Bouteflika et ces drôles de présidentielles

Bouteflika devrait être rapatrié vendredi.
Bouteflika devrait être rapatrié vendredi.

Un épais brouillard entoure les hautes affaires du pays. Des militaires en conclave, un président évacué en France, des institutions paralysées, un premier ministre qui fait comme si de rien n’était. L’heure est grave.

La présidence aura finalement attendu presque 48 h avant d’annoncer aux Algériens que le président n’est pas en Algérie, mais en France pour des examens médicaux, explique-t-on. 48 h c’est un peu aussi le délai qui lui reste pour convoquer le corps électoral pour la prochaine présidentielle.

Comme il y a pourtant des signes qui ne trompent pas, il y a aussi et surtout des questions fondamentales sur lesquelles on ne devrait (doit) pas transiger. Celle qui touche à l'Algérie et sa gouvernance. Doit-on continuer à laisser adouber des présidents et cultiver une façade démocratique décatie ? Reproduira-t-on en avril le coup d'Etat de l'été 1962 ?

Pourtant la seule question qui titille tous les commentateurs est la candidature ou non d’Abdelaziz Bouteflika à la présidentielle. Mais disons les choses comme elles sont. Il est clair que le président n’est pas au meilleur de sa forme. Les images de l’ENTV montrent bien que Bouteflika n’est plus le même homme. Le visage est sans expression, fermé, les mouvements sont lents. Malgré toute la volonté des techniciens de l’Unique de nous le présenter sous les meilleurs auspices, il est difficile, malheureusement, de croire que l’état de santé du président soit bon. Il y a une phrase dans le communiqué de la présidence qui laisse songeur : l’état général du président de la République s’améliore "sûrement". Que veut dire "sûrement" ici ? Et de "façon progressive" ? Qu’il n’a pas recouvré toutes ses capacités ? Peut-être. Il est quand même anormal qu’on joue avec les mots, qu’on cache à trois mois de la présidentielle l’état de santé d’un président non encore sorti officiellement de la période de convalescence depuis juillet 2013. 

Il y a pourtant une exigence implacable pour prendre part à la présidentielle : la présentation d’un bilan de santé qui ne signale pas une maladie grave ou invalidante. Dans l’état actuel des choses il est difficile que le président puisse avancer ce bilan. A moins que son transfert au Val-de-Grâce a pour objectif de lui délivrer un quitus pour un 4e mandat. Mais là encore il lui faudra partir en campagne électorale, parler aux Algériens. Un exercice qu’il n’a plus fait depuis son dernier discours qui remonte à avril 2011. Soit 3 ans. Une éternité pendant laquelle, malgré de nombreux événements majeurs, le président est resté silencieux. Goguenard, diront ses connaisseurs.

Il y a l'ultime avanie : laissera-t-il ses lieutenants battre la campagne à sa place ? Il y a quelques semaines, les alliés traditionnels du pouvoir ont d’ailleurs commencé à sortir un par un du bois pour appeler Bouteflika à se présenter à la présidentielle. Puis, subitement, on n’entend plus personne. Sauf un : Amar Saadani, le représentant d’une nouvelle mafia qui a largement profité des quelque 600 milliards de dollars « investis », dit-on dans l‘économie nationale. Cette faune, habituée aux milliards faciles, ne se laissera pas faire. 

Autant le boulet ne flotte pas, le système n’est donc pas près de changer. La campagne qui se dessine n’est qu’un leurre de plus (de trop ?) dans un pays ravagé par le désespoir. 

Alors, Bouteflika candidat, ou Benflis président, tant qu'il n'y a pas une réelle volonté politique des décideurs de l'ombre de changer de cap, il y a peu de chance que l’Algérie sorte de sitôt de l’économie de la rente et de la prédation. Tout le reste n'est que jeu d'ombres.

Sofiane Ayache

Plus d'articles de : Analyse

Commentaires (9) | Réagir ?

avatar
adil ahmed

merci

avatar
hamid chabi

Qu'a t ont laissé pour le peuple?

Gloire a nos martyres pour l'indépendance, quant je lis l'histoire de ces grands hommes qui ont

tout donné et les autres qui ont tout prit et tout détruit après leurs passage.

visualisation: 2 / 9