Ramadan, le mois sacré des paradoxes !

Marché improvisé à Alger. Photo AFP
Marché improvisé à Alger. Photo AFP

En ce mois de ramadan comme les précédents, en premier, on doit assurer l’opulence des produits; ça personne n’en doute! Les autorités l’ont compris, ont ouvert le souk Algérie et rempli les garnisons, en témoigne le dernier rapport du conseil des ministres, présidé par Fakhamatouhou!

Très sérieusement, le rapport rend état des produits achetés et stockés, afin que les Algériens passent un ramadan de «rêves». On parle de viande, de carotte, de navet et de tomates. On parle de blé et de farine, de sucre et de lait!

2,1 millions de tonnes de blé tendre, qu’ils disent avoir mis de côté, pour la pâtisserie et le pain! 57.099 tonnes de poudre de lait, pour encrer, si besoin est, le surnom de laitière à notre vache grasse d’Algérie. 1.305 tonnes de riz, 2.760 tonnes de pois chiches, 2.738 tonnes de haricots, 645 tonnes de lentilles. On se préparerait à entrer en guerre qu’on ne serait pas mieux nanti!

Les chefs épiciers, Abdelmalek Sellal en premier, se préoccupent aussi des prix, car ils savent que durant ce mois, leur sort se situe entre le ventre et la poche du citoyen. Que leur rédemption se négocie à table, et que leur longévité se mesure au nombre de plats cuisinés! On craint le ventre vide, comme on se méfie d’une escarcelle sèche. Les prix qui s’enflamment, sont synonymes d’esprits qui s’échauffent. On multiplie alors les sorties médiatiques qui se veulent rassurantes, on joue aux contrôleurs de prix honnête, a ceux qui ont la situation bien en main.

Sur le terrain du réel, la valeur sera fixée par les spéculateurs et les sans scrupules! Par les commerçants qui ne se préoccupent que du gain rapide, quitte à imposer leurs lois, aux lois du marché! Car en Algérie, aucune règle économique ne va. Ni celle de l’offre, ni celle de la demande, encore moins de l’autorégulation du marché. Loin de tout contrôle, les commerces à la sauvette, sur les rues et les trottoirs, disputeront la vedette aux étalages de nos marchés! Tous attendent ce mois, qui pour transformer son garage en pâtisserie, qui pour faire de sa boutique une boucherie. L’hygiène; on repassera! Mais ça, les algériens n’y prêtent presque plus oreille. C’est tellement atavique comme réflexe, que ça n’émeut plus personne!

Sans conteste, ce mois est celui de la consommation. Et ça, les chaînes de télé rétrogrades et les publicitaires l’ont très bien compris. Les spots de réclames s’intercalent entre un hadith et un feuilleton, entre un sketch et une émission. La qualité comme l’intelligence en prend un sacré coup. Durant ce mois, nos cerveaux vieillissent d’un an et nos corps grossissent de cinq. On alterne les états; ventre rond et ventre creux, courtoisie et agressivité, Jekyll et mister Hyde!

Ramadan, c’est aussi le mois de la piété retrouvée. Les gens troquent leurs jeans pour un qamis, se laissent envahir par une pilosité faciale, et envahissent les mosquées. Font le plein de dévotion et de prières, chargent leur compte céleste, les points comptant double durant cette période. On éduque son âme, et celle du voisin. Les femmes nous soutiennent dans notre quête de purification, se démaquillent, s’enlaidissent puis se voilent. C’est leur manière de nous protéger!

Paradoxe ou schizophrénie, la courbe de la criminalité, de la violence, comme celle des accidents routiers, est proportionnelle à la fréquentation des mosquées! Les sociologues devraient s’y pencher! Par manque de caféine, sûrement, de nicotine, probablement, ou de sucre (tiens, je l’avais oublié celle-là). Le manque dans le sang, des substances psychotropes et des drogues en tous genres, pourrait expliquer également ce phénomène. En carence durant la journée, nos toxicos qui souvent s’ignorent, en consomment sans modération durant la nuit. Tout y passe, hach, drogue dure, Rivotrine, Diazépams, et neuroleptiques de tous bords. Cela expliquerait l’agressivité et les actes de de grande violence, commis par nos jeunes, durant ce mois.

Manque de calorie oblige, les Algériens comme leur pays, tournent au ralenti. Les heures de travail se rétrécissent comme peau de chagrin, et les huit heures par jour se négocient à la baisse. Le temps est la seule denrée qui est mésestimée durant ce mois! Chez nous, le temps, c’est du sommeil ! Au diable, la production, la productivité, l’économie. Au diable les querelles des hautes sphères, les magouilles, la corruption, le panama papers. Passons un mois de sieste, comme piqué par la mouche tsé-tsé, puis faisons le constat au réveil.

On se réveillera de ce mois de l’indigestion et de la procrastination, d’absence et de l’absentéisme, avec les boursouflures de l’inflation, des désillusions plein la face et une grosse inflammation… intestinale.

Khalil Hebib

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Commentaires (8) | Réagir ?

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tahar foli

greate article thank you for sharing

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massinissa yacoub

le ventre notre deuxième cerveaux

l y a quelques années, les scientifiques ont découvert en nous l’existence d’un deuxième cerveau. Notre ventre contient en effet deux cents millions de neurones qui veillent à notre digestion et échangent des informations avec notre "tête". Les chercheurs commencent à peine à décrypter cette conversation secrète. Ils se sont aperçus par exemple que notre cerveau entérique, celui du ventre, produisait 95 % de la sérotonine, un neurotransmetteur qui participe à la gestion de nos émotions. On savait que ce que l'on ressentait pouvait agir sur notre système digestif. On découvre que l'inverse est vrai aussi : notre deuxième cerveau joue avec nos émotions.

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