Rejet de l’article 51 du projet de constitution: tollé approprié ou tapage démesuré ?

La nouvelle mouture de constitution exclut une partie d es Algériens des hautes responsabilités.
La nouvelle mouture de constitution exclut une partie d es Algériens des hautes responsabilités.

Cette contribution est destinée à l’algérien binational exemplaire, celui qui ne perçoit pas la moindre note qui sort de la gamme do-ré-mi-fa-sol-la-si-do habituelle harmonieuse, quoique souvent synonyme d’indolence, comme une cacophonie nuisible à sa musique, mais comme un autre son de cloche destiné à mieux accorder ses propres violons. Que celui ou celle qui saisit la contradiction à «l’unanimisme» ambiant comme un signe de non-patriotisme, à l’image des discours éculés que le pouvoir nous sert depuis 1962, s’avise d’en poursuivre la lecture !

Jamais article de constitution n’a fait verser autant d’encre que celui qui élimine les Algériens binationaux de l’aspiration aux hautes fonctions de l’état. À croire qu’à lui seul cet article empêche l’Algérie d’accéder au monde moderne, celui dont dépend l’accession, corps et âme, du citoyen à un niveau universel, ce rang fantasmagorique qui fut l’objet de bien des illusions ruminées par moult générations d’exilés. Le tollé soulevé par cet article, de Paris à Washington, prouve s’il le fallait que l’Algérien reste profondément, obstinément, hardiment attaché à ses gènes d’origines, comme si les pays d’accueil ne représentaient rien d’autre que des salles d’attente pour des jours meilleurs, ces aurores de fanfares rêvées en secret, ces instants magiques du revenir enfin d’ailleurs.

Et que dire de l’article 2 qui fait de la religion une affaire d’tEat ? Une telle loi ne constitue-t-elle pas un boulet de canon accroché aux chevilles de tous les citoyens, une inertie de dimension céleste qui le fige dans un cadre de vie intellectuelle misérable et lui apprend à ne rêver que de mort pour l’inhiber de toute envie de priser la vie et ses bienfaits? Et que dire de ce code de l’infamie qui relègue la femme, le seul passé et l’unique avenir de l’homme, au statut de sous-citoyenne, condamnée au supplice d’une chape de sous-tutelle masculine, du premier cri au dernier soupir de son existence ? Et que dire de l’article 3bis, celui qui relègue les Amazighs (l’écrasante majorité du peuple) au rang de citoyens de second lignage (comme au temps des roumis) au profit de la descendance de 18000 cavaliers venus nous berner par des berceuses et des appels du vent de supercherie de masse en provenance d’Arabie, pour mieux nous piller ?

Il y a tant à redire de cette nouvelle constitution, laquelle vient d’être avalisée par le conseil constitutionnel. Un conseil constitutionnel aux ordres d’un pouvoir illégitime a-t-il vraiment le choix que de se soumettre aux ordres et de jouer son rôle de simple chambre d’enregistrement ?

Que rajouter d’autre à charge de tout ce brouillamini qui se déroule en haut lieu et dont le seul but est de protéger au mieux la petite famille révolutionnaire et ses habituels commis ? Cette façon de procéder ne peut que dissuader les binationaux les plus entêtés, sauf bien évidemment ceux qui à un moment ou un autre de leurs cursus ont fricoté avec, ou appartenu à, cette famille.

Au vu de ce petit rappel de l’état des lieux et, à contre-courant du tollé quasi général soulevé par l’article 51, voilà, pêle-mêle, mes conditions pour envisager quelconque retour : Moi je rentrerais en Algérie quand hommes femmes et enfants ne tourneront plus le dos à la mer !

Moi je rentrerais en Algérie quand la "3izza oua el karama", la liberté, la justice, la démocratie ne seront plus des slogans creux, mais des refrains consacrés entre citoyens, jeunes ou vieux!

Moi je rentrerais en Algérie quand l’imam de la mosquée de mon faubourg, situé à 100m de mon p’tit appart, sera à l’écoute de mes problèmes d’insomnie en acceptant sans me traiter de "3adou Allah"» de diminuer les décibels nocturnes des appels à la prière !

Moi je rentrerais en Algérie quand me promener, seul ou en famille, de Bab-el-oued à la rue Tanger, matin midi ou soir, ne m’exposera plus à quelconque insanité ou danger !

Moi je rentrerais en Algérie quand les mots courtoisie, politesse, amabilité, civilité seront déclarés synonymes formels de cette paix tombée du ciel tout en la dissociant des prescriptions qui autorisent massacres, tueries et carnages pour des élus autoproclamés !

Moi je rentrerais en Algérie quand les barreaux fixés aux fenêtres et balcons, et qui donnent à nos immeubles des aspects hideux de prisons sinistres, seront tous arrachés !

Moi je rentrerais en Algérie quand la propreté des rues et des immeubles deviendront la priorité de tous et prenait le pas sur la frénésie ambiante de la course aux rak3ates et autres tawarih collectifs!

Moi je rentrerais en Algérie quand ceux qui la gouvernent arrêteront de sceller de force le destin du citoyen algérien à celui du Soudanais, du Saoudien et de l’Afghan !

Moi je rentrerais en Algérie quand tout le monde comprendra que si dame nature n’a pas prévu de couvrir les fleurs, c’est pour ne pas laisser périr ses jolies créatures pour le temps qui leur est imparti, et qu’envelopper la femme dans ces bâches disgracieuses que sont le voile intégral et la burqa est un comportement contre-nature et offensant à l’égard des codes de programmation de cette même dame nature.

Moi je rentrerais en Algérie quand on invitera Enrico Macias, à titre de symbole d’apaisement fort, pour le convier à ouvrir La porte avec «les clés retrouvées». Ces clés de la maison qui l’a vu naître à Constantine et que sa maman avait gardées pour ne pas laisser mourir l’espoir de revoir un jour sa terre natale !

Moi je rentrerais en Algérie quand l’objectif de construire et de répartir l’emportera sur celui de réclamer une part de gâteau rétribuée pour services rendus par ceux qui s’estiment propriétaires du pays ! Une telle part ne m’attire pas, je la laisse au clan Bouteflika !

Moi je rentrerais en Algérie quand le mot éducation ne sera plus synonyme de propagande idéologique inféconde, mais celui d’une dynamique de savoir universel, seul à même de «faire exploser l’économie» et d’initier l’émergence d’un sentiment de citoyenneté puissant et authentique.

En résumé, moi je rentrerais en Algérie quand l’Algérie deviendra un pays normal dirigé par des hommes normaux qui auront à cœur de bâtir un socle solide sur lequel s’appuieront les générations futures pour faire de l’algérien un citoyen éduqué, en phase avec son temps, au lieu de perpétuer des constantes de la nation factices et anesthésiques.

La diaspora serait bien inspirée de focaliser son énergie pour une lutte collective contre ce pouvoir de petits chenapans en en dénonçant l’illégitimité qui se perpétue depuis 1962. Quant à cette constitution illégitime, le moindre souffle de légitimité en haut lieu, avec enthousiasme la balaiera. Ce jour-là, l’article 51 on en reparlera !

Par conséquent, je trouve qu’il est pour le moins surprenant d’objecter des articles de loi qui empêchent toute participation à des postes supérieurs alors que l’on ne se préoccupe pas des textes réducteurs qui empoisonnent le quotidien du citoyen lambda, écrasé par une chape de Hogra et d’incurie, qui ne lui offre guère d’issue de sortie, contrairement à nous qui avons fui. Une élite pour contrecarrer ce pouvoir de chenapans qui a confisqué le pays, oui, mais un élitisme sournois pour lui prêter main forte, non !

Il n’est pas trop difficile de comprendre que les enfants du pouvoir, ceux qui ont été écartés par le clan aux commandes rêvent d’un retour en fanfare pour réalimenter des comptes en banque qui doivent s’assécher à vitesse grand V, ou que les islamistes rêvent d’un retour à un mysticisme intégral une fois que le khalifa promis par le FIS et autres GIA est réhabilité, mais que des enfants d’universalistes qui ont quitté le pays pour les sauver du crétinisme érigé en mode de gouvernance, leurs emboitent le pas, cela dépasse tout degré de discernement.

Il est peut-être temps que les exilés algériens apprennent à se vouer corps et âme à leurs pays d’accueil en faisant en sorte que leurs enfants deviennent de bons citoyens du pays qui leur a permis de s’épanouir : être un bon américain n’est pas incompatible avec le fait d’être un bon Algérien, bien au contraire ! Être un bon Français est possible aussi, bien que le roi Hassan 2, dans une de ses dernières interviews accordée à la presse française avait conseillé à la France, en plein débat sur le droit du sol, de ne pas accorder la nationalité française aux Marocains, car disait-il, ils feraient de mauvais français. Comme si la génétique à elle seule déterminait la possibilité d’intégration ou de non intégration à une société différente de l’originale !? Mais bon, on a bien compris que cela fait partie d’une stratégie de propagande se donne comme objectif d’ériger des frontières infranchissables entres les élus des cieux et les damnés de la terre !

Le roi avait tort de raisonner ainsi, car seule une bonne éducation est à même de transformer un être humain en bon citoyen quelque-soit le pays où les vagues de la vie le déposent ou celui dans lequel la misère chronique, souvent intellectuelle, a déposé ses aïeuls. De ce fait, comment peut-on prétendre pouvoir donner plus et mieux à son pays d’origine si on n’a pas été reconnaissant envers son pays nourricier? Sacré dilemme, lequel rappelle bizarrement celui d’un enfant adopté : de sa famille adoptive ou génétique à laquelle doit-il se reconnaitre en premier? La question ne peut avoir de réponse unique et générale car chaque cas est un cas particulier! Mais dans le cas de l’article 51, concocté par un pouvoir de garnements auxquels il est impossible de s’identifier, sans la moindre équivoque, Je puis affirmer qu’en eux je ne reconnais nul lien de parenté. Par conséquent je les renie, je les ignore, je les néglige comme ils me renient et me négligent en tant que citoyen lambda depuis 1962 ! Et s’il fallait se rendre auprès d’institutions religieuses pour consommer le divorce en prononçant 3 fois talagt talagt talagt à l’endroit du clan Ouyahia-Bouteflika, je le ferais bien volontiers !

De toute évidence, au-delà de ces envolées de renoncement, nous savons bien que les articles 51 et 73 sous-tendent une volonté délibérée de barrer la route du pouvoir aux binationaux des clans opposés afin de leur enlever tout espoir de réclamer leur part d’un gâteau qu’ils se refusent à partager. De ce fait, peut-on se sentir vraiment concerné par ces coups-bas entre membres de la petite famiglia ?

En conclusion, mes chers compatriotes exilés de gré ou de force, participez à la construction de votre pays d’accueil, dans une dynamique universelle qui devient de plus en plus nécessaire pour sauver la planète Terre ! Quant à l’Algérie, votre pays génétique, le pouvoir militaro-FLiN-tox qui l’a confisqué n’a que faire de compétences qui dévoileraient des insuffisances chroniques dissimulées par une agitation incessante et toutes sortes de niaiseries infantiles. Un jour qui sait, cette maffia disparaitra. Ce jour là, on en reparlera. Sachant que je ne serais certainement plus là (*), je confierais à ma progéniture ces éléments d’analyse pour les mettre en garde de ne pas s’aventurer tête baissée pour répondre à l’appel de sirènes factices. Car tant que ces petits maffieux sont aux commandes, il faudra faire preuve de méfiance pour ne pas se laisser entrainer par quelconque accointance. Il faut se rendre à l’évidence que ces gens là ne fonctionnent pas avec des codes d’honneur, mais avec des codes d’horreur. Une horreur qui a débuté à l’été 1962 et dont les artisans sont encore aux commandes 54 années plus tard. Pensez-y, et ne l’oubliez jamais !

Kacem Madani

(*) Ce maudit temps qui passe a inspiré Jiji, le poète discret de Paris :

Vieillir en regardant la charpente du monde

Vieillir en regardant la charpente du monde
L'éclaircie qui nait chaque matin
Dans le rayon éclairant
Et le cerveau qui se veut pareil.
Et la courbure de nos os
Que veut le temps.
Nos souvenirs courbés
Cherchant une mémoire
Chez les restants.
L'eau vive est du passé
La photo irréelle
Cheveux blancs en nature verte
Inconsolables d'avoir cherché
L'inessentiel.

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