Législatifs : l’opposition s’appuie sur de fausses hypothèses

L'alliance de l'opposition a éclaté avant l'échéance électorale.
L'alliance de l'opposition a éclaté avant l'échéance électorale.

Il ne faut pas se voiler la face, la participation des différents partis à la gestion des collectivités locales et des préoccupations législatives n’a jamais assuré un partage de pouvoir et encore moins son équilibre.

En revanche, la récente sortie du ministre de l’Intérieur au sujet des partis qui boycotteraient les prochaines élections législatives montre incontestablement la gêne pour ne pas parler carrément de la déroute de l’establishment dans la démarche de leur poursuite dans la stratégie de continuité et surtout leur aveu d’échec de trouver un leader charismatique comme alternative. La tentative de Chakib Khelil semble s’éloigner puisque sa tournée à travers le pays n’a pas recueilli l’unanimité de l’ordre établi. Depuis quand, le pouvoir s’inquiète-t-il de la représentation des citoyens dans l’hémicycle alors qu’il tire sa légitimité depuis la soi-disant ouverture du champ politique avec des élus qui chauffent les chaises ? Non seulement ces élus s’accommodent avec le système mais lui donnent une crédibilité dans tout ce qu’il entreprend

Cette fois-ci à en croire le leader islamiste Menasra qui affirmait à la chaine Al Magharibia que c’est le pouvoir qui insiste pour que leur aile s’unisse et c’est ce qu’ils semblent faire pour satisfaire cette sollicitude. Les citoyens ont remarqué que le dernier trimestre de l’année 2016 a été très chargé pour le président de la république qui a fait plusieurs sorties d’inauguration dont la dernière est celle de la nouvelle ville de Sidi Abdellah. Il s’exprime peu par personne interposée et voilà que le mercredi dernier il accorde carrément une interview au Groupe Business Oxford dans laquelle chiffres à l’appui il fait l’éloge "économique" de ses trois quinquennats et demi avec une perspective rassurante pleine de défis dont notamment l’allégement de l’Algérie vis-à-vis de sa dépendance des hydrocarbures. Le plus surprenant est qu’aucun quotidien national privé n’a fait la moindre allusion à cet entretien à part les médias lourds de l’Etat et El Moudjahid, exception faite de certains journaux électroniques comme Le Matindz.net et Al Huffington Post Maghreb. L’ont-ils considéré comme un non-événement eu égard au match qui opposait le lendemain l’Algérie à la Tunisie ou n’en ont-ils pas cru leurs oreilles ? Pourtant, cette forte médiatisation par spots répétitifs chaque demi-heure vise bien une offensif du système pour marquer sa présence et éloigner les résistants de la ligne de conduite qui forme l’ordre établi où chacun trouve son compte.

En se limitant aux problèmes économiques, les réponses du président de la république semblent viser la rigueur de la loi de finances pour l’année 2017 que l’opposition utilise comme brandon pour mobiliser les citoyens. La situation économique est présentée aux antipodes de ce que qualifie l’opposition actuellement : la leader du Parti des travailleurs parle de chaos, voire même de la somatisation du pays, le parti Talaie El Houriyyet lui invoque le marasme des institutions qui s’abaissent à la politique du donnant-donnant etc. il ne s’agit plus de divergences dans la marche à suivre pour atteindre un même objectif mais d’un changement profond qui chamboulerait l’équilibre du régime dans son ensemble d’où les inquiétudes du système qui se prépare pour la riposte et il y parviendra sans aucune difficulté. Comment justement, pour rappel, a été historiquement formé ce système ? De quelle manière fonctionne-t-il ? Quelles sont les hypothèses qui faussent les analyses de l’opposition, et, partant rendent leurs démarches vaines ?

1- Du système lui-même

Il ne faut pas oublier que le parti du Front de la Libération nationale (FLN) est apparu au lendemain de l’année 1962 comme un creuset de tendances autour d’un consensus qui est l’indépendance politique de l’Algérie. La dynamique de ses affinités a commencé une fois cet objectif atteint. On peut considérer pour faire court la première présidence sous le feu Ahmed Ben Bella comme réservée à cette chamaillerie interne du parti et la réorganisation de l’économie nationale suite au départ massif des colons et l’abandon des moyens de production notamment les domaines agricoles. Il a fallu attendre l’année 1965 pour que l’armée sous le guide du feu charismatique Houari Boumediene s’empare du pouvoir pour redresser la ligne et rassembler encore une fois ces différentes approches du FLN autour d’un autre consensus cette fois-ci l’indépendance économique. Jusqu’à sa mort le pays à brillé par la clandestinité des idées, la gestion par des symboliques et surtout la prédominance de la cohésion sociale sur celle politique qui n’était pas d’actualité. A sa mort des technocrates, ont envahi les rangs du parti pour réorienter le modèle et concevoir des règles pour son fonctionnement. Le choix d’un leader qui se conforme à cette base se fait soit au sein de l’armée, des anciens moudjahidines charismatiques par leur historicité ou éventuellement des enfants de Chouhadas. Ceux qui n’ont pas accepté de suivre la ligne de conduite ont été écartés de différentes manières comme Boudiaf, personnalité historique, ceux qui n’ont pas résisté à la pression n’ont pas fini leur mandat comme feu Chadli Bendjedid, Commandant d’une région militaire Lamine Zeroual, officier supérieur de l’armée et fils de Chahid. Peut être que les déclarations de l’ancien ministre des affaires religieuses Bouabdellah Ghlamallah en affirmant que «Boudiaf a été liquidé par ceux qui l’ont ramené», ses paroles dépassent de loin ses pensées mais il n’a pas tord sur la forme. Car depuis le systéme s’est forgé et durci par l’arrivée d’une oligarchie formée par les nouveaux riches qui ont mélangé l’argent avec la politique et justement le feu Boudiaf s’est attaqué à la corruption qui constitue leur niche de transaction. Aujourd’hui les tendances du vieux parti se sont éclatées en excroissances qui s’unissent sous forme d’alliances au niveau central pour cautionner le pouvoir sans pour autant sortir de la ligne de conduite tracé par le système. Son endurance durant la décennie noire des années 90 est édifiante. C’est un leurre que de prendre Bouteflika pour un parrain du système et de croire qu’il s’accroche au pouvoir. C’est cet establishment qui s’agrafe à lui pour perpétuer la ligne de conduite tant qu’il est en vie s’il avait réussi à coopter quelqu’un, il l’aurait laissé se reposer. La preuve, avant de se porter candidat libre à la présidence de la république en 1999, on a fait appel à lui comme à Ali Kafi, Youcef Khatib, Ali Haroun pour ne citer que ceux là. De nombreuses voix tentent de ramener les problèmes actuels de l’Algérie sur la personne pour les éloigner du système qui commence à prendre une ampleur inquiétante ces dernières années. Il est formé aujourd’hui d’opportunistes du parti unique et de ses excroissances qui en voulant le perpétuer, refusent, voire même résistent aux changements. Ils s’approprient l’indépendance de l’Algérie et la révolution économique, sociale et culturelle qui s’en est suivi pour asseoir leur pouvoir comme tuteurs du peuple Algérien et au nom de cette légitimité, l’empêche de prendre le chemin autre que celui tracé par la révolution qui leur enlève les mamelles de leurs bouches.

2- Les hypothèses qui fondent les programmes de l’opposition ne sont pas crédibles

2-1- Le prétexte de la fraude massive aux élections n’est plus mobilisateur

Dénoncer sans démontrer la fraude massive pour mobiliser un contre-pouvoir est devenu un générique qui ennuit les citoyens qui remarquent de leur yeux que le système en rassemblant les fonctionnaires, l’armée et les corps constitués auxquels il ajoute les sympathisants de son alliance totalise les ¾ du corps électoral. Pourquoi s’adonnerait-il à son genre d’exercice ? Ceux qui développent une telle approche ignorent l’Algérie profonde car le système continue de jouir d’une base solide qui répond présente à chaque échéance électorale. C’est plutôt l’abstention qui pourrait poser problème. Or, celle-ci concerne les démocrates qui prônent et appellent au changement en désertant les urnes alors ! Tant pis pour eux.

2-2- L’appel à l’aide aux démocraties occidentales est inutile

L’Europe avec à sa tête la France, les Etats-Unis même des démocrates s’accommodent avec les régimes comme le nôtre et font tout pour le maintenir et interviennent à chaque fois qu’il tente d’en dévier. Depuis l’élection de François Hollande, les responsables politique français ont rendu plus de visites en Algérie que dans leurs propres métropoles. L’Algérie par sa dépendance des produits alimentaires français (blé, lait etc.) fait travailler près d’un million d’agriculteurs. Elle s’ingère dans toute transaction avec d’autres pays de part sa position d’ex-puissance colonisatrice disposant de toutes les informations sur l’Algérie. Aucun régime, ne peut lui permettre de telles faveurs. Les Etats-Unis ont soutenu le quatrième mandat de Bouteflika en envoyant plusieurs émissaires dont son secrétaire d’Etat Hillary Clinton. Donc continuer à compter sur les ONG occidentales pour déloger le régime en place est un leurre, et les citoyens l’ont bien compris pour ne plus y adhérer.

2-3- Les citoyens n’entravent pas les réformes audacieuses s’ils s’avèrent nécessaires

Les émeutes, les grèves ainsi le mécontentements populaires ne sont pas contre la consolidation budgétaire qui a été imposée par les circonstances économiques particulières. Tout le monde sait maintenant que le choix qui s’offrait à l’exécutif reste limité à deux variantes : soit continuer à se renvoyer la responsabilité sur ceux qui ont mené le pays là où il est actuellement. Auquel cas, on aboutirait à la pédale à vide qui se terminera par une violence souvent incontrôlable. Elle y sera ainsi parce qu’on aura perdu beaucoup de temps sans avancer et on ne pourra plus entretenir les conséquences néfastes qui en découlent. Ou bien il faut aller vers des réformes audacieuses quitte assumer ses effets secondaires. L’opposition oublie que l’Algérien bien avant l’indépendance n’a jamais revendiqué ou rouspété quoi que ce soit pour son ventre. Tous les voisins l’ont fait, les Marocains, les Tunisiens mais jamais les Algériens. Ils se sont toujours débrouillés comme ils peuvent pour ne pas gêner la ligne de conduite pour ce problème précis. Bien au contraire, à l’indépendance, ce sonr les citoyens qui par leur solidarité et en dépit de leur pauvreté, ont alimenté la première caisse de l’Etat pour la gestion de la transition liée au départ massif des colons (Soundouk tadhamoune).

Par contre et à travers tout le cycle de sa dépendance des différentes conquêtes en Algérie, il a montré son ferme rejet de la hogra, de l’injustice sociale et surtout de l’iniquité dans le partage depuis la famille jusqu’à l’Etat. Il se trouve justement que cette austérité est venue au moment où ces dysfonctionnements sociaux ont atteint leur limite insupportable.

3- Conclusion

Face à un contre-pouvoir qui ne le comprend pas, le citoyen préfère le système qu’il connaît bien que de suivre des changements dont les tenants et les aboutissants lui sont inconnus.

Rabah Reghis, Consultant, Economiste Pétrolier

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Commentaires (5) | Réagir ?

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urfane

(Soundouk tadhamoune) !! voila donc une belle lisse poire du prince des coups tordus BENGUELLA! Je ne sais pas si les algériens se souviennent de cette arnaque mais les égyptiens, à coup sûr, oui; c'est eux qui ont raflé;

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Atala Atlale

@Mourad F. Je ne pense pas Mr Chakib Khelil pour revenir occuper un quelconque poste ministériel en raison de ses "implications dans des affaires de corruption" la presse en a fait état un bon moment dans le passé. Le pouvoir est intelligent il ne va pas se hasarder à heurter l'opinion publique nationale au fait des poursuites judiciaires à l'encontre de ce Sieur, dont celle de l'Italie. Et cela risque de donner des ailes à tout ceux qui ont fait de même dans cette rapine généralisée subie par le pays des années. Ce Monsieur a de surcroît surexploité sans vergogne nos gisements pétroliers pour plaire à ceux qui l'ont soutenu à l'étranger, ce qui a qualifié par certains spécialiste de crime. Il y a des compétences saines capables de sauver le pays au plan économique, mais ils ne seront pas sollicités pour autant.

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