Ukraine : trêve et rencontre des ministres de l'UE

Une trêve est annoncée après la mort de 26 personnes.
Une trêve est annoncée après la mort de 26 personnes.

Le président ukrainien Viktor Ianoukovitch a annoncé mercredi soir avoir conclu une "trêve" avec l'opposition, quelques heures avant une réunion extraordinaire des ministres des Affaires étrangères de l'Union européenne consacrée à d'éventuelles sanctions.

La présidence a fait état d'un accord sur "l'ouverture de négociations destinées à mettre un terme au bain de sang, et à stabiliser la situation au sein de l'Etat, dans l'intérêt de la paix sociale".

Après les graves violences qui ont fait 26 morts mardi soir puis dans la nuit de mardi à mercredi, le face-à-face tendu s'est poursuivi dans la nuit de mercredi à jeudi entre manifestants antigouvernementaux et policiers anti-émeutes dans la capitale Kiev, où les ministres des Affaires étrangères français (Laurent Fabius), allemand (Frank-Walter Steinmeier) et polonais (Radoslaw Sikorski) doivent être reçus ce jeudi matin par le président Viktor Ianoukovitch avant gagner Bruxelles pour la réunion dans l'après-midi des chefs de la diplomatie des 28 pays de l'UE.

Les ministres des Vingt-Huit devraient évoquer de possibles sanctions ciblées contre les responsables des violences de mardi. Selon des responsables de l'UE, Ianoukovitch ne sera pas visé par ces sanctions, afin de laisser des possibilités de dialogue. En revanche, les avoirs de certains responsables pourraient être gelés et leurs facultés à voyager seraient limitées.

Les Etats-Unis ont imposé mercredi des interdictions de visas à l'encontre de 20 personnalités ukrainiennes tenues pour responsables de la répression des manifestations, a indiqué un haut fonctionnaire du département d'Etat sous le sceau de l'anonymat.

Le président Barack Obama et le Premier ministre canadien Stephen Harper, réunis au Mexique pour un sommet de l'Alena (Association de libre échange nord-américain), ont réagi avec prudence à l'annonce de la trêve conclue à Kiev, déclarant qu'elle serait la bienvenue si elle est effectivement respectée.

"Les dirigeants prennent note des informations faisant état d'une trêve entre le gouvernement et l'opposition, trêve qui, si elle est appliquée, sera un pas bienvenu dans la bonne direction, vers l'objectif d'un dialogue sérieux", ont-ils déclaré en appelant l'armée ukrainienne à la retenue.

Le président Ianoukovitch a remplacé mercredi le chef d'état-major des forces armées. L'amiral Iouri Ilyne, qui dirigeait jusqu'alors la marine, succède au général Volodimir Zamana, nommé au Conseil national de sécurité et de défense rattaché à la présidence. Aucune explication n'a été fournie à cette décision Dans la journée de mercredi, le ministère de la Défense avait indiqué que les forces armées pourraient participer à l'"opération antiterroriste" lancée par le Service de sécurité de l'Etat (SBU).

La trêve annoncée par Ianoukovitch pourrait signifier que les forces de sécurité, qui ont repris dans la nuit de mardi à mercredi une partie de la place de l'Indépendance, au coeur de la contestation ukrainienne depuis trois mois, ne repasseront pas à l'offensive dans les heures à venir.

DES MAGNATS PLAIDENT POUR UN COMPROMIS

"L'assaut sur 'Maïdan' (ndlr, le surnom de la place) que les autorités avaient prévu aujourd'hui n'aura pas lieu", a commenté Arseni Iatseniouk, l'un des chefs de file de l'opposition. "Une trêve a été déclarée. L'essentiel est de protéger les vies humaines", a ajouté le chef du parti Batkivchtchina (Mère-Patrie).

Dans la journée de mercredi, le pouvoir semblait pourtant avoir choisi la fermeté.

Fort du soutien de Moscou et malgré les premières menaces de sanctions de l'Union européenne, Ianoukovitch avait dénoncé en fin de matinée une tentative illégale de prise du pouvoir par "certains hommes politiques" tandis que le Service de sécurité d'Etat (SBU) annonçait le déclenchement d'une "opération antiterroriste" à travers le pays.

Les violences de mardi et de la nuit qui a suivi, les plus meurtrières depuis l'indépendance ukrainienne acquise en 1991 de l'URSS, ont fait au moins 26 morts et plus de 600 blessés. Elles ont suscité de très vives condamnations de la part des Européens et des Américains.

"Les images que nous recevons depuis hier sont choquantes", a dit mercredi la chancelière Angela Merkel à l'issue d'un conseil des ministres franco-allemand mercredi à l'Elysée. "Il se produit en Ukraine des actes inqualifiables, inadmissibles, intolérables", a estimé pour sa part François Hollande

La Russie a promis quant à elle d'utiliser son influence pour ramener la paix chez un "Etat frère" et a dénoncé des violences qui sont selon elle le fait "d'extrémistes" tentant de fomenter un coup d'Etat. Son ministre des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, a accusé l'Occident d'encourager les extrémistes de l'opposition à "agir en dehors du cadre de la loi". 

Trois des plus riches hommes d'affaires d'Ukraine ont accru depuis mardi la pression sur Ianoukovitch pour qu'il s'abstienne de recourir à la force et fasse tout pour résoudre la crise par des négociations avec l'opposition.

"Aucune circonstance ne justifie l'usage de la force contre la population pacifique", a estimé mardi soir le magnat de l'acier et du charbon Rinat Akhmetov, qui avait pour partie financé la campagne électorale de Ianoukovitch en 2010.

Pour Viktor Pintchouk, autre milliardaire de l'acier, bien connu en Occident pour ses activités philanthropiques, "Une solution pacifique doit être trouvée. Il est impératif de s'abstenir de recourir à la force et de trouver un compromis. L'heure est venue pour les deux camps de prendre des mesures courageuses, dans le sens d'un compromis". Enfin, Dmitro Firtache, magnat du gaz et de l'industrie chimique, s'est prononcé mercredi en faveur d'un règlement politique qui permette d'éviter le recours à la force.

Reuters

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