Saïd Sadi : un homme, un combat, une vision modernes

Saïd Sadi
Saïd Sadi

Si Saïd Sadi n’était pas venu à la politique, la politique serait sans doute venue à lui ! On peut l’aimer ou le détester, l’estimer ou le déprécier, le glorifier ou le maudire, mais on ne peut l’ignorer, car l’homme ne laisse jamais indifférent.

Son discours, loin d’être éploré, ne pâtit d’aucune empreinte idéologique surannée, tant et si bien que même si vous n’adhérez pas à ses analyses, il réussit cet exploit magique, digne des grands hommes, de vous arracher quelques sourires. Une façon élégante de décompresser l’atmosphère, de dépassionner les débats et de prendre la distance nécessaire à l’apaisement! À cet égard, l’intervention tant attendue de notre Docteur national au forum de liberté aura eu le mérite de nous élever, pour quelques instants furtifs, mais oh combien délicieux, bien au-dessus du niveau très bas, aux relents insipides qui règne en permanence dans la sphère politique. Sphère dans laquelle les sbires de Bouteflika se complaisent et tentent de noyer le débat depuis ces sorties renversantes d’infantilisme qui émane du sommet du pouvoir.

Quand on écoute Sadi, l’espoir renaît, mais quand on observe la scène politique dans son ensemble et les acteurs de la société, formatés à l’image FLiN-tox, cet espoir s’évanouit!

Bien sûr, on peut relever, çà et là, des sentences aux formules hasardeuses, comme celle du titre affiché par le journal liberté "il faut disqualifier politiquement cette élection par une abstention massive !". Comme si notre Docteur national ne savait pas ou oubliait que l’abstention a toujours été au rendez-vous! Vous savez bien que même si le peuple ne se rend pas aux urnes, le 17 avril, Bouteflika a suffisamment de soutiens pour permettre à ses valets de nous narguer encore une fois en annonçant un 4ème plébiscite avec un taux de participation et de voix en sa faveur dont seuls les derniers chiffres après la virgule demeurent inconnus!

Un décompte rapide des corps constitués, avec 400.000 soldats, 200.000 policiers et 140.000 gendarmes, permet de recenser une réserve de plus de 2 millions de voix (en comptant, à minima, 2 membres majeurs en âge de voter, soit une seule épouse et un enfant unique par famille) pour ces seuls corps. À ces 2 millions de bulletins acquis, il faut rajouter la masse de la nébuleuse de fidèles, constituée de centaines de milliers d’anciens vrais-et-faux maquisards, de centaines de milliers de FLiN-tox qui se réclament de la famille révolutionnaire, et de centaines de milliers de «khobzistes» de tous bords qui associent la stabilité de la hiérarchie corrompue et corruptrice à celle de sa propre survie, celle d’assurer sa place dans ce milieu de prédation collectif organisé. Tout compte fait, on peut avancer sans risque d’erreur appréciable que le 4ème mandat peut compter, à minima, sur 4 millions de bulletins dans les urnes! C’est bien plus que suffisant pour nous annoncer un 4ème plébiscite populaire. On pourrait inviter le Dalaï-lama en personne pour superviser le contrôle des urnes qu’il n’y verrait que du feu en lieu et place de la supercherie mise en place par la bande organisée militaro-FLiN-tox, avec ses 50 années d’expérience en matière de triche, de falsification et de bourrage des urnes! De quoi confectionner un "Guinness-book des records" complet!

Pour ces raisons, s’il y a un travail de sensibilisation des consciences à faire, il est à orienter en premier lieu vers toutes ces masses parasites aux «reflexes reptiliens», disposées à se nourrir, sans état d’âme, d’un corps malade, celui de Bouteflika ou de corps sains, ceux de Benflis, Hamrouche ou Benbitour pour la survie du système auquel ils appartiennent et se vouent corps et âmes! Parlez-moi de l’âme d’un reptile, d’ailleurs !

Or, une telle perspective  est-elle concevable quand les gardiens de la morale ; Assemblée Nationale, Sénat, Conseil de la Nation, Conseil constitutionnel, ainsi que toutes les ramifications administratives, baignent eux-mêmes dans une immoralité absolue, avec des réflexes tout aussi reptiliens? Sans parler de ce président et de son entourage immédiat, sensés donner le bon exemple en premiers.

Il est de ce fait évident qu’en termes de disqualification, c’est plutôt le peuple qui a été disqualifié de facto et non le pouvoir, car celui-ci a compris depuis longtemps, et c’est ce qui fait sa force, qu’il n’a pas besoin du peuple pour se maintenir aux commandes et continuer le pillage du pays, au vu et au su de tous, les gardiens des droits universels compris, s’ils ne sont pas carrément complices, en contrepartie de quelques barils de pétrole de plus.

Quant à l’idée d’union sacrée, en plus d’évoquer une pratique mafieuse effrayante, elle risquerait de donner, si elle venait à se construire en ces termes, la même image répugnante que celle des deux unions sacrées qui existent déjà et qui sont à l’origine de tous nos malheurs. Faut-il rappeler qu’en plus de l’union entre les différentes structures de la "famiglia" au pouvoir, détaillée ci-dessus, une deuxième union sacrée se réorganise doucement mais sûrement dans les lieux de cultes ? A tel point que Bouabdellah Ghlamalah "a appelé à préserver les mosquées algériennes d’idées intruses propagées dans le seul et unique but de déstabiliser la société algérienne"*. Le sacré, ça suffit !

Par contre, la focalisation sur le 4ème mandat ne risque-t-elle pas de distraire l’attention des uns et des autres et oublier cette autre bête aux reflexes et appétits reptiliens encore plus insatiables et qui se réveille elle aussi d’une léthargie forcée ? D’ailleurs, tout comme ses géniteurs, fusionnés au pouvoir, s’est elle vraiment endormie celle-là ? Que le ministre des Affaires religieuses et des wakfs s’en mêle et s’en alarme a de quoi inquiéter. A moins que cela ne fasse partie d’un stratagème qui consiste à exhiber des bêtes féroces pour pousser un peuple sans défense à se réfugier derrière leurs dompteurs ? Allez savoir !

En tous cas, quoi que nous réserve le futur immédiat, l’intervention de Saïd Sadi aura prouvé que le débat moderne est possible, que l’Algérie possède encore des atouts humains, que l’espoir peut être ravivé, que des lendemains meilleurs peuvent se profiler, que, quoique latente, l’intelligence est encore là, prête à jaillir ; si tant est que le pouvoir militaire et civil fasse son mea-culpa quant à ce demi-siècle d’échecs, qu’il rende les clés de la maison Algérie aux hommes du terroir et qu’il laisse les énergies se libérer, les compétences émerger par une compétition moderne qui oppose des idées et non des croyances!  Tout cela nécessite un gel collectif de ce fameux reflexe reptilien qui sévit à tous les niveaux de la sphère du système. Se pose alors une question : quel stratagème permettrait d’inhiber le réflexe naturel d’un reptile sans se résoudre à l’abattre ? De question en question, ils ne font que nous tourner en bourriques ! Ils doivent le savoir et s’en amuser !

Quoiqu’il en soit, les générations futures auront du mal à croire - car elles finiront tôt ou tard, c’est une question de survie liée à la règle d’adaptation naturelle propre à l’évolution de toute espèce sur Terre, à grimper sur le train du monde et comprendre l’Histoire détournée de leurs pays - que des Saïd Sadi ont existé et qu’un pouvoir de petits chenapans adossés aux appuis barbares de Généraux incultes  les a empêchés de s’exprimer pour éduquer le peuple et faire avancer le pays.

Merci pour ces moments de bonheur et d’optimisme furtifs Docteur! Malheureusement, le pessimisme reprend le dessus très vite pour les échaudés que nous sommes, éreintés par 50 années de leurre, d’illusions et de faux espoirs, et dont l’exil a consommé les cellules vivaces jusqu’à leurs ultimes bastions!  Meziane Ourad et Mohamed Benchicou vous en diraient tant!

Comment ne pas se laisser envahir par des vagues de pessimisme quand des énergumènes de la trempe de Amara Benyounès et de Khalida Messaoudi, vos coéquipiers d’origine (pour ne pas dire amis, est-il besoin de le rappeler ?) se laissent facilement obnubiler par le pouvoir, au point de renier jusqu’à leur famille et leurs combats d’origines, et donner l’impression vile de ne pas s’encombrer de la moindre décence, quitte à vendre leur propre mère pour des miettes et l’illusion d’exister ?   

C’est à cause de tels énergumènes, ceux qui ont l’art et l’indécente légèreté de transformer la traîtrise en victoire, et ils sont bien trop nombreux chez nous, que notre pays est perdu Docteur! Il ne reste qu’à surveiller le ciel dans l’espoir qu’une météorite s’abatte sur El-Mouradia et les Tagarins pour provoquer l’extinction de cette lignée de dinosaures, encore plus coriace que celle d’il y a 65 millions d’années. A moins que les choses se profilent autrement, bi-idhni-Allah!

Kacem Madani

* Le Soir d’Algérie du 26-02-2014.

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Commentaires (20) | Réagir ?

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Khalida targui

quand je vois les uns critiquer les autres et les autres critiquer les uns, je me demande bezaf qui sauvera l'Algerie, vive les Chinois mes freres

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Bachir ARIOUAT

La liberté de s'exprimer fait jaillir la lumière et dissipe l'obscurantisme de la nuit, il ne faut jamais oublier que la parole est celle qui permet à l'homme d'évoluer et de sortir de la misère puis d'être instruit.

Un des pères fondateur de la révolution Française, a dit, après le pain, le premier besoin du peuple et l'instruction, c'était un visionnaire.

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karim haddad

un vrai regal que de vous lire mr kacem madani... finesse et subtilité , melangée a l'art et a l'humour du desespoir font de vos analyses un vrai baume pour nos "ames" et cerveaux meurtris par tant de desepoir "reptilien"... merci a vous l'impenitent republicain democrate laic!!!

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Kacem Madani

Merci l'ami! Je ne fais que reproduire, à ma façon, une colère cumulée et amplifiée par l'impuissance que l'on ressent tous vis à vis de ces décennies de supercheries et de bêtises au sommet du pouvoir! Et ça ne donne pas l'impression de s'estomper!

Bien à vous,

KM

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