Depuis quand nos dirigeants tirent les leçons des erreurs passées ? (1re partie)

Khelil recherché, une première. Mais y a-t-i eu un jour un haut responsable arrêté pour sa gestion ?
Khelil recherché, une première. Mais y a-t-i eu un jour un haut responsable arrêté pour sa gestion ?

Le procureur général auprès du pole judiciaire de Sidi M’hamed dans sa conférence de presse a dit ce que l’opinion publique doit savoir et n’a pas failli à son devoir de réserve.

Mais à travers les chefs d’inculpation: «Corruption, trafic d’influence, abus de fonction, blanchiment d’argent et direction d’une association de malfaiteurs et d’une organisation criminelle transnationale», on comprend l’ampleur et la profondeur du mal qui suce le trésor algérien. Cependant, en tentant de donner son opinion, il semble envoyer un message que de nombreux observateurs ont décrypté comme une annonce d’ores et déjà d’un procès classique à l’algérienne. Il minimise le phénomène de la corruption en lui donnant une envergure internationale mais reconnaît la défaillance de la prévention de la part des «responsables à tous les niveaux» il recommande que cette affaire qui n’a même pas commencé «servira de leçon à nos dirigeants» Cela voudra dire que le président de la république qui a ramené ce ministre des Etats-Unis, lequel ministre a failli lui faire signer une loi qui confisque le secteur minier algérien voire même brade la principale entreprise du pays et qu’après cette grave erreur,il lui renouvelle son entière confiance et élargi ses prérogatives sur tout le`secteur de l’énergie, n’assumera pas cette responsabilité devant le peuple. Depuis quand les dirigeants algériens tirent des leçons du passé ?

Quel est le responsable qui a payé pour ses fautes de gestion ? C’est sans doute la raison pour laquelle le soir même de la déclaration du procureur, Chakib Khellil interrogé par le prestigieux journal américain Wall Street s’est montré serein sans aucune inquiétude. Il s’étonne des déclarations faites par le procureur et nie même être destinataire d’un quelconque mandat d’arrêt. Ce comportement est typique chez nos responsables. Prenons l’exemple du gouvernement actuel dirigé par Sellal, réputé proche du président. Dés son installation, il fait un diagnostic de la situation économique du pays fortement médiatisé. Ainsi,on découvre subitement que le système bancaire national est obsolète, 99 000 commerçants fraudent le fisc, un taux de chômage de diplômés qui commencent à inquiéter sérieusement, le marché informel, lui menace l’économie nationale, les importations sont exagérées et qu’il va falloir les revoir, la nécessité de contrôler le marché du transfert de devises, le devoir de faire partir les retraités pour laisser la place aux jeunes, nos frontières sont devenues un vrai passoire pour le trafic de carburants, la corruption métastase la société etc. On apprend aussi et à notre grande surprise que l’Algérie maîtrise parfaitement la dimension temporelle de sa stratégie (01). En cette approche de l’échéance électorale, la prochaine tripartite traitera le crédit à la consommation qui fera le bonheur des banques étrangères. Pour le gouvernement actuel, les hydrocarbures devront constituer le levier essentiel pour assurer tout cela et que le développement économique en perspective doit se faire avec le pétrole, énergie qu’il conviendrait de mobiliser au maximum de sa capacité pour booster encore plus l’économie nationale.(02) Pour lui, parler de l’après pétrole est un discours démagogique qu’on rabâche depuis 1962.Pourtant le discours d’aujourd’hui semble balayer du revers de la main la trajectoire du modèle de développement national pour prendre une autre orientation qui semble tout effacer pour repartir de zéro sans pour autant tirer la moindre leçon des erreurs du passé. Que faisait l’Algérie depuis l’indépendance si ce n’est utiliser le pétrole comme appui au développement national ? Où cela nous a menés ? 

Quelles sont justement chronologiquement les erreurs ? Qui en est responsable ? Sommes-nous en face d’un discours électoral qui ne fera qu’allonger l’économie de rente pour plusieurs générations ?

1- Des origines des erreurs

Contrairement à ce qu’on oubli de dire dans le discours actuel que les premières années de l’indépendance nationale, l’Algérie ne comptait que très peu sur la fiscalité pétrolière. Les hydrocarbures ont commencé à prendre du poids après la nationalisation pour s’imposer d’une manière définitive avec la réorientation de l’économie nationale du début des années 80. Qu’en est-il exactement ? Il faut rappeler que les années 70 ont connu une période où les hydrocarbures servaient d’assise pour le développement de tous les pôles de l’économie nationale dans l’avènement de ce qu’on appelait industrie industrialisante. Elle visait une approche auto -centrée pour qu’à long terme l’économie nationale ne dépendra pas uniquement du pétrole et ce sera justement le secteur industriel qui prendra le relais. Début des années 80, des technocrates fortement influencés par le modèle américain comme c’est le cas de Khelil aujourd’hui, ont procédé à une destruction sous forme d’une restructuration organique et financière de tout le secteur économique à commencer par celui des hydrocarbures censé servir d’appui aux autres secteurs. Cette approche part du principe que plus l’entreprise est petite plus elle est maîtrisable. Mais en éclatant les grandes sociétés nationales, cela a favorisé une cassure du processus intégré et un effritement du savoir et du savoir-faire capitalisés pendant plusieurs années. Cela a vu des efforts et des sacrifices de toute une génération partir en fumée. La première conséquence : la chute brutale des prix du pétrole conjugué à celle du dollar de l’année 85 ont trouvé une économie fragilisée, fortement dépendante de la rente pétrolière et un secteur industriel en décadence. Depuis cet échec, maintenant admis par tous, les gouvernements successifs ne cessent d’être contraints par la rue de cumuler erreur après erreur pour entretenir un climat social qui arrange les affaires d’un système né de cette réorientation de l’économie nationale. Le comble c’est à chaque fois qu’on échoue,on tente de mettre cet échec sur le dos de cette période dite dirigiste alors que c’était la seule qui avait pour objectif de sortir le pays de la dépendance des hydrocarbures. Ne sont-ils pas aujourd’hui en train de conduire le développement économique en naviguant à vue ?

Rabah Reghis, Consultant, Economiste Pétrolier

Renvoi

(01)- sa déclaration de Sellal sur l’échéance d’exploitation du gaz de schiste à l’horizon 2014.

(02)- réunion avec les représentants du patronat et de la centrale syndicale de l’UGTA en novembre 2012

* Pour assurer aux internautes une lecture reposante, nous traiterons le sujet en 3 parties :

1- Cette première partie n’est que la problématique et l’origine des erreurs

2- la deuxième concernera l’erreur du traitement des sureffectifs et de la libéralisation des salaires 

3- parlera des causes de l’absence d’une élite managériale

Lire aussi:

- 2ème partie

- 3ème partie

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Commentaires (6) | Réagir ?

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adil ahmed

merci

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adil ahmed

merci

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