Fraudes au Bac : l’équité scolaire menacée

Des fraudes massives ont entaché le baccalauréat cette année.
Des fraudes massives ont entaché le baccalauréat cette année.

Nous avons assisté ces derniers jours à des fraudes massives lors des examens du Baccalauréat 2015, en utilisant des moyens de la technologie moderne, à savoir les Smartphones et la 3G.

Le déroulement des faits et les mesures prises à la hâte par la tutelle, montrent que personne ne les avait prévues ou, du moins ne s’attendait à ce que ces évènements prennent cette ampleur pour devenir un problème de sécurité nationale qui menace les fondements de l’Etat algérien en discréditant un examen de cette envergure.

Pourtant, cela était prévisible. Nous savons tous que nos enfants maitrisent parfaitement ces outils et pas seulement, hélas, pour en faire bon usage, puisqu’ils passent énormément de temps devant leurs ordinateurs et possèdent tous des portables dernière génération. D’autre part, la fraude dans les examens, qui se font durant l’année scolaire, est devenue une monnaie courante. Nos élèves, pas tous bien sûr et Dieu merci, mais une grande proportion, adoptent un slogan: "Men nakala intakala oua men iâtamada ala nafsihi bakiya fi kismihi", c'est-à-dire : celui qui copie passe et celui qui compte sur soi reste dans sa classe. Et Malheureusement ce ne sont pas seulement les élèves qui ont des difficultés scolaires qui fraudent ou tentent de frauder. Ce phénomène touche aussi les bons élèves soumis parfois à la pression de parents exigeants, convaincus que leurs bambins ne peuvent réussir que s’ils sont parmi les premiers de leurs classes ou peut être, ils doivent faire mieux que les enfants du cousin, de la cousine, du voisin, du copain... Sans oublier de citer le précédent grave des candidats lettres et philosophie en 2013, qui s’étaient adonnés à la triche, allant jusqu’à frapper et menacer les surveillants. Ils avaient défié tout le monde ! On aurait dû anticiper pour mieux se préparer à ce fléau ravageur qui prend une ampleur inquiétante.

Mais au fait, pourquoi la fraude s’est-elle généralisée, je dirais même, banalisée dans le milieu scolaire ? A qui incombe la responsabilité ? Certains parents assument la plus grande part de responsabilité. Ils ne jouent pas leur rôle dans l’éducation de leurs enfants, allant parfois jusqu’à leur donner le mauvais exemple. D’ailleurs il y en a même des complices. Je pense à ceux qui viennent demander la charité aux enseignants afin que leurs enfants puissent passer aux classes supérieures. Et aussi à ceux qui les encouragent à copier. Un élève qui se permet d’acheter une oreillette satellitaire qui coûte la bagatelle de 50 000 dinars, en dit long ! D’autre part, l’école ne joue pas son rôle convenablement dans l’éradication de la fraude. Effectivement, certains enseignants sont laxistes pendant la surveillance des examens et ne sanctionnent pas les élèves qui osent tricher. Les problèmes immenses dans lesquels baigne l’école depuis longtemps n’ont rendu la tâche difficile à l’enseignant consciencieux. Petit à petit, l’éducateur a perdu son autorité dans sa classe grâce aux campagnes de dénigrements menées contre lui par la tutelle et par certains torchons. A chaque problème qui se pose, on lui fait porter le chapeau en l’accusant de toutes les bassesses et de tous les maux. Que peut faire un enseignant qui a peur d’entrer dans sa classe ? Peut-il vraiment enseigner ou éduquer ? Ceci dit, je ne prends pas la défense de l’enseignant qui, je pense, doit parfaire sa formation et rendre compte de son travail. Enfin et surtout, les candidats savent que le Bac sans une bonne moyenne n’a aucun sens et mieux vaut, peut être, ne pas l’avoir. Car il ne leur permet pas de s’inscrire dans une filière de leur choix et qui correspond à leur profil. Que pensez-vous d’un scientifique qui se voit contraint à faire des études en littérature arabe ?

Rendre à l’école sa place ne peut se faire sans la restauration d’un climat de confiance entre les trois partenaires : la société, la tutelle et l’enseignant. Ce dernier doit être valorisé pour retrouver son autorité et sa place dans sa classe : condition sine qua non pour mener à bien sa mission. Comme il est de notre devoir de tirer les enseignements qui s’imposent des péripéties du BAC 2015 pour mieux se préparer aux années à venir. Equiper les établissements scolaires de brouilleurs devient une nécessité. Il faut aussi durcir les mesures coercitives contre les tricheurs et veiller à leur application rigoureuse dans tous les examens, quelle que soit leur nature. Ainsi, on pourra dissuader les tricheurs et réapproprier à l’élève son droit à l’équité.

Lotfi Z.

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Commentaires (3) | Réagir ?

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albert smail

La surveillance des épreuves de BAC n'est plus une tache pédagogique comme autrefois ! l'indiscipline et la violence ont pris des proportions telles que l'enseignant ne peut plus tenir des "élèves" adultes qui sèment la terreur et le trouble en salle d'examen.

Quelques enseignants ont du porter plainte parce qu'ils ont été menacés.

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klouzazna klouzazna

Ce type de comportements n'est qu'un début... les portables d'aujourd'hui et leurs différents kits (oreilletes, écouteurs, caméra scanner, transfert de fichier par wifi ou bluetooth, ... etc ) ont compliqué considérablement la bonne organisation et la bonne surveillance de ce type d'examens dits nationaux ou cllectifs !!! sans omettre bien sur le manque de scrupules et de conscience professionnelle de "certains" surveillants... même l'utilisation des brouilleurs de signaux ne peut régler qu'en partie ce problème... d'où peut être la nécéssite d'une installation de détecteurs de métaux aux entrées des classes !!! mais dans ce cas... il suffirait d'organiser ce type d'examens dans des casernes militaires ou des prisons... ce serait plus pratique !! le problème est sérieux

et nécéssite une réflexion de fond... peut être... aller jusqu'à supprimer ce BAC national (hérité du colonialisme) et le remplacer par autre chose !!!

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