Kouchner parle des projets français pour l'Algérie

Kouchner parle des projets français pour l'Algérie

Voici le texte intégral de l'interview accordée par le ministre français des Affaires étrangères, Bernard Kouchner, à l’APS.

Dans quel état d'esprit effectuez-vous votre visite en Algérie ?
Je suis très heureux de pouvoir effectuer cette visite. Vous savez que l’Algérie est un partenaire majeur pour la France, un pays ami avec lequel nous avons énormément en partage. J’avais accompagné le Président de la République lors de sa visite d’Etat, en décembre dernier : cette visite avait été l’occasion de redonner à nos échanges un nouvel élan, une nouvelle dynamique. C’est dans cet esprit de renouveau que je me rends aujourd’hui à Alger, pour parler des nombreux projets que nous avons encore à accomplir ensemble.

Parmi eux, il y a notamment la question cruciale de l’Union pour la Méditerranée. Vous savez que nous sommes très attachés à la réussite de ce projet, qui sera au cœur de la Présidence française de l’Union européenne, à partir du 1er juillet prochain. Le Président Sarkozy souhaite que l’ensemble des pays concernés par ce projet ambitieux, tant au sein de l’Union européenne que sur la rive sud de la Méditerranée, soient pleinement associés à sa conception : il s’agit là d’une condition sine qua non du succès de cette entreprise. L’Algérie a manifesté très tôt son intérêt pour le projet, et nous sommes aujourd’hui d’accord sur sa philosophie générale : privilégier une véritable approche partenariale et mettre l’accent sur des sujets concrets, afin de ne pas retomber dans les écueils du processus de Barcelone.

Dans cette optique, l’Algérie fait évidemment partie des partenaires majeurs sur lesquels nous comptons beaucoup. C’est ce que je vais redire à mes interlocuteurs, et c’est le sens du message que le Président de la République m’a chargé de remettre à son homologue.

Mes entretiens à Alger avec mon ami Mourad Medelci seront aussi pour moi l’occasion d’évoquer d’autres sujets d’intérêt commun, comme les relations de l’Algérie avec l’Union Européenne, que nous souhaiterions contribuer à faire progresser pendant notre période de présidence ; la question du Proche-Orient, qui nous préoccupe beaucoup des deux côtés de la Méditerranée, où nous partageons l’objectif de voir naître le plus tôt possible l’Etat palestinien viable que nous appelons de nos vœux.

Quels sont les domaines de coopération qui vous semblent nécessaire d'impulser ?
Notre coopération bilatérale a connu ces dernières années une montée en puissance intéressante. De nombreux projets ont vu le jour et méritent aujourd’hui d’être poursuivis et encouragés. C’est à cette fin que nous avons signé, en décembre dernier, deux textes qui permettent de fixer un cadre ambitieux au développement de notre coopération. La Convention de partenariat et le Document cadre de partenariat tracent des perspectives pour les cinq prochaines années ; ils vont nous permettre d’inscrire les projets existants dans la durée, mais aussi de lancer de nouvelles pistes. Ce dispositif constitue le cœur de nos relations bilatérales : c’est à travers lui que pourra se développer l’amitié entre nos deux pays et entre nos deux peuples.

Ce qu’il faut souligner, c’est que nous souhaitons adopter dans ce domaine essentiel une approche fondée sur la concertation et le dialogue : les projets sont définis ensemble et répondent aux besoins de l’Algérie d’aujourd’hui. Ainsi, nous travaillons beaucoup dans le domaine de l’éducation et de la formation, notamment à travers la mise en place d’un important programmes de bourses, ou la formation de plus de 2000 doctorants de français. Nous poursuivons également les projets liés à la modernisation de l’administration algérienne, à laquelle nous sommes associés à travers la formation des cadres.

Les textes que je mentionnais ont aussi permis d’explorer de nouveaux domaines dans lesquels nous souhaitons progresser : ainsi de la coopération décentralisée, qui est devenue très dense et permet de tisser des réseaux de partenaires solides et durables ; nous voulons également porter l’accent sur l’appui aux médias, et, enfin, la coopération en matière de sécurité intérieure et de sécurité civile, c’est à dire de protection civile. Sur ces derniers thèmes, la visite de ma collègue Michèle Alliot-Marie la semaine dernière a permis de confirmer notre intérêt commun au développement de nos échanges.

Enfin, l’Algérie figure parmi les premiers pays avec lesquels nous avons lancé une coopération dans le domaine de l’énergie nucléaire civile. C’est un sujet auquel le Président de la République tient particulièrement. L’accord paraphé pendant sa visite d’Etat nous offre des opportunités inédites qui aboutiront, j’en suis convaincu, à la mise en place d’un partenariat bénéfique pour nos deux pays.

Qu'est-ce qui a été concrètement réalisé du côté français depuis la dernière visite du Président Nicolas Sarkozy ?
Comme je l’ai déjà souligné, la visite du Président Sarkozy a donné une nouvelle impulsion à nos relations. Les grands axes ont été fixés par nos deux chefs d’Etat, et nous disposons désormais d’une feuille de route ambitieuse. Nous avons d’ores et déjà commencé à la mettre en œuvre, en particulier dans le domaine de la coopération que j’ai mentionné.

Ainsi, les échanges se multiplient sur tous les sujets. Plusieurs visites ministérielles ont eu lieu dans les deux sens depuis décembre et d’autres vont suivre au cours des prochaines semaines. Nous profitons aujourd’hui encore de l’élan impulsé par la visite d’Etat : cela facilite les discussions et permet d’avancer. Nous avons bon espoir de voir un certain nombre de projets se mettre en place d’ici la fin du semestre : dans le domaine de la coopération énergétique, de la coopération économique et des investissements, des questions migratoires. Les échanges se poursuivent sur tous ces dossiers.

Mais surtout, la visite du Président de la République a permis d’avancer sur les questions importantes de notre mémoire commune. Le contentieux sur les assurances, vieux de plus de 40 ans, a ainsi été soldé à l’occasion de la visite de M. Djoudi à Paris, en mars dernier. Nous avons également progressé sur la question délicate des sites d’essais nucléaires français au Sahara, sur laquelle un groupe de travail franco-algérien ne devrait pas tarder à se mettre en place. Nous avons remis à l’Algérie les archives audiovisuelles de l’INA en février dernier et un processus a été engagé pour la mise à disposition de celles de l’ECPAD, l’ancien service cinématographique des Armées.

Tous ces points sont le résultat concret de la visite d’Etat, à l’occasion de laquelle le Président a tenu un discours nouveau et courageux. Ce qu’a dit en substance le Président Sarkozy, c’est qu’il faut en finir avec les contentieux du passé qui alourdissent nos relations et nous empêchent de nous tourner vers l’avenir. C’est une question difficile, car elle implique des drames, des souffrances, des rancœurs, des deux côtés de la Méditerranée. D’une certaine manière, le Président Sarkozy a l’avantage de pouvoir considérer ces sujets difficiles avec un certain recul, puisqu’il est le premier Président de la Vème République qui n’a pas connu la guerre d’Algérie. Il a ainsi pu dire à Alger, en décembre, ce qu’aucun chef d’Etat français n’avait dit avant lui : le système colonial était profondément injuste, même si nombre d’hommes et de femmes qui l’ont porté aimaient profondément l’Algérie et ont beaucoup donné pour contribuer à son développement. Les propos qu’a tenus notre ambassadeur à Guelma, il y a une quinzaine de jours, vont dans le même sens et poursuivent le même objectif : reconnaître le passé pour sortir enfin de la guerre des mémoires et regarder vers l’avenir. Nous le devons aux jeunes d’Algérie et de France, eux qui incarnent si bien les liens indéfectibles qui unissent nos deux pays et nos deux peuples.

Cette avancée est fondamentale, et doit être considérée comme telle, car c’est sur la base d’une mémoire apaisée et sereine que nous pourrons continuer à construire le partenariat d’exception qui caractérise, aujourd’hui plus que jamais, la relation franco-algérienne.

APS

Plus d'articles de : Algérie-France

Commentaires (18) | Réagir ?

avatar
mohamed hannachi

togy amazigh vous avez raison Le poisson est gros, trop gros et la page ne peut pas être tournée pour le moment et pas pour bientot. lorsqu´on voie des organisations qui pullulent un peut partout (organisation des fils de chouhadas de moudjahidines plustard des neuveus...) et qui reclament des statuts et des droits (super citoyens) en plus de ca ils sont tous des bras casses personne de ces organisations ne peut donner un projet de societe ou contribuer au devellopement du pays.

avatar
togy amazigh

En fait la page ne peut pas être toutnée aussi facilement. Longtemps, la France a été gouvernée par des hommes qui étaient déjà là au temps de l'Algérie française. Ce n'est pas le cas de Sarko. Les archives récupérées ont permis déjà de démasquer un grand nombre de faux moudjahidines et chouhadas qui seront probablement poursuivis en justice. Des hommes du sérail qui étaient jadis puissants ont été écartés du pouvoir avec une facilité inouie. Pourquoi croyez-vous que des hommes aussi puissants que Nezzar sont aujourd'hui réduits au silence? Un travail d'assainissement doit être mené avec sérieux pour se débarasser des cette pégre qui a prété allégeance à la France coloniale et poste coloniale. C'est pour celà que la page ne peut pas être tournée pour le moment. Un million cinq cent milles chahids et prés d'un million d'anciens moudjahids! Le poisson est gros, trop gros.

visualisation: 2 / 18