La Syrie et le Sahel inquiètent les renseignements américains

Les espions américains ont identifié de nombreuses menaces
Les espions américains ont identifié de nombreuses menaces

La Syrie devenue un "aimant énorme" pour les jihadistes, l'Afrique sub-saharienne un "incubateur" pour groupes extrémistes: les responsables américains du renseignement ont dressé mercredi un sombre tableau de la menace posée par les islamistes radicaux dans le monde.

Passant en revue l'ensemble des menaces potentielles pesant sur la sécurité des États-Unis à l'occasion d'une audition annuelle devant la commission du Renseignement du Sénat, les maîtres espions de Washington ont insisté sur la dissémination des groupes proches ou affiliés à al-Qaïda dans le monde.

Dans son discours sur l'état de l'Union mardi soir, Barack Obama avait déjà prévenu que si Al-Qaïda était "sur le chemin de la défaite", la menace qu'il représente "a évolué" et s'est disséminée. Ainsi, pour James Clapper, le directeur du renseignement (DNI) qui chapeaute les 16 agences du renseignement du pays, "la Syrie est devenue un aimant énorme pour les extrémistes".

M. Clapper a estimé à 1.600 le nombre de groupes rebelles luttant contre le régime de Bachar al-Assad, représentant "entre 75.000 et 110.000" combattants, dont "26.000 que nous considérons comme extrémistes". Quelque 7.000 d'entre eux sont des combattants étrangers, en provenance d'une cinquantaine de pays, essentiellement d'Europe et du Moyen-Orient.

"Nous assistons maintenant à l'apparition de complexes d'entraînement en Syrie pour former les gens et les renvoyer vers leur pays et, bien sûr, perpétrer davantage d'actions terroristes", a mis en garde M. Clapper, tout en rappelant l'inquiétude de ses interlocuteurs européens.

La situation en Syrie "nous inquiète beaucoup, en particulier pour le risque potentiel d'attaques terroristes conduites en Occident et émanant de Syrie", a abondé le directeur du Centre national contre-terroriste, Matthew Olsen. A bien des égards, la Syrie leur rappelle les zones tribales du nord-ouest du Pakistan où les membres d'Al-Qaïda ont cherché refuge après 2001.

"Porosité des frontières libyennes"

Si le régime syrien a été contraint d'accepter la destruction de ses stocks d'armes chimiques sous la pression internationale, il pourrait disposer d'une "capacité limitée" de production d'armes biologiques, a par ailleurs prévenu M. Clapper, évoquant pour la première fois publiquement cette menace potentielle.

Pour le renseignement américain, les chances de l'opposition ou du régime de Bachar al-Assad de prendre le dessus sur l'autre au cours des six prochains mois sont minimes mais le conflit syrien "va probablement exacerber les tensions régionales et confessionnelles".

L'évolution de l'Irak va ainsi "lourdement dépendre de la façon dont Bagdad fait face au défi croissant d'Al-Qaïda", dont des groupes affiliés se sont emparés de la ville de Falloujah, un bastion sunnite, a expliqué le DNI.

Au Yémen, le gouvernement fait face à un risque d'instabilité face à la résurgence d'Al-Qaïda dans la péninsule arabique (Aqap), tandis qu'en Libye, "la menace terroriste contre les intérêts occidentaux et gouvernementaux reste aiguë, surtout dans l'Est du pays". La porosité des frontières libyennes et les "quantités massives d'armes en circulation déstabilisent davantage le pays, le Maghreb et la région sahélienne", juge encore James Clapper dans la portion écrite de son témoignage.

Cette partie de l'Afrique, tout comme la Somalie, est elle "devenue un incubateur" pour les groupes extrémistes qui lancent des attaques "de plus en plus meurtrières". "Les gouvernements de la région du Sahel, particulièrement le Tchad, le Niger, le Mali et la Mauritanie, courent le risque d'attaques terroristes, essentiellement en représailles à leur soutien à l'intervention militaire française au Mali en janvier 2013", selon James Clapper.

Évoquant d'autres menaces et développements internationaux susceptibles d'affecter la sécurité américaine, les responsables du renseignement ont également évoqué la situation en Ukraine.

Ils jugent notamment que le président Viktor Ianoukovitch a la "ferme intention de rester au pouvoir" et aura "probablement recours à l'intimidation et aux moyens extra-légaux" pour assurer sa réélection en 2015.

Quant aux révélations de documents transmis à la presse par l'ancien consultant de la NSA Edward Snowden, elles continuent de poser "une menace grave pour notre sécurité nationale", a jugé le directeur du renseignement militaire (DIA), le général Michael Flynn, notamment parce que les groupes extrémistes s'en servent pour étudier les méthodes américaines de renseignement afin de mieux s'en prémunir.

AFP

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