Sellal change de cap : 2014 en avant toute ! (1re partie)

Abdelmalek Sellal
Abdelmalek Sellal

Depuis la sortie du président et le réaménagement de l’équipe Sellal, tous les indicateurs économiques sont devenus subitement favorables à une croissance, pourtant toujours dépendante de paramètres exogènes.

Ainsi, il y aurait des logements pour tous les citoyens, il suffit uniquement qu’ils s’inscrivent dans le processus AADL, alors qu’on disait il n’y a pas si longtemps que ce programme n’a même pas réussi à prendre en charge les souscripteurs de 2001 et 2002 (1). Le crédit à la consommation n’est plus un imbroglio dangereux pour l’endettement du citoyen mais pourrait même relancer la consommation qui boostera les activités économiques (2). Un prix du baril de pétrole de 71 dollars suffit largement à l’équilibre budgétaire alors qu’avant le début de l’été, ce même responsable appelait à la rigueur à outrance. (3) etc. La démarche économique n’a pas évolué d’un iota ; on fait tout pour atteindre un objectif politique en avril 2014, une fois l’échéance passée et le but atteint, on remet les difficultés économiques à la charge du citoyen mais ces dernières s’accumuleront aux précédentes pour complexifier encore plus leur résolution. Qu’en est-il exactement ? Pourquoi le programme Sellal qui a pourtant bien commencé a finalement échoué de l’avis même de nombreux experts? Le premier ministre dès son installation, il faut`le reconnaître a tenté de faire bénéficier les membres du gouvernement de son expérience de terrain. Il a en effet dirigé plusieurs wilayas avant de rentrer dans l’exécutif. Dans ce cadre et aidé par des économistes de renom, il a commencé par faire un bon diagnostic de la situation économique de l’Algérie. De son intervention devant les patrons des entreprises privées et du principal syndicat du pays en novembre 2012 il a insisté sur le fait que l’économie algérienne jouit de bonnes performances macroéconomique mais restent médiocres microéconomiquement. Il a enfin identifié l’entreprise comme étant le centre et le moteur de la relance microéconomique du pays. Un tel constat reste valide aussi bien dans la pratique que dans la théorie économique. Sa première circulaire après un peu plus de 100 jours de gouvernance confirme tout cela.

En s’attaquant en premier lieu aux banques tout en s’adressant aux principaux acteurs du circuit économique, il a montre ainsi sa ferme volonté de remettre chacun á sa place. Ainsi les entreprises doivent produire des biens et des services non financiers, les ménages consomment mais devront produire en contrepartie, le marché devra quant à lui servir de lieu de rencontre et d’échange. Les banques reviendront à leur mission doctrinale de collecte de l’épargne pour le redistribuer sous forme de crédit. L’Etat récupérera son rôle de régulateur et de percepteur d’impôts. Dans un tel paysage économique, au demeurant théorique,on peut se rapprocher de l’équilibre sans pour autant l’atteindre pour que toute dépense soit le résultat d’un revenu lequel revenu doit être généré par une production. C’est uniquement en respectant cette équation qu’on s’assure que chaque acteur joue son rôle dans le rouage économique et redonner à l’entreprise l’importance qu’elle mérite. En dépit d’une absence de stratégie claire, indépendante de sa volonté bien entendu, il a réussi avec habilité comme font les bricoleurs managériaux d’associer les personnes ensemble en reconnaissant leur polyvalence. Il mêle trois qualités : la proximité en entretenant un rapport de familiarité avec son environnement comme « Ya si Madjid. Ya si Reda etc.», la connectivité en étant capable d’associer telles et telles ressources : depuis quand l’UGTA tient le secteur prive dans son cœur ? Et la créativité en trouvant des rapprochements ingénieux par des utilisations détournées ; le problème du secteur de l’informel est gênant pour les deux partie mais le premier ministre a été souple pour faire passer son message sur les difficultés de caser les jeunes qui vivent de ce créneau. Il se trouve que toutes les solutions qui mènent á cet équilibre recherché dépendent justement des acteurs économiques qui n’arrivent pas de s’arracher à l’ordre établi du système et y agissent en trouvant leur compte mais au détriment de l’intérêt général même parfois contre leur propre volonté.

1- Un contexte imprévu ne lui a pas permis de réduire la distance sociale 

Il a constaté à maintes reprises qu’il existe une crise de confiance entre les dirigeants et les citoyens. Tout programme économique quelque soit sa tendance et le sien n’en fait pas exception doit impérativement œuvrer primordialement et en priorité pour réduire la distance sociale entre les citoyens et l’administration pour susciter leur adhésion, condition indispensable pour la réussite de sa mise en œuvre. Il se trouve que la crise à laquelle il a fait face lors de la maladie et du transfert de son président à Paris et surtout la polémique et la très mauvaise communication qui s’en est suivies n’ont pas favorisé un tel objectif. Bien au contraire, à quelque mois de l’échéance de l’élection présidentielle, l’absence de Bouteflika de la scène politique sème le doute sur les vrais motifs de la démarche Sellal. De nombreux observateurs ont été forcé de déduire que sa nomination serait intervenue uniquement pour préparer la compagne pour un quatrième mandat au clan de l’actuel président de la république. Le dernier remaniement et les décisions surprenantes de Bouteflika il y a deux semaines devaient confirmer ce qu’on qualifiait de spéculations. Le scandale de Sonatrach, déballé par la justice Italienne et la sortie du procureur auprès du pôle judiciaire de Sidi M’hamed pour lancer un mandat d’arrêt international contre un proche de Bouteflika n’a malheureusement pas arrangé les choses.

2- Le problème du marché informel a été au départ mal appréhendé

L’insistance et les encouragements du secteur privé ont réduit le processus du marché informel à ces vendeurs à la sauvette qui occupent les trottoirs des villes et des villages algériens. Or, les actions du gouvernement menées dans ce sens ont été plus spectaculaires que réellement efficaces. D’abord les moyens matériels et financiers mis pour formaliser ces marchés n’ont malheureusement pas suffit pour endiguer ce phénomène et on constate en conséquence son retour progressif au grand découragement des pouvoirs publics. Mais en s’attaquant de cette manière pour assainir l’économie nationale d’autres dysfonctionnement et pas des moindres sont apparus. Ces derniers ont ainsi montré que ces petits rassemblements de trottoirs ne sont que la face visible de l’iceberg qui s’exprime aujourd’hui dans une informatilisation ouverte de l’économie algérienne, où le processus de trabendisme et de clochardisation de l’économie traverse en long et en large et sous des formes diverses, (corruption, fraude et évasion fiscale, détournements publics…), l’ensemble des secteurs de l’économie (commerce, industrie, agriculture…). Dans les faits, l’activité de contrebande n’est qu’un des aspects de cet informel qui métastase aujourd’hui l’économie algérienne. Dans cet ordre d’idées, la banalisation du phénomène, légitimée en partie par le discours officiel d’une impuissance déclarée de l’Etat de lutter contre l’informel devait plutôt encourager l’expansion du phénomène. Malgré les mesures d’incitation initiées par le gouvernement actuel, le système bancaire national reste obsolète, plus de 100 000 commerçants fraudent le fisc, le taux de chômage de diplômés inquiète sérieusement, le marché informel, lui commence maintenant à menacer la nation dans son existence même, les importations sont exagérées et qu’il va falloir les revoir, la nécessité de contrôler le marché du transfert de devises, le devoir de faire partir les retraités pour laisser la place aux jeunes, nos frontières sont devenues une vraie passoire pour le trafic de carburants, la corruption métastase la société etc. les réseaux de complicité à travers la corruption des personnes qui activent dans tous les secteurs de l’économie nationale qui va des petits bureaucrates en passant par leurs dirigeants, jusqu’aux services de sécurité (police, Douane, armée…) chargés de la surveillance et de la sauvegarde de l’intérêt général. C’est toute une chaîne de personnes qui est ainsi impliquée dans ce processus de corruption qui suce le sang nécessaire au fonctionnement normal du rouage économique du pays.

3- Les mesures prises pour rapprocher le système bancaire du circuit économiques sont à côté de la plaque

Une circulaire fortement médiatisée devait concrétiser les mesures annoncées d’allégement des procédures au niveau des banques c'est-à-dire : facilitation de l'octroi de crédits bancaires et l'accès des PME aux crédits d'investissement. Cette instruction, a été adressée à huit ministères, aux banques publiques et à l'Association des banques et établissements financiers ABEF. Elle prévoit que l'ouverture d'un compte bancaire pour les particuliers se fait désormais seulement avec la présentation d'une pièce d'identité, d'un certificat de résidence et d'un formulaire à retirer auprès des services bancaires concernés. Pour les entreprises, l'opération sera justifiée par des preuves d'identité morale, de statut général de l'entreprise, le numéro d'identité fiscal (NIF) et le numéro d'identité statistique (NIS). En outre, pour faciliter ces procédures, il est décidé la mise en place avec la banque d'Algérie et l'ABEF d'un réseau permettant aux banques de saisir les bases de données du Centre national de registre de commerce (CNRC), des organismes de sécurité sociale et de retraite et des services du ministère des Finances (impôts, domaine et conservation foncière). En somme et sur le fond, rien n’a réellement changé sauf certains papiers d’état civil comme l’extrait de naissance numéro 12.

Tout en s’interrogeant sur l’utilité vital pour un commun des mortels de s’empresser pour ouvrir un compte en banque, pour les personnes repûtées commerçantes, elles restent soumises aux enquêtes fiscales et parafiscales ainsi que leur situation vis-à-vis du CNRC en ce qui concerne le dépôt de leur compte sociaux et c’est exactement les pièces qui alourdissait le dossier bancaire jusqu’à présent. Or, il a été établi que la majorité des entreprises ne respectent pas, voire même contestent les procédures de publication de leurs comptes sociaux et les différentes pénalités ne semblent pas les dissuader. La concrétisation de cette vérification devra attendre jusqu'à la création d’un réseau qui liera les données de ces organismes étatiques avec la banque d’Algérie et l’ABEF sans préciser de délais précis sinon un dead line de janvier 2013,aujourd’hui largement dépassé. Tout le monde avait prédit dès l’annonce de ces mesures, leur aspect phraséologique. Comment peut-on imaginer un seul instant qu’on pourra mettre en œuvre un réseau de plus de 400 000 entreprises qui regrouperait les données de plus de six variables dans un espace de plus 1400 communes en 20 jours. Mais en définitif, tout cela n’est qu’un problème de pure forme car le fond de la question a été esquivée comme toujours et par tous les gouvernements et celui de Sellal, en dépit de son diagnostic appréciable et qui donne de l’eau à la bouche n’a malheureusement pas fait exception. Pourquoi ? D’abord, nous évoluons dans un système économique ou les revenues qui assurent la consommation des ménages sont distribues sans contrepartie de production á travers la rente pétrolière. Or, cette ressource naturelle est tarissable, on devrait s’inquiéter pour sortir de ce modèle dans moins d’une décennie. Ce problème est certainement celui de tous les algériens à l’exception des ceux qui préparent leur avenir et celui de leur progéniture outre mer. De nombreuses entreprises privées qui poussent le premier ministre vers l’ouverture sans retenue en sont le cas. Il fallait aussi dire quelques vérités au secteur privé qui assume une part de responsabilité dans ce gâchis.

Désormais, l’entreprise privée n’a pas réussi à donner d’elle une image réjouissante et surtout militante et patriotique. Même si les bons payent pour les mauvais, le public se méfie du milieu d’affaire privé á travers les nombreuses affaire de corruption (Khalifa, Tonic, Sim etc.) donc il lui appartient á elle de changer son image en respectant les procédures réglementaires du pays et en faisant preuve de créativité et non encrer leur ventouses autour du secteur public pour sucer la rente. Il faut leur signaler qu’elle n’exporte rien et l’Algérie leur offre un marché de consommateur assuré : qui pourra se permettre de ne pas acheter de l’huile pour faire fonctionner Cevital. Si les pouvoirs publics enlèveraient la règle 49/51 au secteur industriel, les privées ne résisteront pas une journée á la concurrence. Si l’Etat devra encore faire un effort pour condenser le dispositif réglementaire afin de le rendre clair et opérationnel, peut être constitutionaliser la relation Etat/entreprise pour plus de sécurité, le secteur privé a tous les atouts pour évoluer dans les conditions normales et montrer ce dont il est capable de faire.

Rabah Reghis, consultant et économiste pétrolier

Renvoi :

(1) Déclaration du directeur de l’AADL lors du lancement du site lundi 16/09/2013.

(2) Voir entretien de Reda Hamiani El Watan du 19/09/2013,

(3) Karim Djoudi, lire Le Quotidien d’Oran du 24/09/2013

Lire aussi : Sellal change de cap : 2014 en avant toute ! (2e partie)

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Commentaires (6) | Réagir ?

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Khalida targui

messakines les journalistes ecrire sur un Sellah un Boutef un Saidani un Ghoul yalatif coment ils font pour pondre leur canard, alors il cherche le cap le trouve et il le retrouve machi mnih ou mnih ils ont madame soleil pour leur tirer les cartes, nous on comprend rien walou bla shour

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ali chemlal

Comme le réve de la fermière au pot de lait (adieu veau vache cochon) Mr Sellal, adieu la lutte contre la corruption, le marché de l'informel, les grans dossiers économiques, vive al àahda rabiaà. Promesse de logements pour tous, distribution de billets de banque, augmentation des salaires de députés et de senateurs, mobilisation des soutiens F L N etc. au lieu de ou va l' Algerie, on dire, l'Algerie est atteinte comme son président de maladie incurable.

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