dire son courage, sa grandeur face à la vilénie de ces monstres déshumanisés qui se sont érigés en anges de la mort.

L’égorgeur, sans aucun état d’âme, aiguisait son couteau sur une pierre et s’acquittant de son acte de dévotion, sous le regard des autres passagers, il improvise une diatribe sensé légitimer l’abomination. Que cela serve d’exemple "à toutes les femmes qui continuent à fréquenter l’école". Une vocifération comme celles qui emplissent, aujourd’hui, les vidéos de Daesh et el Qaida. Amal connaissait ces menaces, ces interdits au nom d’une religion qui, nous dit-on, recommande d’aller quêter la connaissance même en Chine, à l’époque, le bout du monde. Elle savait; mais, c’était une résistante !

Ce que Amal ne pouvait savoir c’est ce qu’elle apprendra, 17 ans plus tard, lorsque sa maman la rejoindra. Elle apprendra que ses assassins sont honteusement amnistiés. Qu’ils sont libres de leurs mouvements et libres de fructifier le butin de leur guerre. Qu’un texte scélérat, «la charte de la réconciliation nationale», passe pour être la traduction de la volonté populaire. Que sa conduite héroïque, son comportement exemplaire et sa résistance sont méconnus de la jeunesse d’Algérie. Pouvait-elle savoir qu’elle serait confinée dans le statut de victime (collatérale) d’une confrontation dans laquelle l’actuel chef des armées, s’il avait eu ses 22 ans, aurait probablement été celui qui l’empoignât pour lui ôter la vie ?

Mohand Bakir

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Commentaires (7) | Réagir ?

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gestion

MERCI

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algerie

merci

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