Algérie : A quoi sert la cellule contre le blanchiment d’argent ?

Algérie : A quoi sert la cellule contre le blanchiment d’argent ?

Officiellement l’Algérie veut lutter contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme. Officiellement, elle dispose d’un dispositif pour cela et d’une cellule qu’on appelle communément la Cellule de traitement du renseignement financier (CTRF). C’est un organe indépendant, chargé de recueillir, traiter, analyser et échanger avec les organismes homologues étrangers des renseignements financiers dans le but de contribuer à la détection, la prévention et la dissuasion du recyclage des fonds issus de la criminalité et du financement des activités terroristes en Algérie. Officiellement, le CTRF fonctionne selon les normes édictées par le GAFI (Groupe d’actions financières, créé par le G8 et qui regroupe 33 pays, l’Algérie n’étant pas membre) qui sont au nombre de 49. Mais concrètement, à quoi sert la CTRF et que peut-elle vraiment faire ? En quatre ans, elle a transmis deux dossiers seulement à la justice pour un montant dérisoire de 7,8 millions de dollars. Lisons, dans El-Watan, les réponses d’Abdelmadjid Amghar, Président de la Cellule, pour mesurer toute l’impuissance d’une coquille vide.

Quel est le bilan de vos activités ?

La cellule a commencé à fonctionner en février 2004 bien qu’elle ait été créée en 2002. En 2005, il y a eu 11 déclarations de soupçon, en 2006, 36 déclarations, l’année suivante a enregistré un nombre de 77 déclarations, et au cinquième mois de l’année en cours, nous sommes déjà à 66 déclarations. Alors sur un total de 166, deux dossiers ont été transmis à la justice. Le 2e est en cours de traitement au tribunal de Chéraga.

Est-ce qu’on peut connaître les montants ?

Les montants ne peuvent être arrêtés que si la décision de justice intervient. Quant au seul cas pour lequel la décision de justice a été rendue, le montant de blanchiment s’élève à 7,8 millions de dollars.

Et à combien peut correspondre le total des 166 dossiers ?

On ne peut pas l’évaluer, parce que lorsqu’on reçoit des déclarations de soupçon, nous avons alors des informations qui concernent des opérations, soit des sommes d’argent (virées ou transférées) et dont le traitement nécessite de déterminer la part des montants qui relèvent vraiment du blanchiment et ce qui ne l’est pas. Et là, tant que la justice n’est pas intervenue nous ne pouvons pas considérer que tout le montant correspond au blanchiment.

Avez-vous déjà une estimation sur tout cet argent qui circule hors circuit bancaire ?

A peu près 40% du PIB est dans l’informel. Mais encore une fois, ce n’est qu’une estimation, car, faute de maîtrise, nous ne pouvons pas avoir de chiffres. Pour revenir à ces opérateurs, ils continuent à vivre et à s’enrichir dans l’illégalité.

Est-ce que vous vous intéressez aux fuites de capitaux ?

Nous nous y intéressons dans la mesure où ce sont des capitaux illicites, mais dans le cas des capitaux licites, gagnés honnêtement par les opérateurs économiques qui veulent investir à l’étranger, il n’y a rien d’anormal.

En tant que cellule de traitement du renseignement financier, est-ce que vous avez des informations sur les fuites des capitaux en Algérie ?

A part le fait que l’on entende les gens dire qu’il y a des fuites de capitaux, nous n’avons pas les moyens palpables pour dire que tel ou tel a transféré de l’argent ou pas parce qu’il n’est pas passé par le circuit normal pour savoir. D’ailleurs, c’est l’une des recommandations du GAFI (celle des transports d’espèces transfrontaliers) qui oblige tous les pays à mettre en place des instruments de contrôle transfrontalier.

Avez-vous compétence à intervenir sur le marché informel de la devise ?

Le marché informel de la devise doit être géré par les institutions qui en ont la charge. Les échangeurs manuels sont listés par la loi 05-01 comme étant des assujettis qui doivent renseigner la cellule. Mais à partir du moment où ils ne sont pas agréés par la Banque d’Algérie, ils n’existent pas pour nous en tant qu’entité déclarante. Ils travaillent dans l’illégalité et si l’on se réfère à l’ordonnance 96-22 modifiée qui traite de l’infraction à la législation des changes, il y a un certain nombre d’organes habilités à constater l’infraction. La cellule, elle, est habilitée à traiter l’information qu’on porte à sa connaissance.

Vous avez déclaré hier que l’immobilier pouvait constituer un espace pour le blanchiment d’argent... Vous n’avez qu’à remarquer, en dix années, le niveau de la flambée des prix de l’immobilier et du foncier. Pourquoi ce secteur ? Parce que les acteurs ne jouent pas le jeu. Il s’agit des notaires, des avocats d’affaires, ceux qui aident certains particuliers à réaliser des transactions commerciales et des agents immobiliers, bien que l’article 19 de la loi les oblige à déclarer des opérations qui leur semblent douteuses. Donc à partir du moment où on ne sait pas ce qui se passe, cela constitue un espace de blanchiment par excellence.

Ali Benyahia-EW

Plus d'articles de : Actualité

Commentaires (16) | Réagir ?

avatar
Wardi Omar

salut si on commencait par chercher a savoir comment Abdelmadjid et consort ont fait pour blanchir le leur ce serait mieux n'estcepas

avatar
Bennouna

Peut-etre le titre voulait dire " ou est la cellule contre le blanchissement, du petrol, gas, logements, recrutement.. et comptes suisse". Dans une riche Algerie ou 96% roulent leurs bosses dans la misere???.

visualisation: 2 / 16