Abdelmalek Boudiaf, Mounia Meslem... et les autres ?

"Le pseudo-complément alimentaire" qui a révélé des erreurs graves et une somme des incompétences en haut lieu
"Le pseudo-complément alimentaire" qui a révélé des erreurs graves et une somme des incompétences en haut lieu

Au moment même où l’Algérie fait face à une chute de ses recettes pétrolières, secteur qui constitue les poumons de l’économie nationale et que malgré les efforts diplomatiques considérables, pour rallier à ses causes les pays producteurs et non producteurs de pétrole, elle reste convaincue que la période du baril à 120 dollars est révolue.

Quand bien même tous les opérateurs respecteraient leurs engagements respectifs, la stabilisation des prix entre 50 et 60 dollars est possible mais au delà de ce niveau, la machine du gaz de schiste se déclenche avec un risque de revenir à la case de départ. Donc il n’y a pas de temps à perdre pour libérer les initiatives de haut en bas afin d’encourager les investissements et inciter la ressource humaine à plus de créativité, seul gage pour espérer décollage véritable de l’économie nationale. Or, on remarque qu’à chaque tentative faite par les responsables pour s’exercer à ce processus de management, un lobby sous forme de meute, utilisant tous les moyens : médiatiques nationaux et internationaux ainsi que les réseaux sociaux pour s’acharner sur lui lorsqu’il tente de sortir de l’ordinaire et notamment en voulant libérer la créativité et faire sortir les surdoués de la moyenne. L’exemple de l’affaire du RHB est édifiant. Ce médicament dénommé "Rahmet Rabbi" qui semble s’arracher par les diabétiques souvent très mal informés ou fortement manipulés par les médias lourds pour une histoire d’audimat. En effet, qu’aurait-il de mal ou d’illogique qu’un ministre de la république, approché par un moudjahid de la première heure et officier de l’ALN et qui lui dit que son fils, d’abord docteur de formation, ensuite chercheur de métier serait détenteur d’une invention qui pourrait soulager la santé publique d’un fléau social. Non seulement, il a le devoir d’en tenir compte et de la prendre en charge en utilisant bien entendu les canaux réglementaires, mais aussi il sera condamnable s’il ne l’avait pas fait. Quelles sont justement les péripéties de cette affaire et quelles en sont les leçons à tirer ?

1. Comment cela a commencé ?

Cette affaire aussi incroyable d’une découverte d’un médicament contre le diabète du médecin Toufik Zaibet que la chaîne Echourouk Tv a monté au pinacle et presque forcer le ministre de la santé à s'y impliquer sans penser aux conséquences de son intervention face à une jolie rédactrice en chef de ce canal. Les observateurs donneront peut-être à cette affaire montée de toutes pièces par les médias une explication par l’air du temps, par cette tendance à courir derrière un miracle au lieu de travailler et de chercher. Dans l’histoire de la presse et du délire, il restera cette image publiée par le journal Echourouk de l’inventeur du médicament-miracle reçu par le ministre de la Santé avec un titre auto-glorificateur pour la chaîne éponyme : "L'émission "Echourouk" «enquête» et pousse le ministre de la Santé à adopter l’invention du médicament pour le diabète. Tout le monde était pris par cet élan de pseudosuccès en jouant de l’amertume des 8% de la population algérienne atteinte de cette maladie dite du "siècle". Ainsi une jeune femme, veuve et mère de deux enfants diabétiques type 01 a profité de son statut de double nationalité Franco-Algérienne et ayant vu les différentes émissions diffusées par la chaine Echourouk, a décidé de faire le voyage de Paris à Alger où habite sa mère pour se procurer ce médicament miracle. Ses enfants, de très jeune âge, ne pouvaient se passer des caprices de bonbons et de chocolats comme tous les enfants de leur âge. Ceci lui crée d’énormes difficultés pour contrôler leur glycémie.

A Alger personne ne pouvait lui donner la moindre information sur le sujet. Il lui a fallu prendre un taxi direction Constantine. Là, perdue dans une telle agglomération, elle avait contacté le premier pharmacien qui s’offre à elle. La première réponse été très sèche. "C’est une supercherie chère Madame, n’y croyez surtout pas". La déception a été tellement forte qu’elle ne voulait pas croire à cette première riposte de cette officine. Elle poussa donc son investigation jusqu’à tomber sur un autre pharmacien qui l’a comprise en l’informant qu’il n’avait pas ce médicament mais lui a indiqué l’adresse du domicile de l’inventeur. Elle devait pour cela prendre la route d’El Khroub, la maison se situait à la sortie de Constantine. Sur place, après quelques renseignements, elle a pu accéder à une somptueuse villa des Zaibet. Elle tape à la porte. Ce n’est malheureusement pas l’inventeur qui l’a reçue, mais son frère. Il leur a confirmé les bienfaits de ce médicament miracle mais sa disponibilité aurait été prévue dans une quinzaine de jours. Peut importe l’attente, l’essentiel pour cette malheureuse est la guérison de ses poussins à n’importe quel prix ! Que vaut une attente de deux semaines par rapport aux bienfaits et aux résultats qui vont changer complètement sa vie. 15 jours voire un mois est passé, cette pauvre dame est de retour en Algérie pour qu’on lui dise que le ministère du Commerce a interdit la vente de ce médicament. Aujourd’hui, face à un débat stérile autour de cette question, elle ne sait plus à quel saint se vouer.

2. Echourouk a glorifié l’événement et donc semé la confusion

La chaine Echourouk TV, imitant certainement les médias européens par le biais des différents satellites qui permettent de les capter, a voulu gagner en audimat sans mesurer les conséquences entraînant dans sa lancée le ministre de la Santé qui lui croyait en cette invention pour avoir côtoyé, selon ses propres dires, la famille Zaibet lorsqu’il était wali de Constantine. Mais il n’a jamais dit qu’il a le pouvoir d’autoriser sa commercialisation et qu’en dépit de la relation intime qu’il entretenait, il ne pouvait déroger à la procédure de la faire passer par des laboratoires d’essai et d’analyse qui prendra le temps nécessaire parfois plusieurs années. Il a même fait allusion à une autre faite par les étudiants relevant du secteur de la recherche scientifique qui auraient mis au point un remède à partir des plantes contre le cancer. Ces encouragements vers la recherche et l’innovation sont tout à fait du ressort de ces secteurs : la santé et la recherche scientifique. Mais étant donné la prise d’assaut de l’événement, sa sensibilité et surtout son importance pour les quelques 4 millions de diabétiques en Algérie, le même ministre a été contraint de fournir d’autres précisions pour rassurer les futurs utilisateurs. C’est un remède miraculeux qui va révolutionner le monde de la médecine.

Plus tard, Toufik Zaibet lui-même a reconnu que le médicament qu’il a mis au point n’était en fait qu’un complément alimentaire et qu’il ne pouvait en aucun cas régénérer les cellules du pancréas. Maintenant on apprend qu’il est commercialisé dans des officines au public et qu’il a déjà fait des dégâts. Pour être commercialisé, il a dû passer par les étapes réglementaires et notamment les dispositions du décret exécutif 92-284 du 6 juillet 1992, relatif à l’enregistrement des produits pharmaceutiques à l’usage de la médecine humaine celles de la note n°221 de la direction générale de la pharmacie en date des 16 et 17 novembre 2016. Selon toute vraissemblance, le produit ne figure pas dans la nomenclature nationale des produits pharmaceutiques. Il n’y a pas eu rapport scientifiques validés portant sur les essais cliniques du produit. Il n’existe pas non plus d’articles scientifiques publiés sur le produit, et donc d’absence d’informations scientifiques validées. Si tel est le cas, les pouvoirs publics et non seulement le ministre en charge du secteur ont totalement ignoré l’importance que revêt la question auprès des patients diabétiques en attente d’un traitement définitif du diabète. Si ce médicament a eu un avis défavorable et une mise en garde sérieuse du corps médical notamment la Société algériennes de Diabétologie, ils auraient méprisé les demandes auxquelles font face actuellement les pharmaciens de la part des patients. Ils n’ont rien fait pour respecter les pratiques anti-déontologiques de commercialisation du produit (monopole de vente, absence de traçabilité, vente concomitante, pack, paiement cash, …) signalées et les risques de mise en concurrence déloyale entre les pharmaciens. Comment peuvent-ils encourager le risque encouru par la population suite à une publicité démesurée vantant des propriétés antidiabétiques non prouvées.

Si ce médicament est fabriqué dans un laboratoire, il doit avoir un registre du commerce et pour l’obtenir, s’agissant d’une activité réglementée, il devra être muni des autorisations nécessaires. Ce sera une affaire grave qui relève de la responsabilité de tout l’exécutif si comme le relate la presse : toutes ces phases sont outrepassées et l’inventeur n’est qu’un aide soignant du dernier ordre, donc un imposteur ou un escroc. Dans les pays qui se respectent lorsque les spéculations atteignent une telle ampleur, c’est le président de la république lui-même ou son représentant qui viennent s’expliquer devant le peuple mais aucun cas laisser le ministre en charge du secteur endosser seul les conséquences d’une initiative relevant de son domaine de compétence. Sinon, aucun responsable ne prendrait le risque pour renouer avec le marasme des années 70.

3. Le lynchage médiatique de Mounia Meslem pourrait être un règlement de comptes

Il n’y a pas seulement Boudiaf qu’on tente de mettre au devant de la scène, la ministre de la Solidarité nationale, de la Famille et de la Condition féminine s’est trouvé au cœur d’un scandale pour avoir dit tout haut ce que tout le monde pense tout bas. Par son franc parler, la ministre a été le seul membre du gouvernement qui a osé dénoncer le marasme du système sociétal depuis l’ouverture du champ politique après les événements d’octobre 1988. De nombreux leaders de ces associations les utilisent comme un tremplin pour des desseins personnels. Donc on est en droit de se poser la question sur ce tapage médiatique autour d’une solidarité qui relève de son secteur sous forme d’une initiative où elle se constitue comme première volontaire en tant que femme mariée et mère de famille.

Dans les faits, la solidarité a débuté avec la chute des prix du pétrole, début 2015, le premier pays qui a ouvert la voie c’est le Venezuela. Le président vénézuélien Nicolás Maduro a donné l’exemple en offrant une part importante de son salaire. Il sera suivi plus tard par ses ministres et toutes les chambres des représentants du peuple. Cela avait déclenché une solidarité nationale dans laquelle les citoyens de toutes catégories sociales y ont contribué pour créer ainsi une dynamique de solidarité, qui les a quelque peu soulagés et tranquillisés sur les difficultés inextricables que vivait ce pays par manque de recette pétrolière pour boucler leur budget. Depuis, de nombreux experts se sont exprimés pour recommander au pouvoir algérien d’éviter de demander uniquement au peuple de serrer la ceinture mais de commencer par compresser la leur d’abord. La ministre en charge de la Solidarité a pris l’initiative qui relève de sa compétence pour s’exprimer sur les cas de la famille qui touche deux salaires, peut-être plusieurs et c’est une réalité que personne ne pourrait nier. Il se trouve par cette spontanéité, c’est son état "enfant" qui s’est exprimé comme l’ont fait de nombreux responsables avant elle à commencer par le premier ministre qui a préféré qu’on jette son corps en mer que d’être enterré dans les cloutières algériens. Si les médias européens se sont étonnés, cela se comprend de part leur culture.

Dans ces pays, le contrat social fait que la femme et le mari partage tout et donc il existe des maris qui s’occupent des enfants pendant que l’épouse est au travail. La législation européenne, par exemple, accorde des congés parentaux pour homme au foyer. Ce n’est pas le cas en Algérie et encore moins en Egypte qui était la première à vendre la mèche médiatique reprise d’un quotidien national arabophone. Un pays qui continue à pratiquer sur la femme l'excision pour la priver d’une sensation que Dieu lui a donnée. C’est aussi un pays qui tolère que les cheikhs du Golfe prennent les Egyptiennes par centaines pour en faire des esclaves sexuelles. Il se permet à travers une simple déclaration d’un responsable, au demeurant juste de juger la société algérienne. Surtout que les officiels ne se cachent pas derrière les médias égyptiens qui se sont emparés de l’affaire car le pouvoir contrôle tout et en premier lieu ces médias.

Dans le fond cette bonne femme, quel que soit ce qu’elle aurait pu dire, aura des problèmes. Si elle ne dit rien, on l’accusera de diriger une institution stérile. Finalement son exemple de femmes entretenues par ses époux reste le plus crédible et conforme à la culture arabo-musulmane. Elle aurait pu demander aux femmes mariées de se solidariser avec leurs salaires et de se laisser entretenir avec celui de leurs épouses, elle dormirait avec un œil enflé par un macho. Aurait-elle incité les responsables au-dessus d’elle à se solidariser, elle aurait été relevée de ses fonctions. Donc elle s’est référée sans doute à l’exemple de sa mère et grand-mère qui ont été les premières à ôter les bijoux de leurs poitrines afin de se solidariser avec la première caisse de l’Etat pour lui permettre de gérer les affaires courantes après une guerre menée pendant sept ans. N’est-ce pas de cette manière que l’Algérie a constitué sa première caisse de solidarité après l’indépendance à l’appel de son premier président ? Maintenant, comment cet argent récolté ou à récolter va être utilisé est une toute autre question qui sort de ses attributions mais tout de même, elle n’aura certainement pas manqué de courage de le dire ouvertement.

Rabah Reghis, Consultant et Economiste Pétrolier

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Commentaires (4) | Réagir ?

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tahar foli

Merci d'avoir soulevé le sujet

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mohamed boudebza

Jusqu’à présent et en dépit des témoignages de plusieurs citoyens à la télévision qui l’ont essayé et selon leurs propres dires, ils pouvaient grâce à ce médicament se permettre de tout manger sans pour autant abandonner leurs traitements habituels. Celui de Tipaza et l’autre de Ghardaïa sans compter la population de la périphérie de la ville natale de l’inventeur si on peut l’appeler ainsi. Ce qu’on sait à l’heure où mettons en ligne ce commentaire :

• Une expertise a été effectivement effectuée au Centre national de toxicologie (CNT), à l’Institut Pasteur d’Algérie, après avoir été déposée par le ministère de la Santé. L’analyse n’a donc concerné que le dosage des métaux dans le produit, dont un liquide et une poudre. Les résultats confirment la non-toxicité et la présence de différents constituants de l’huile d’olive, sans plus, puisqu’aucune fiche technique ni composition exacte du produit n’ont été transmises à ce jour. Il a été prouvé scientifiquement que l’huile d’olive est recommandée pour les diabétiques

• Il est bien spécifié dans sa boite qu’il s’agit bien d’un complément alimentaire et donc ne peut en aucun se substituer au traitement qui est prescrit habituellement aux diabétique. Donc ceux qui ont abandonné leur traitement et se sont limité à ce complément alimentaire ont été victime de la propagande diffusée à travers la chaine ECHOUROUK qui veut absolument (et cela se remarque par les différents sujets qu’elle diffuse), construire sa stratégie de communication sur la presse à scandale. Si quelqu’un a abandonné son médicament et a exposé sa santé au danger, c’est entièrement de sa faute et donc ni les pouvoir publics, ni « l’inventeur » n’assument la responsabilité

• S’agissant d’un complément alimentaire qui pourrait soulager les diabétiques, il n’est pas considéré comme un produit pharmaceutique. Les prérogatives du ministère de la santé dans le cadre de la législation actuelle ne portent que sur les produits pharmaceutiques, à savoir le médicament, les vaccins, le sérum, et ce produit ne peut pas être considéré comme étant un produit pharmaceutique. En d’autres termes, touts lesعششبية et il en a des milliers en Algérie proposent des médicaments de ce genre même plus aux citoyens et ils y croient Est –ce par effet placebo ou autre ils y croient.

• Il faut signaler que malgré les alertes, les pharmacies à Constantine sont envahies par les malades qui veulent l’essayer à tout prix car les restrictions de ce mal les dérangent dans leur vie quotidienne.

• Lors de son passage dans les émissions dont ECHOUROUK détient l’exclusivité, Monsieur Toufik ZAIBET n’a jamais dit directement qu’il était médecin n’a jamais prononcé le mot de chercheur. Se sont les autres qui parlent pour lui y compris le ministre qui a dit «J’ai vu son CV » mais en aucun cas ses diplômes. D’autres comme l’animatrice de l’émission Echourouk et surtout le journaliste qui a réalisé le reportage avec des témoignages vivants ont été formels sur ses qualifications. C’est ceux là même qu’il faudrait les poursuivre pour faux et usage de faux pour l’avoir diffuser et tromper les citoyens.

En résumé, l’affaire tourne autour d’une escroquerie de Monsieur ZAIBET, l’appui du ministre de la santé mais pour le moment et jusqu’à preuve du contraire, aucun ne démontre que ce médicament est nocif ou fait mal à celui qui le prend. Alors pourquoi le retirer si les citoyens en veulent ? Laissez les essayer, peut être qu’il est efficace tant qu’il ne fait pas de mal.

Son interdiction démontre une panique peut être pour étouffer une affaire de gros sous où Zaibet et le ministre ne sont en fait que des lampistes

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