"Notre pays est entré dans une crise sévère"

La rente pétrolière ; le pari hasardeux du clan Bouteflika.
La rente pétrolière ; le pari hasardeux du clan Bouteflika.

Le Cercle d’action et de réflexion Care réagit à l’annonce des mesures de la loi de finances complémentaire 2015.

Le gouvernement vient de rendre publiques, à la suite du Conseil des ministres du mercredi 22 juillet 2015, les mesures retenues dans la cadre de la loi des finances complémentaire (LFC) pour l’année 2015. Cette loi était largement attendue par l’ensemble des acteurs économiques et sociaux, comme le moment d’un sursaut énergique et salutaire face à la grave dégradation de la situation économique et financière de notre pays, résultat de l’érosion brutale des prix sur le marché international des hydrocarbures, depuis maintenant plus d’une année. A l’évidence, notre pays n’a pas su anticiper une évolution de la conjoncture mondiale sur le principal marché de ses exportations. Le Premier ministre vient, lui-même, de reconnaitre que la conjoncture pétrolière mondiale ne va pas s’améliorer et table sur une moyenne des prix du baril oscillant autour de 60 $US, ce que de nombreux analystes considèrent déjà comme une perspective optimiste. La Banque d’Algérie, de son côté, vient de signaler, dans sa dernière note de conjoncture, que les quantités d’hydrocarbures exportées ont baissé de 9% au cours du premier trimestre 2015, confirmant ainsi une tendance lourde observée tout au long des cinq dernières années.

Au plan des comptes extérieurs, les informations officielles aujourd’hui disponibles laissent présager, pour l’ensemble de l’année 2015, un déficit de la balance commerciale à hauteur de près de 15 Mds de $US et un solde négatif prévisionnel de la balance des paiements à hauteur de près de 30 Mds de $US.

Enfin, le déficit budgétaire, quant à lui, dépasserait les 1900 Mds de DA à fin 2015, ce qui va obérer d’autant les ressources du Fonds de régulation des recettes. Ce dernier fonctionne, depuis longtemps déjà, plutôt comme un «bas de laine» que comme un outil de régulation de la gestion budgétaire ; il sera totalement épuisé au cours de l’année 2017, si l’Etat maintient, comme il le fait, le rythme actuel de croissance de ses dépenses. Le gouvernement lui-même, auquel il faut reconnaitre son souci de la transparence, ne cache pas sa profonde préoccupation et a opté courageusement pour une publication régulière de statistiques probantes qui laissent apparaître une dégradation graduelle des comptes économiques de la nation, au cours des douze derniers mois.

A ce sujet, le constat partagé par l’ensemble des analystes sérieux, c’est que notre pays est entré maintenant dans une crise sévère dont tout laisse à penser qu’elle est porteuse de menaces potentiellement graves, très comparables à celles que nous avions vécues à la fin des années 1980 et qui s’était soldée en bout de course par un ajustement structurel imposé par le FMI et dont les rigueurs et le caractère récessif sont encore dans les mémoires.

C’est en considération de ces menaces de plus en plus visibles que notre association, CARE, n’a pas cessé d’alerter sur les fragilités du modèle d’organisation de l’économie de notre pays et qu’elle avait appelé solennellement à la prise de mesures salvatrices et courageuses, dont les prémisses pouvaient être annoncées à la faveur de la dernière loi des finances rectificative. Force est de croire que nous n’avons pas été entendus. A CARE, nous estimons en effet que si les dispositions ainsi adoptées, prises une à une, sont positives et recueillent notre assentiment, elles ne sont pas, globalement, à la hauteur des dangers qui guettent notre économie au cours des trois prochaines années. Notre sentiment est que le gouvernement agit encore comme s’il ne s’agissait que de gérer des difficultés économiques passagères, là où des réformes plus structurelles sont rendues nécessaires pour commencer à jeter sérieusement les bases d’une économie qui doit plus que jamais se préparer au défi de l’après-pétrole. Nous partageons totalement son point de vue quant au refus des politiques d’austérité ; mais, malheureusement, nous ne pouvons que constater que les éléments de sa politique actuelle ne font que retarder l’échéance et mènent inéluctablement vers cette impasse qu’il dit vouloir éviter.

Les données chiffrées disponibles montrent clairement que la tendance est à la réduction de l’investissement public par contraction ou étalement des dépenses du budget d’équipement. Elles montrent également une croissance significative de près de 20% des dépenses de fonctionnement pour les premiers mois de cette année 2015. Ces indications sont le signe patent d’une politique économique dont le moteur reste toujours la dépense publique, alors même que les ressources portant cette dépense sont en train de s’amenuiser dangereusement. Or, ce dont notre économie a le besoin le plus urgent, c’est une politique économique plus volontariste qui fasse des entreprises, privées et publiques, le moteur d’une croissance forte et durable, seule en mesure de créer massivement de la richesse et des emplois et de répondre aux immenses besoins sociaux de la population algérienne. Une telle politique suppose des réformes immédiates du climat des affaires, une simplification considérable des procédures à l’investissement, une réorientation sensible de notre politique commerciale externe, de même qu’un ajustement sérieux de la valeur du dinar, qui rétablisse la préférence économique effective au bénéfice des producteurs et des exportateurs algériens.

Les restrictions en vigueur en direction des investisseurs étrangers, hors quelques secteurs sensibles, pénalisent notre propre économie, au même titre que cette ségrégation incompréhensible qui vient d’être introduite entre production de biens et production de services. Pour résumer, il est temps que l’administration économique nationale se mette réellement au service de l’entreprise, à l’inverse exact de ce que nous observons aujourd’hui sur le terrain. Notre pays a perdu un temps précieux pour n’avoir pas su amorcer le virage de la diversification économique au moment où il disposait de ressources abondantes. Il se voit contraint, maintenant, de devoir le faire dans un environnement interne et externe beaucoup plus hostile et surtout plus volatil, si l’on prend en compte les impacts prévisibles du nouvel accord international qui vient d’être conclu sur le nucléaire iranien.

Par-dessus tout, ce que l’opinion publique nationale doit savoir, c’est que le processus de dégradation actuelle de nos comptes économiques, qui nous conduit de proche en proche à la récession et au retour du FMI, est loin d’être fatal. Dans la conjoncture économique difficile que nous traversons, c’est là notre principal motif d’espoir : pour éviter l’austérité vers laquelle nous mène le dogmatisme actuel, il nous faut déjà mettre fin, rapidement, au gaspillage de nos ressources rares. Notre pays dispose des moyens de rompre avec cette dépendance excessive aux revenus du pétrole, de renouer avec une croissance forte et durable et avec la création massive d’emplois économiques, pour peu que nos dirigeants trouvent le courage nécessaire pour engager les réformes consensuelles que dicte la conjoncture difficile que nous traversons. Il dispose encore, pour une période très courte, des ressources nécessaires pour amorcer le virage salvateur du redressement. C’est une opportunité historique qui ne doit pas être gâchée, sous peine de voir la crise actuelle atteindre son seuil irréversible et finir par embraser l’ensemble de la société algérienne. Dogmatisme, populisme et paternalisme doivent maintenant céder la place à plus de réalisme, plus d’efficacité et, par-dessus tout, plus d’ambitions pour notre Algérie.

Le cercle CARE

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Commentaires (5) | Réagir ?

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oziris dzeus

le pays est en crise non pas, quand il n'y a pas plus de pétrodollars dans les caisses, mais quand les têtes sont pleines de mélasse, les âmes corrompus, les cœurs fragiles, et qu'il n' y a plus rien dans les tripes. le pays est en crise a cause de tous ces faux qui soutiennent un fou. le pays est crise quand il n' y a plus que des fous et des faux. le pays est en crise grave depuis 1962 quand le glorieux FLN de Benmehidi est passé entre les mains d'une bande de malades sous le contrôle médicale de FaFa. la preuve à été donnée par son chef qui joue au médecin (encore un faux) pour donner son aval à la poursuite de cette gabegie française en Algérie.

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oziris dzeus

Depuis que des démocrates soutiennent un apprenti dictateur putschiste récidiviste, et que des socialistes et des trotskistes soutiennent un libéral anarchique, et que des islamistes soutiennent un libertin avéré. oui le pays est crise depuis que des maquisards soutiennent un embusqué, que des gens, (semblants) sensés, soutiennent (un malade) du Koursi. le pays est crise depuis que tous ces fous soutiennent ce faux.

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