Algérie : Rachid Boudjedra : " Je suis contre le 3e mandat de Bouteflika "

Algérie : Rachid Boudjedra : " Je suis contre le 3e mandat de Bouteflika "

Rachid Boudjedra a animé une conférence-débat jeudi à Bouzeguène en tant qu’invité des Mois littéraires de l’association Igelfan avec son épouse Michèle.

Sur Bouteflika : « Je ne suis ni pour le premier ni pour le deuxième et encore moins pour un troisième. » Avec cette précision : «Je suis de gauche et lui de droite, c’est un honneur pour moi qu’il ait un jour cité tous les écrivains algériens sauf moi preuve que je suis honorable et qu’il n’y a rien à bouffer avec moi.»

A ce propos, Boudjedra, dit ne pas cacher son attachement pour les pauvres et les gens qui ne sont pas favorisés par la nature et la vie. Enfant à Aïn Beïda, lui fils de riche fréquentait un cul-de-jatte sur le sort duquel il s’était davantage apitoyé lorsque ce dernier lui avait demandé un jour pourquoi Dieu l’avait créé ainsi. Le conférencier, qui a étudié pour quitter sa famille et la féodalité d’un père polygame vivant avec quarante maîtresses, estime que la littérature ne dénonce pas, elle dit simplement les choses d’une manière poétique.

Sur la littérature : «Je suis le seul écrivain qui ne mélange pas ses écrits avec les idées politiques. » Un écrivain écrit d’abord pour lui-même. Il écrit pour se défouler et pour atténuer la douleur. La souffrance est un élément important pour écrire, peindre filmer ajoute-t-il. Portant un regard critique sur le travail des jeunes écrivains, «qui se font éditer à compte d’auteur et se considèrent au final comme des génies», Boudjedra dit toute la complexité de l’écriture. Un rigorisme qu’il s’applique à lui-même : «On dit que je suis un bon écrivain, attendons de voir ce qu’en gardera l’histoire algérienne dans quinze ans.» Les jeunes écrivains trichent, ils ne peuvent pas bien écrire. Il y a certes quelques-uns mais il n’y a pas de rupture» a dit Boudjedra qui souligne que «Kateb a mis trente ans pour rompre avec Dib et lui-même 20 ans pour rompre avec Kateb et que Sansal était l’écrivain qui pouvait provoquer la rupture avec lui mais…». «Moi j’aurai, encore besoin de quinze ans pour parler des harraga.»

Sur Tahar Ouettar et Yasmina Khadra : Répondant à une avalanche de questions sur ses pairs de la littérature algérienne, le conférencier qui ne cache pas son admiration pour l’écriture de Kateb, son modèle algérien, fustigera Ouettar, «un opportuniste de tous les courants» dont il n’oubliera pas ce qu’il a dit à la mort de Djaout et de Sebti : «Tahar Ouettar est nul, un méchant, un khabith ». Qualifiant l’entrée de Assia Djebbar à l’Académie française de non-événement, l’auteur de FIS de la haine répond que la littérature de Yasmina Khadra est mineure».Rachid Boudjedra explique qu’en racontant une histoire avec des zigzags et des flashs-back, il ne fait que refléter la complexité de la vie.

Sur l’histoire : «L’Algérie a été conquise par les musulmans non par les Arabes, c’est une conquête musulmane réussie car les autres conquêtes n’avaient pas d’idéologie. L’Arabe est innocent dans cette conquête ». La francophonie ? «Elle est truffée de coquetterie», concède l’écrivain qui estime qu’au Canada, elle aura plus de chance de se rallier les suffrages algériens de par sa neutralité. L’humour et le côté épicurien apportés dans certains romans tragiques, c’est pour dénouer le drame et pour que le tragique ne l’emporte pas, explique le conférencier qui se décrit comme quelqu’un de très triste au fond : «C’est d’ailleurs toujours une partie de moi que je décris dans les personnages de mes romans.»

Sur ses projets : Révélant qu’il est en train d’écrire son roman sur la guerre d’Algérie qui commencera en 1830 et se terminera en 2008, il indiquera que dans «le démantèlement, c’est une partie de la guerre d’Algérie qui est traitée», faisant ce constat que «le FLN a fait la Révolution, il ne peut faire désormais que de la corruption». Boudjedra, moudjahid lui-même, salue la mémoire des combattants qui ont rejoint les rangs du peuple après l’Indépendance. Parlant de son expérience de scénariste, l’écrivain confie qu’il écrit de manière cinématographique, réfléchissant en plans et estimant qu’un bon film commence toujours par un bon scénario. La bureaucratie ? «En chacun de nous sommeille un censeur car la société est basée sur le mensonge et l’intellectuel n’est pas un sauveur, c’est quelqu’un qui peut proposer des idées.» Ne perdant pas espoir de voir un jour l’Algérie renouer avec l’écriture et les arts, l’hôte de Igelfan avoue avoir un peu de culpabilité envers l’Algérie : «Je peux vivre partout dans le monde où je suis traduit dans 32 langues, mais je ne peux pas quitter mon pays», concluant qu’«il faut dire le mal de l’Algérie ici et pas là-bas au risque de devenir louche».

Source : S. Hammoum- Le Soir

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Commentaires (33) | Réagir ?

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Martin

Pour avoir une idée de Boudjedra, je propose la lecture de cet ouvrage : "L'Ecriture de Rachid Boudjedra. Poét (h) ique des deux rives", paru chez Karthala Editions, 2005. Une grande partie de l'ouvrage est consultable sur GOOGLE BOOKS.

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makdeux

bonjour

C'est vrai! l'algérie a été conquise par des inuits venus du hidjaz et du nedjd à dos de baleine répandre la parole divine pour "desauvager" les protohistoriques d'afrique du nord. D'ailleurs qu'on se le dise bien l'algérie d'aujourd'hui est membre des états indiens d'amérique du sud. n'importe quoi! et dire que l'intellectuel est sensé éclairer la lanterne de pauvres gens que nous sommes! pauvre de nous!

nb: le texte d'amzal est superbe de lucidité. ce n'est pas rien de frequenter ce site.

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