Omerta d'États

Le dernier séjour médical du président Bouteflika a fait débat.
Le dernier séjour médical du président Bouteflika a fait débat.

La question est posée par le journaliste, l’animateur du talk-show matinal des chaînes de radio RMC et télévision BFMTV, à la ministre de la Santé publique de France. Une question en rapport avec l’Algérie et précisément sur l’état de santé du Président algérien.

Le sujet ne doit avoir que peu d’intérêt pour le public des auditeurs matinaux, le ton badin qui est choisi donne à cette question en distanciation avec l’actualité du jour. Le débat est cependant lancé par cette brève d’information en forme de question quasiment off. Il sert de sujet d’échauffement avant le débat proprement dit. 

Ce matin du 17 janvier 2014, l’invitée des chaines françaises d’information n’est pas vraiment une ministre d’un département de souveraineté comme l’on dit, de ces ministres qui détiennent de vrais pouvoirs régaliens. C’est juste la ministre de la Santé publique, des Affaires sociales, et de quelques autres prérogatives annexées. Elle est ministre grâce au dosage arrangé par lequel se forme tout gouvernement en France. Elle doit sa position dans ce gouvernement : à la parité hommes-femmes ; à sa position au sein d’un courant ou d’une sensibilité marquante du parti socialiste au pouvoir ; à ce qu’elle est originaire d’une région territoriale dont elle porte le nom – mais là, ce n’est que le pur hasard des choses –, la Touraine ; et ensuite mais ce n’est qu’à ce niveau que s’affine réellement le choix de la compétence personnelle propre de Mme Marisol Touraine. La ministre aura donc à s’échauffer sur un sujet qui ne désintéresse pas tous les auditeurs du direct matinal. Elle est interpellée sur une question délicate dont elle semble bien avoir pris la mesure, et s’en tire bien de cette introduction d’interview en ne disant rien ou presque. 

On lui demande les nouvelles de Bouteflika, et ne veut pas répondre. Non pas qu’elle ne connait pas la réponse, mais qu’elle refuse de communiquer. La réponse elle l’a. Elle doit aussi avoir la consigne de ne pas la divulguer au public, donc pas aux journalistes. Le secret est surement partagé par des centaines de personnes en France, et si des milliers d’autres ne le savent pas, c’est simplement que ça ne les intéresse pas. Nous n’allons pas imaginer que Bourdin, l’interviewer de la ministre ce matin à la radio et télévision, n’en saurait pas grand-chose. Il a posé la question pour l’exercice de l’entrée en débat comme indiqué déjà, et aussi en professionnel, pour donner de l’exergue à l’information, mais sans toutefois s’attendre à en faire dire davantage que ce que le communiqué officiel et tout à fait conventionnel n’en a fait savoir. 

Que tout le monde se rassure en Algérie : l’état de santé du Président est un secret de polichinelle dans le macrocosme français. Et dans ces moindres détails, il est connu de nombreuses personnes et non pas uniquement de Mme Touraine. Pourquoi alors cibler ici la ministre française de la Santé s’il nous est inconcevable qu’elle détiendrait seule le secret, un secret vraiment putatif, celui du mystère entourant l’état de santé du chef de l’État algérien. C’est parce que… comment dire… cette ministre doit avoir un homologue en Algérie, un ministre de la Santé dont le nom ne doit pas parler tant que ça aux Algériens. Peu importe par quels critères il accède à cette fonction, mais on suppose seulement qu’en Algérie de l’indépendance, il y aurait aujourd’hui un ministre de la Santé. Ce ministre, si c’est à lui que Bourdin avait posé la question, il ne lui répondrait pas, non pas qu’il ne veuille pas répondre – comme c’est le cas de Mme Touraine – mais parce qu’il ne connait pas la réponse. En Algérie, la réponse à la question de ce journaliste, une question légitime que se pose le commun des gens, on ne peut la retrouver que chez ceux-là qui détiennent un portefeuille de souveraineté. 

C’est donc une affaire de souveraineté que l’état de santé du Président. Si ça peut consoler, on dira qu’il y a au moins un ministre de la Santé dans le monde qui sait de quoi est malade l’Algérie. Ce ministre n’est pas algérien, mais il garde jalousement le secret de notre souveraineté à nous.

Ammar Bouzouar

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Commentaires (3) | Réagir ?

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anwa wiggi

Azul fellawen,

@Ammar Bouzouar,

Soit vous ignorez le fonctionnement des institutions et du gouvernement Français ou vous faites dans le mensonge et la mauvaise foi.

Je n'ai aucune sympathie particulière pour Marisol Touraine mais de là à ignorer son rang au sein du gouvernement Ayrault, il y'a un pas que je ne franchirais pas.

Cette femme est un poids lourd du gouvernement et elle est assistée de deux ministres délégués.

Quant au fait de déclarer que l'Algérie a une dette de plusieurs millions au près de la CNAS, elle est dans son rôle et prérogatives.

C'est à ceux qui nous humilient qu'il faudra réduire à néant pas une ministre qui défend son état comme le fait Marisol Touraine.

C'est au nain qu'il faudra demander des comptes!!!

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Nora Benakli

Merci Monsieur RAMSSES II pour ce site très intéressant, merci encore

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