Quel sens peut bien avoir le 1er Mai en Algérie ?

L'inflation grève sérieusement les modestes bourses des travailleurs.
L'inflation grève sérieusement les modestes bourses des travailleurs.

Pouvons-nous prétendre que le Premier Mai a toute sa symbolique, son sens, sa place politique, philosophique, sociale en Algérie ?

Répondre par l'affirmative serait porter atteinte à la mémoire de cette si grande date dans l'histoire du combat pour les droits à des conditions décentes pour un travail pouvant garantir, au citoyen, non pas, de manger pour survivre, mais mieux, de bien manger, de travailler, de se promener, de s'habiller, de posséder, de rire, de ne manquer de rien, de se soigner, d'élever ses enfants dans la joie, de leur assurer des études, confort....

La lettre et l'esprit, donc du 1er Mai, sont aussi le droit à la grève, le droit à se constituer librement en syndicat, de dire non, de créer, de proposer. La lettre et l'esprit du Premier Mai, c'est le droit de manifester librement, marche te crier la colère sans avoir à être malmenés par les services de sécurité!

C'est encore cette obligation que devrait observer l'employeur, l'administration, dans l'équité concernant les promotions! Le droit de disposer de tous ses droits, de jouir de toutes ses libertés, entre autres celles de s'exprimer, d'avoir de l'eau chez soi!

Vivons-nous, en 2016, toutes ces conditions, tous les objectifs pour lesquels ce 1er mai fut institutionnalisé ? Comment fêter cette journée dans la joie lorsque des femmes et des hommes sont recrutés dans le cadre du filet social avec un salaire inférieur à 10 000 DA ?

Comment fêter cette journée lorsque les autorités ignorent les travailleurs en ne reconnaissant pas leurs syndicats, en les confinant dans un rôle de mineurs, voire d'inexistants, pour ne traiter qu'avec un seul syndicat, l'UGTA, pour ne pas le nommer, qui a accompagné le pouvoir dans les liquidations d'entreprises et la politique économique, austère, répressive ?

Comment fêter cette journée, lorsque, à la poste, des retraités vous sollicitent pour leurs chèques sur lesquels vous écrirez un montant qui ne tiendra qu'une semaine dans le mois ?

Que mangeront-ils durant les trois autres semaines du mois ? 250 DA le kg de pommes, 600 DA le poisson, 100 DA la salade, 25 DA le sachet de lait, 220 DA la bouteille de gaz, 80 DA les fèves...?

C'est un 1 er mai triste, morose, monotone, en contradiction avec ce qu'il a combattu: l'injustice, la misère, l'inégalité, le déni, le mépris, le dénuement.

Achour Boufetta

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Commentaires (2) | Réagir ?

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khelaf hellal

Les fruits sont inabordables pour les bourses modestes, même les fruits du terroir comme l'orange et la mandarine se sont faits rares et chers cet hiver, on dirait qu'il existe une OPA sur les fruits , une mafia qui les détourne et tire la barre des prix vers le haut pour les rendre hors de portée même pour la classe moyenne, si tant est qu'elle existe encore. Un premier Mai 2016 qui fait du travailleur (se) Algérien (ne) un pigeon ; un laissé-pour-compte qui vient grossir les rangs de contingents de sous-prolétaires, de sous-classes misérables, les "damnés de la terre" du régime post-indépendance. Pendant ce temps ;la forteresse bien gardée de la prédation et de la rapine continue son manège, celui de s'octroyer des salaires mirobolants et des privilèges insolents, continue de compter son argent en devises fortes, investir et fructifier sa fortune mal acquise dans l'immobilier et des commerces de luxe dans les grandes métropoles occidentales. La chute libre du Dinar est le dernier de leur souci puisqu'il est rééquilibré virtuellement par je ne sais quel stratagème, un stratagème que eux seuls connaissent et qui doit servir d'autres intérêts car sur le terrain le Dinar ne pèse pas plus gros que le FrancCFA de la françafrique ou encore le Zloty de la Pologne des années 30. Sans la manne des hydrocarbures ; le Dinar serait devenu une monnaie de singe et la souveraineté nationale ne serait que la feuille de vigne qui cache sa honte.

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Kichi Duoduma

Quel sens a le 1er mai en Algérie ? La question aurait dû être posée de la façon suivante : Quel sens le 1er mai pourrait-il bien avoir en pays de rente ? En Europe, aux USA et dans les quelques autres pays industrialisés, les travailleurs étaient exploités à mort, et je veux dire « à mort » au sens propre (ou plutôt sale) du mot, pendant des siècles. Des dizaines de milliers d’enfants de moins de 15 ans sont morts au boulot, rien que dans les mines de charbon et rien qu’en France au 19ème siècle. Ceux qui ne sont pas morts dans des accidents crevaient à l’âge de 30 ans et en paraissaient 75, abrutis par la faim, le froid, les maladies et l’alcool. Des dizaines d’autres millions ont crevé comme chair à canon dans les conflits armés entre intérêts capitalistes divergents. Tous ces millions de cadavres ont fini par aboutir à un système de production performant, permettant à la plupart de jouir d’un niveau de vie décent. Grâce à la productivité accomplie par tous ces martyrs du capitalisme, l’homme est devenu capable de produire plus qu’il n’a besoin. Aujourd’hui le problème de l’exploitation existe toujours, mais il n’est plus aussi dramatique qu’avant, car le travailleur a acquis un mimimum garanti. Aujourd’hui le problème, pour la première fois dans l’histoire de l’homme, est une question de distribution des richesses, et non plus un problème de production.

Or en Algérie, c’est toujours un problème de production qui se pose. La rente a empêché une bourgeoisie et un prolétariat de se créer, donc pas de production, donc pas de vrais travailleurs productifs. Donc le 1er mai en Algérie est une blague et une insulte aux vrais travailleurs forcés de mourir à la tâche en Occident.