Vive Voltaire ! Lettre à un ami qui a peur de l’islamisme

François Hollande avec le roi Abdellah d'Arabie saoudite, un des pays les plus intégristes du monde.
François Hollande avec le roi Abdellah d'Arabie saoudite, un des pays les plus intégristes du monde.

"Je préfère mourir pour mes idées que de lassitude ou de vieillesse dans mon lit." Lounès Matoub

Par Karim Akouche

Prends ta plume. Laisse-la courir. Griffonne ce qui te plaît. Écris ce qui te passe par la tête. Ne te retiens pas. Je sais que tu as peur. Mais aujourd’hui tu n’as pas le droit. Se taire, c’est plier. C’est ce que veulent nos ennemis. La liberté est orpheline. Elle a perdu ses meilleurs enfants. Il paraît que les barbares ont vengé Mahomet. Hemingway s’est trompé : Paris n’est plus une fête. Les hommes ont la mine rassise. Le fascisme revient. Son drapeau noir flotte. Il phagocyte le monde. Les signes ne trompent pas. As-tu vu la vidéo de l’enfant qui assassine de sang-froid les deux Russes ? Au Nigeria, Boko Haram exécute d’un coup 2000 innocents.

Les colombes se sont tues. Le ciel de l’Occident est gris. Les Lumières sont éteintes. Le "cosmopolitiquement" correct se porte bien. La laïcité est moribonde. Tu dois te battre. On a besoin de toi. Ta plume est un phare. Éclaire les esprits. Mets-toi au travail. Défends tes idées. Dis ce que tu as sur le cœur. L’écriture soulage. C’est une catharsis. Tu as besoin de ça pour avancer. Tes lecteurs aussi. Ne les abandonne pas. Tu les as habitués à la dérision. Ils aiment quand tu les titilles. Ils aiment ta franchise. Tes envolées brisent la monotonie de leur vie.

Si tu n’es pas inspiré, je peux te refiler quelques vannes. J’en ai une sur la laïcité. Sur l’islam. N’aie pas peur. Je ne te demande pas de dessiner le visage de Mahomet. Je ne veux pas t’envoyer au casse-pipe. Dessine-moi un islamiste en train de prier sur la place publique, à côté d’un laïque qui dit : La religion est comme le sexe, on ne le montre pas en public, ça doit rester dans le privé. Elle est bonne, ma blague, non ? Tu la trouves vulgaire ? Mais c’est ça la satire. C’est avant tout l’art de la provocation. Elle vient du mot satura qui veut dire pot-pourri. Lucilius, Catulle, Aristophane, Apulée, Boccace, Rabelais, Swift l’ont pratiquée bien longtemps avant Cavanna, Choron, Cabu, Wolinski, Tignous, Charb, Dilem…

Ne fais pas l’offensé. Redresse la tête. Viens avec moi. On ira jusqu’au bout de l’absurde. Tes pas ne sont pas sûrs. On dirait que tu marches sur des œufs. Tu as les fesses serrées. Décontracte-toi. Sois digne. Sois fort. Sois fou. L’art n’est art que quand il est démesure. Regarde la vérité en face. La nouvelle devise de l’Occident, c’est la capitulation. Ne compte par sur tes frères. Ils n’ont rien compris à la liberté d’expression. Je les ai vus à la télé. Ils sont morts de trouille. Ils couinent comme des chiots. Ils ont flouté les caricatures de Mahomet. Ils disent qu’ils ne veulent pas offenser les musulmans. Mais ils mentent. Ils sont hypocrites. Ils ont peur des intégristes. Ils ont peur de perdre leur confort. Voilà la vérité. Voilà leur lâcheté. Ils souffrent du syndrome de Stockholm. Ils dédouanent leurs bourreaux. Ils se culpabilisent. Ils détestent leur histoire. Ils crachent sur leurs héros. Ils veulent être les autres, mais refusent d’être eux-mêmes. Ils excellent dans la haine de soi. Ils disent des choses convenues. Ça passe bien dans les médias. On les qualifie d’humanistes. Ce sont de faux Gandhi. Ils pratiquent la servitude volontaire.

John Kerry avec Hamad Benkhalifa Al Thani, roi du Qatar, autre pourvoyeur de l'islamisme radical

John Kerry avec Hamad Benkhalifa Al Thani, roi du Qatar, autre pourvoyeur de l'islamisme radical.

Je t’en prie, prends ta plume, dévoile-nous la vérité. Parle-nous du dédoublement de la personnalité de Mahomet, Mahomet de La Mecque et Mahomet de Médine, Mahomet l’homme de paix et Mahomet chef de guerre. Parle-nous de l’ambivalence de l’islam qui zigzague entre le religieux et le politique, qui veut la foi et les lois. Parle-nous d’Ibn Taymiyya, du wahhabisme, de l’Arabie saoudite et du Qatar, deux pays chouchous des États-Unis et de la France, qui financent le terrorisme. Parle-nous de Hassan al-Banna, de Sayyid Qotb et de Rachid Rida qui théorisa, en 1923, l’État Islamique dans son livre Le Califat ou l’Imamat suprême. Parle-nous de tout. Parle-nous de ce que tu veux et de ce que tu ne veux pas. Il n’y a pas de tabou avec moi. J’aime les sujets qui fâchent. Les gens ont besoin de savoir comment poussent les germes de la violence, d’où vient la charia, d’où surgit le djihad. Ils aiment ton ironie. Ils aiment tes excès. S’il te plaît, ne les déçois pas. Regarde autour de toi. Il y a partout des censeurs. Il y a partout des moralisateurs. Il y a partout des vigiles. Tout le monde suffoque. Ils nous empêchent de respirer. La maison brûle. Ta plume est une soupape. Vas-y, déverse ton encre. Chasse le mensonge. Montre-nous le visage de la bêtise.

Vas-y, déforme le nez des politiques, fais d’eux des bouffons. Montre la violence des intégristes, croque-les armés de poignards et de kalachnikovs. Barbouille-les de sang et de cendre. Vas-y, rapetisse la tête des dictateurs et grossis leur ventre. Dénonce les curés pédophiles. Raille les ayatollahs. Dégonfle les Américains. Vilipende Kim Jung-un. Démolis la finance. Ricane des écolos et des bobos. Joue avec les clichés. Offre un bikini à une femme en niqab. Habille d’une burqa une prostituée. Coiffe d’une kippa un Palestinien. Mets un keffieh autour du cou d’un Israélien. Fais éjaculer ta plume. Joue avec le feu. Déplace les lignes. Pousse les limites de la liberté. Crache ton irrévérence. Vante ton insolence. Imite Voltaire. Désacralise les religions. Outrage les prophètes. Pourfends les dieux. Vas-y, fais-nous rire. Fais-nous pleurer. Fais-nous rougir. Fais-nous crier. Soulève nos voiles. Montre notre laideur. Le monde est pourri. L’homme a perdu la tête. Moque-toi de tout. Moque-toi de moi. Il y a trop de lois, trop d’interdits. Vas-y, fais éructer ta plume. Le rire désamorce les conflits. Le rire soigne le ressentiment. Il apaise les colères. Il tue les pulsions de mort. Le rire, c’est la vie.

Ne baisse pas les bras. Dénoncer, c’est ton métier. Tu es né pour parler. Tu parles pour vivre. On doit être debout. Être à genoux, c’est un peu mourir.

Se taire, c’est trahir ceux qui sont morts pour la liberté.

K. A.
Ecrivain et éditeur

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Commentaires (6) | Réagir ?

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Med-Akli Lannak

Bravo Karim Akouche ! Un très beau texte, plein de belles et sublimes injonctions pour briser les silences complices, exorciser les peurs, conjurer les démons, dépasser les lâchetés, lutter contre la fatalité…Un hymne à l’audace d’agir, à la liberté d’écrire, de créer, de dire… Et pour donner plus de tonus au pamphlet, cette mise en exergue de la sentence matoubienne : "Je préfère mourir pour mes idées que de lassitude ou de vieillesse dans mon lit. " Ainsi que cette belle conclusion : « Se taire, c’est trahir ceux qui sont morts pour la liberté. »

Comme les beaux textes s’interpellent en écho, cette belle diatribe répand et répond en mille échos l’axiome djaoutien « si tu dis tu meurs, si tu ne dis pas, tu meurs, alors dis et meurs ! Ces merveilleuses sentences nous apprennent que la liberté n'existe que là où l'intelligence et le courage parviennent à mordre sur la fatalité. Que se brisent les chaines du silence !

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khelaf hellal

Que se brisent les chaînes de la peur et du silence !

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M S

Se taire, c’est trahir ceux qui sont morts pour la liberté.

"si ta parole n'est pas meilleure que le bruit, alors tais-toi".

vous vous pavanez de savoir vous exprimer dans la langue de ceux-là qui avaient assassiné vos grands parents, rendu orphelins vos parents et vous persécutent jusqu'à ce jour par les atrocités qui restent fraiches dans leur mémoire. vous vous prosternez indignement, je ne sais dans quelle position et pour quelle vicieuse pratique avec eux, et relevé votre unique corps, l'âme et l'esprit souillés, vous vous tournez du côté de ceux qui vous ont vu naitre, avec qui vous auriez dû voir le premier ce que, vos maitres lointains dénient par égarement, et vous leur assenez de vos ignobles facéties le coup fratricide.

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