La France prendrait-elle ses distances de Bouteflika ?

Algérie-France : un couple où l'intérêt économique surpasse le reste
Algérie-France : un couple où l'intérêt économique surpasse le reste

La promotion de l’ex-conseillère juive marocaine du président Hollande à la culture et à la communication est un signal fort pour dire à Abdelaziz Bouteflika que ses actions déplaisent à la France.

En faisant la promotion d'Audrey Azoulay au rang de ministre, le président Hollande a pris ses distances du gouvernement d’Abdelaziz Bouteflika et de sa dure attaque contre ses binationaux. La fille du conseiller d’Hassan II et de Mohammed VI, André Azoulay, est le symbole même de la binationalité. Elle vient rejoindre deux autres personnes qui ont la double nationalité franco-marocaine soit le ministre du Travail Myriam El Khomri et celui de l’Education Najat Vallaud-Belkacem. La France signale ainsi sa désapprobation de la déchéance des binationaux créée par l’adoption de la Constitution révisée. Les membres du Parlement algérien ont manqué à leur responsabilité de bons gestionnaires en dilapidant si honteusement cette inestimable ressource humaine que sont les binationaux.

L’adoption de cette nouvelle constitution en pleine crise du pétrole montre que le gouvernement algérien est dysfonctionnel à un niveau critique. Pendant que 499 parlementaires algériens ont adopté le dimanche 7 février cette réforme de la Constitution avec 2 votes contre et 16 abstentions, sur le marché parallèle on devait dépenser près de 200 dinars pour avoir un seul euro. L’adoption de cette nouvelle Constitution a été une journée noire pour l’opposition. La députée franco-algérienne, Chafia Mentalecheta, a critiqué cette nouvelle Constitution parce que justement elle n'inclut pas l'opposition. Le groupe des 19-4 alliés a d’ailleurs dénoncé le climat dans lequel se fait la révision constitutionnelle et fait remarquer l’absence de débat avec le peuple sur ce projet. La secrétaire générale du PT, Louisa Hanoune, qui en est une des membres les plus vocales a affirmé à ce sujet que "la bande mafieuse agit avec l'État tel un cancer." Rappelons que l'ancien premier ministre Ali Benflis, a dénoncé cette adoption comme un coup de force constitutionnel pour régler les problèmes du régime politique en place.

Il y a une très bonne raison pour laquelle le gouvernement ne tenait pas à avoir l’opinion de l’opposition et encore moins celle du peuple sur cette révision. Selon l'organisation de défense des droits de l'Homme Amnesty International, la préservation de la politique de paix et de réconciliation nationale dans la nouvelle Constitution empêche d'établir la vérité sur la guerre civile qui a fait 200 000 morts dans les années 90. La nouvelle constitution viole de plus un principe fondamental en matière des droits de l’Homme en ségréguant entre les nationaux "purs" et ceux qui bénéficient de la double nationalité. Force est de constater que la nouvelle République algérienne est aussi corrompue que l’ancienne. La raison principale de cette situation est que ce sont les mêmes acteurs qui y gardent le pouvoir.

En faisant adopter à toute vapeur une Constitution qui n’a pas été validée par le peuple, Abdelaziz Bouteflika croyait s’être créé des assises légales pour lui permettre de continuer à gérer l’Algérie avec une main de fer. Il a plutôt coupé la branche sur laquelle il se tenait. La disposition barrant aux binationaux l'accès aux hautes fonctions de l'État a fait plus que de le priver d’une main-d’œuvre hautement qualifiée qui aurait pu l’aider a tenir le gouvernail du pays dans le creux de vague ou l’emmène un baril de pétrole au-dessous des 30 $. Elle a aussi montré tout le dédain que le gouvernement avait des compétences françaises. La France a donc décidé de remettre la monnaie de sa pièce à l’Algérie et a montré qu’elle pouvait aussi aller voir ailleurs.

Le renouveau qu’annonce le processus de réformes politiques est donc un enfoncement dans la démagogie et le népotisme que le gouvernement vend pour de la démocratie a son peuple visiblement trop crédule. Il faut se demander si le Kabyle et président de l’Anavad, Ferhat Mehenni, plaisantait vraiment quand il a dit que les dirigeants de l’Agérie n’avaient jamais eu l’amour du pays. Il est visible en les voyant s’attacher au gouvernail avec tout ce qu’ils ont en repoussant du pied les jeunes qui tentent désespérément de redresser le cap qu’ils n’aiment que le pouvoir.

Michel Gourd

Plus d'articles de : Algérie-France

Commentaires (6) | Réagir ?