Les prochaines législatives maintiendront le FLN de Bouteflika au pouvoir

Djamel Ould Abbès.
Djamel Ould Abbès.

Contrairement à toutes les affirmations du gouvernement, le résultat des prochaines législatives est déjà décidé hors des mécanismes de la démocratie.

En Algérie, il y a les vrais mécanismes qui régissent le gouvernement du pays et les faux qui miment la démocratie. Les prochaines législatives d’avril font partie de cette deuxième catégorie. Les amis du président Bouteflika ont déjà tout organisé pour qu’il ne perde pas le pouvoir. Les élections à venir sont uniquement là pour limiter les contestations et tracer des lignes rouges à ne pas franchir par la population. Ces marques permettront à l’armée de charger si la menace d’un improbable renversement de situation se profile. Tout ce que le gouvernement met actuellement en branle est fait pour assurer la réélection du FLN qui vide pourtant le pays de ses ressources tant humaines que naturelles. Le contrôle autoritaire des médias et de la population est tel qu’il est actuellement impossible de dire si les émeutes qui se sont produites surtout à Béjaïa étaient le fait d’agents provocateurs ou émanaient de la colère populaire. Elles auraient aussi bien pu être de vraies révoltes que des contre-feux allumés en Kabylie pour mieux contrôler la population par la peur. La politique algérienne est un spectacle élaboré dont le scénario est écrit des mois à l’avance. On peut donc déjà annoncer que le FLN sortira "grand vainqueur" des prochaines législatives.

Étant donné que cette mise en scène laisse souvent des bouts de ficelles qui trainent, le gouvernement ne veut pas que des organismes internationaux mettent le nez dans "leur forme de démocratie". Des tracasseries administratives du gouvernement nuisent sciemment aux organisations de défense des droits humains qui œuvrent dans le pays telles la Ligue algérienne des droits de l’Homme (Laddh) ou Amnesty International qui ne peuvent plus depuis 2014 louer un bureau ou une salle publique pour y tenir une réunion ni même ouvrir un compte en banque. Le gouvernement interdit toujours à Human Rights Watch de venir sur le territoire algérien et ne répond pas aux demandes de visites des rapporteurs spéciaux de l’ONU sur la torture et sur la liberté de réunion pacifique et d'association.

Il n’est donc pas étonnant que Human Rights Watch vienne de pourfendre le traitement de la liberté d’expression en Algérie. Les autorités algériennes ont fait le ménage en 2016 parmi les journalistes et personnalités du monde des médias qui refusaient de plier l’échine. Ceux-ci ont eu droit à des poursuites pénales pour avoir exercé pacifiquement leur droit à la liberté d'expression. Cette répression se fait en toute légalité puisque l’article 2 du code de l’information adopté en 2012 considère qu’outrager le Président et insulter des responsables de l'État est criminel. Prendre un politicien la main dans le sac et le révéler au grand jour peut amener un journaliste directement à la prison selon la loi. Les textes des journalistes doivent respecter la souveraineté, l’unité et l'identité nationale. Ils doivent refléter les valeurs culturelles de la société, les exigences de la sécurité et de la défense nationale. Même les émissions satiriques comme "Ki Hna Ki Ness" ont passé à la casserole en 2016. Toute contestation de l’ordre établi est punissable d’emprisonnement. Une fois les législatives passés, le gouvernement fera un peu preuve de magnanimité pour les journalistes repentants et la structure de corruption institutionnalisée aura ainsi surmonté une autre épreuve prouvant qu’en Algérie l’élite doit rester riche et en santé et le peuple pauvre et malade.

Pendant ce temps, la crise financière paralyse l’État, le déficit commercial se creuse et la monnaie nationale se déprécie. Comme le Fonds de régulation des recettes est presque vide, l’économie algérienne sera moins dynamique que celle de la Tunisie et du Maroc dans les prochaines années selon la dernière analyse de la Banque mondiale. La Loi de finances 2017 impose donc des augmentations, des taxes et des restrictions budgétaires à la population.

Pourtant, les choses pourraient changer. La secrétaire générale du Parti des travailleurs, dernière formation à s’impliquer dans les prochaines législatives, aurait la possibilité de créer un consensus social et sortir le pays de l’ornière où il s’enlise et s’apprête à verser. Faire des réformes structurelles profondes oblige une confiance qui est inatteignable quand les ficelles de l’État sont si grosses qu’elles deviennent difficiles à cacher. Bien appuyée, Louisa Hanoune peut tenir tête au gouvernement qui dans les mots de la femme de combat "provoque le peuple" en favorisant "la minorité" aux dépens de "la majorité".

Michel Gourd

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Commentaires (3) | Réagir ?

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gtu gtu

merci

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gestion

merci

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