La presse, l'opposition et la missive fantomatique

Ali Haddad et Saïd Bouteflika.
Ali Haddad et Saïd Bouteflika.

Aberrant de dire ou de faire croire qu’un homme aussi malade menace. Encore absurde de prêter de la terreur à un agonisant. Sur le lit de la mort, les instants sont terribles et ne procurent aucune énergie ni force.

L’heure est grave car la menace provient d’un cercle hors-la loi ayant pris en otage une institution normalement républicaine. Mais cela n’est qu’une conséquence logique de la perversion de la vocation républicaine de l‘institution présidentielle, entamée officiellement depuis le viol constitutionnel de 2008. Voire bien avant. Autrement dit, depuis que les galonnés choisissent et intronisent les chefs d’Etat dans un cabinet noir. On est absolument dans la configuration d'un Etat de non-droit. 

Maintenant que le mal est fait, le redressement paraît non faisable. Car le clan usurpateur panique pour les faits dévastateurs qu’il ne cesse de commettre. Ce clan avantage alors la fuite en avant pour gagner du temps et trouver aussi les moyens pour se protéger. Nul n’ignore leurs méfaits. Ils sont même guettés au virage. Et les retournements de veste sont légion dans une république bananière.

Normal alors que le cercle hors-la-loi agisse par missive fantomatique. Il use ainsi le subterfuge institutionnel et constitutionnel pour fustiger toute voix discordante ou opposée. Parfois arrogant, parfois méprisant et tout le temps menaçant, il déverse son venin sur tout ce qui bouge en dehors de son entourage. Au fait, le régime autocratique a-t-il cessé un jour de menacer pour faire tout un tapage autour d’un message spectral ? Depuis qu’il est régime de non-gouvernance, il se déploie intensivement pour terrifier, tantôt par les militants berbéristes, tantôt par "hizb frança", tantôt par l’ogre islamiste et souvent par la menace étrangère. Dire que la missive fantomatique du 19 mars est unique dans son genre pour son contenu agressif, c’est comme ignorer la nature violente du régime en place. N’a-t-on pas assisté à l’assassinat de feu Boudiaf en direct sur l’écran de la télévision ? Encore, 126 jeunes Kabyles n'ont-ils pas été tués lors du printemps noir de 2001 ? Et si on remontait plus dans le temps, les violences commises par ce régime deviendraient innombrables. Que cesse alors l’aberration, le régime est de tout le temps menaçant, car, non démocratique qu’il était toujours, il ne peut pas avoir une nature en dehors de la violence, de l’arrogance, du mépris, et surtout de la "hogra".

Le débat alors, si on veut qu’il soit sérieux, doit dépasser ce genre de missives fantomatiques en pleurnichant sur leurs contenus agressifs. Car, en considérant ces écrits qu’on prétend présidentiels, c’est entrer dans le jeu du régime et donner du crédit à leur version sur la puissance du moribond. Il y a lieu donc d’ignorer ces messages répétitifs et focaliser le vrai débat sur la nature usurpatrice de ce régime et poser le préalable nodal qui est son départ pur et simple. Sinon point d’issue !

Mais présentement, l’on est loin d’une action opposante crédible. Car le crédit a des exigences. Comment donner du crédit par exemple à des opposants qui siègent encore dans un parlement inerte et soumis et qui a fait passer la loi sur le gaz de schiste ? Même s’ils n’ont pas voté pour cette loi, ils gagneront plus de confiance en quittant cette représentation honteuse. Aussi, il y a des opposants qui ont cautionné la perversion de l’institution présidentielle en participant au scrutin d’avril 2014. Ils savaient, à moins qu’ils fussent inconscients ou vendus, que l’élection allait être viciée par la seule participation d'un candidat-président gravement malade. Ces opposants, ne sont-ils responsables de cette non-gouvernance par missives spectrales qui est le fruit direct d’avril 2014 ? Ils savaient que le candidat était malade et par conséquent, une fois le postulant intronisé, ils avaient la certitude que toutes les prérogatives présidentielles seraient usurpées par le cercle hors-la-loi.

Enfin, en plus du problème de la nature menaçante, arrogante et méprisante du régime autocrate -parce qu’il l’est déjà-, l’essentiel de la difficulté réside dans les missives fantomatiques elles-mêmes, les messages spectraux et parfois le cinéma des images qui renseignent sur une délégation certaine du pouvoir présidentiel, conduisant directement vers une situation de non droit. La missive n’est en fin de compte que la façade qui maquille un exercice hors-la-loi du pouvoir. Des lors, le pouvoir de l’ombre est renforcé. A quoi bon de le reconnaître ?

Zoubir Zerarga

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Commentaires (11) | Réagir ?

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gtu gtu

merci pour les informations

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albert smail

Vous dites " Aberrant de dire ou de faire croire qu’un homme aussi malade menace. "

bien, c'est vrai, on vous l'accorde.

Et l'aberration qui veut faire passer certains journaux pour des journaux libres et indépendants pourquoi vous n'en parlez pas?

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