Le procès Betchine contre des éditeurs raconté par El-Watan

Le procès Betchine contre des éditeurs raconté par El-Watan

L’affaire opposant le général à la retraite Mohamed Betchine à quatre éditeurs de journaux, Omar Belhouchet, Abrous Outoudert, Ali Djerri, Mohamed Benchicou, et à Abboud Hichem (les deux dernières personnes citées étaient absentes au procès), refait surface, après cassation par la Cour suprême, et un premier report ; le procès a eu lieu hier à la cour de Constantine.

Seuls les trois premiers éditeurs étaient présents à l’audience puisqu’ayant fait opposition. D’emblée, il faut dire que la cour a été très attentive et respectueuse des droits de la défense. Elle a scrupuleusement observé les questions de procédures soulevées par la défense. De l’avis même des éditeurs présents, hier, il y a eu « un bon procès ». Sachons par ailleurs que le parquet n’a pas fait appel du premier jugement datant du 21 octobre 2000, dont le verdict était l’incompétence territoriale du tribunal de Constantine, et qu’en février 2007, la cour de cette même ville avait condamné par défaut Abboud Hichem à 6 mois de prison ferme et à une amende de 500 000 DA, et les éditeurs à 50 000 DA. A une question du président de la cour, Omar Belhouchet, directeur d’El Watan, dira : « C’est une lettre ouverte provenant d’un ancien capitaine du DRS, faisant état des événements d’octobre 1988. Nous avons publié ce témoignage qui constitue une contribution à l’histoire de ces événements, d’autant plus que les faits de torture en octobre 1988 seront par la suite révélés vrais ; c’est une lettre ouverte constituant un débat. Et d’ailleurs, le plaignant avait la possibilité de nous faire parvenir sa réponse que nous aurions publiée. Il ne s’agit nullement d’un problème personnel ni subjectif. » Le juge a demandé à Omar Belhouchet s’il n’a pas été contacté par une quelconque partie après la publication de cette lettre, ce à quoi ce dernier a répondu qu’il avait reçu ce document par fax, que chaque titre l’avait eu séparément. Ali Djerri, directeur d’El Khabar, confirme le fait qu’il s’agissait également en publiant cette lettre d’une contribution d’un ancien officier de l’armée et également journaliste à El Djeïch. Et d’enchaîner : « Je ne vois pas comment ni pourquoi je ne pourrais pas publier cette contribution provenant d’un témoin direct de ces événements. Ce journaliste a par ailleurs publié un livre en France intitulé La maffia des généraux. » Quant à Abrous Outoudert, directeur de Liberté, il a relevé le fait que cette lettre avait été publiée en octobre 1998, c’est-à-dire lors du 10e anniversaire de ces événements de 1988. Et comme pour souligner que cette lettre méritait d’être publiée, il a rappelé que lui-même avait fait l’objet en 1995 d’une arrestation alors qu’il se dirigeait à l’étranger « pour avoir simplement publié que le plaignant allait être nommé ministre de la Défense ». Rappelons que le parquet n’a pas fait appel, le procureur général, « eu égard à la spécificité de la procédure de ce dossier », selon ses mots, a demandé l’application de la loi. Maître Zoubeir Souidani, avocat de la défense, a soulevé que le débat ne peut porter que « sur la compétence territoriale de la juridiction qui doit connaître l’affaire », et a demandé que « ce dossier soit renvoyé au parquet pour aviser comme il l’entendra, le tout dans le cadre du respect des droits de la défense et du double degré de juridiction, d’autant que le parquet ne peut faire de demande puisque non appelant, l’action publique s’étant arrêtée ». D’un autre côté, sur le fond, il dira : « Les journalistes ne sont pas juges des faits publiés de la lettre ouverte et auraient manqué de professionnalisme s’ils ne l’avaient pas publiée, car il est question d’une contribution à l’histoire récente de l’Algérie qui ne peut être aucunement qualifiée de diffamation. » Il relèvera que d’autres lettres de ce même genre avaient été publiées auparavant, et qu’une contribution de Sid-Ahmed Ghozali sur l’histoire récente du pays a été publiée récemment sous forme d’interviews dans un quotidien national. Aussi, fera-t-il remarquer que « la cour ne doit pas être instrumentalisée de cette manière et que ce n’est pas un lieu de débat sur l’histoire récente de l’Algérie ». L’avocat de la partie civile a réclamé 200 000 DA de dommages et intérêts pour chacun des éditeurs et a insisté sur la nécessité de réhabiliter le plaignant (soit le général à la retraite Mohamed Betchine) qui est désigné du doigt comme étant un tortionnaire de jeunes lors des événements de 1988.

A. Boumaza (El-Watan)

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