L’Algérie face á l’insolence économique du Qatar

Le Qatar de Cheikh Hamad Bin Khalifa Al Thani a les coudées franches en Algérie.
Le Qatar de Cheikh Hamad Bin Khalifa Al Thani a les coudées franches en Algérie.

Cet émirat a une superficie d’à peine 11.571km2 ce qui ne représente que le 3 millième de la surface totale des pays qui le bordent à savoir l’Iran, l’Arabie Saoudite et Bahreïn. Il compte à en croire le Qatar Statistics Authority près de 1,9 millions d’habitants en 2013 dont 80% sont des étrangers venus d’Inde,d’Iran, du Pakistan d’Irak, du Népal, du Bengladesh, du Sri lanka et maintenant des pays Nord Africain dont l’Algérie.

Toute cette population est destinée aux tâches accessoires pendant que les 380 000 Qataris de souche assistés par des occidentaux occupent eux des postes de gouvernance dans les différents secteurs de l’énergie, les banques et le business en général. Ils se retrouvent tous autour de Doha dépeuplant ainsi les autres villages notamment du Nord. Leur politique démographique est d’inciter cette faible population Bédouine à la fécondité. Ainsi depuis plus d’une décennie, la femme nomade infante le double de celle issue de l’immigration soit 4 enfants. La natalité est restée constante durant cette période, autour de 35 naissances pour 1000 habitants. En dépit de l’image sereine qu’il tente vainement de donner à travers le sport et la culture, sa stratégie repose sur la recherche permanente d’un compromis entre les intrigues internes et les grandes tensions régionales qui se cristallisent dans un Golfe arabo – persique, théâtre des conflits entre le grand frère «"saoudien sunnite et l’Iran chiite. C’est ainsi de part sa vision d’un wahhabisme « soft », surtout envers les femmes qui ne sont pas obligées de porter le voile et jouissent du droit de conduire,il a eu à étouffer de nombreux scandales liés notamment à la prostitution. Selon le journal Al-Mayadin, qui a consacré un reportage au drame que vivent les femmes syriennes. Elles sont envoyées via des intermédiaires Qataris au Liban, en Turquie, en Jordanie et dans les pays arabes du golfe Persique. Il s'agit d'une "prostitution" officialisée et tolérée, dans les pays, qui arment et financent la guerre contre l'Etat et l'armée syrienne. A en croire les enquêteurs de ce journal.

Les femmes syriennes sont les premières victimes de la guerre arabo-turco-américaine contre la Syrie : mariage forcé, viol, prostitution, "voilà ce que la guerre de "libération" et de "démocratisation", à l'occidentale, a offert aux femmes syriennes." Et tout cela avec la bénédiction du pays qui n’arrête pas de multiplier les démarches diplomatique jusqu’à organiser plusieurs conférences chez pour demander au monde d’armer les rebelles contre le régime officiel de la Syrie. The Financial Times, un journal britannique de renom, a lui aussi révélé un scandale de Salwa Hamad bin Jassim, la fille du premier ministre Qatari et qui a été surprise par les services de sécurité en compagnie d’un occidental dans un lieu de rendez-vous mondain et soupçonné de terrorisme. L’appartement qui est détenu par la fille du Premier ministre qatari, a soulevé quelques interrogations sérieuses sur les normes morales de la jeune femme et la nature de ses activités lors de ses visites au Royaume-Uni.

Bien que l’ambassade du Qatar a essayé d’empêcher que le scandale voie le jour en offrant 50 millions de dollars au journal, il a catégoriquement refusé. Le Cheikh Al Thani lui-même est mêlé à une affaire en France de traite de blanches avec le Maroc. A cela s’ajoute le caractère historiquement turbulent d’une famille où le règne s’est toujours concrétisé d’une manière sanguinaire par des coups d’Etat. C’est donc cette jeune génération libre parfois inconsciente qui vient de l’emporter puisque aujourd’hui même l’émir, cheikh Hamad Bin Khalifa Al Thani, vient d’annoncer son abdication au profit de son fils Tamim âgé de 33 ans. Le jeune prince s’est aussi lancé dans le sport et a eu à occuper le poste de président du Comité national olympique qatari qui l’a propulsé pour devenir, en 2002, membre du Comité international olympique.

En 2011, le jeune prince héritier s’offre le prestigieux club parisien, le PSG, grâce à son amitié avec l’ex-président Nicolas Sarkozy. Les indiscrétions Occidentales et notamment Françaises le présente comme libertin et extrêmement tourné outre mer. D’autre part son approche de l’économie relève de l’insolence. Il encanaille les dirigeants des pays autocratiques en leur offrant des possibilités de blanchir l’argent mal acquis dans l’immobilier au Qatar. La semaine dernière l’émirat a annoncé disposer de 120 milliards de dollars à investir en perspective dans le monde. Dans ses ambitions, le`Qatar recherche des zones en difficultés économiques et fortement demandeuses d’investissement étrangers pour lui permettre d’effectuer des placements sûrs et attractifs. Ce que oubli les Algériens qui foncent tête baissée avec ce pays, c’est que leur relation particulière avec la France date du début des années 70 lorsque Georges Pompidou les a aidé pour la réalisation de leur complexe sidérurgique. Leur tout premier gros contrat en partenariat date de 1975 avec la société « charbonnage de France » pour la construction de deux vapocraqueurs l’un à Doha et l’autre à Dunkerque. Si Hollande se permet deux voyages en une année de règne c’est qu’il est dans les secrets des dieux. A peine quelques jours après son départ, l’émir passe le flambeau à son fils. S’agit-il d’une présence à la passation des consignes ? Il faut signaler d’emblée que les investissements qataris sont d’abord des placements purement financier qui devraient profiter avant tout à lui-même mais très peu de bénéfices en terme d’économie réelle pour le pays hôte et ce,à commencer par la création d’emploi. Dans ce domaine précis, le Qatar recherche d’abord des revenus sûrs de ses investissements et le prestige d’appartenir aux grands groupes internationaux. Ceci explique sa présence dans les grands fleurons de CAC 40 (Total, Veolia, Lagardère Areva etc.). Sa popularité, il la doit au rachat du club Paris Saint Germain ou encore à son association dans la course hippique du «Prix de l’Arc de Triomphe». Il faut dire que finalement le Qatar tire son profit de l’amertume des pays en crise. Il guête l’opportunité lorsque la souveraineté du pays hôte est en jeu. Ainsi, les investissements dans les banlieues pour lesquels un partenariat franco-qatari a été mis sur pied posent un problème de souveraineté, récurrent avec les interventions des ONG de toutes origines, que le gouvernement français ne tranche pas, comme c'est son rôle. En Algérie, depuis que les grèves et les protestations diverses se concentrent dans le Sud du pays, les qataris multiplient les visites et affichent leur intention d’investir dans l’exploration pétrolière et minière. Capter le mécontentement est devenu leur spécialité. Pourtant tout le monde sait le Qatar abrite un bureau des talibans et entretient des liens avec les mouvements islamistes Ennahda de Tunisie et le Hamas palestinien. Il a pour ligne diplomatique de "parler avec tout le monde".

Le Qatar est aujourd’hui le principal bailleur de fonds d’une nébuleuse associée aux Frères musulmans. Plutôt que d’encourager la vision d’un islam piétiste et spirituel. Ne va-t-il pas de la même manière appuyer dans les pays qu’il fréquente le modèle d’un islam- étendard revendicatif ? N’y a-t-il pas là un risque de captation de l’islam au profit d’une vision politisée de celui-ci ? Les responsables qataris tentent vainement d’expliquer leur neutralité politique mais de nombreux faits les trahissent, entre autres la ligne éditorialiste de la chaîne Al Djazira et son Mufti d’origine égyptienne El Karadaoui. En Algérie, les investissements s’élargissent de jour en jour. Après la téléphonie, ils passent à la sidérurgie et le fleuron pétrochimique que les Saoudiens n’ont pas pu obtenir mais vider l’Algérie de ses cadres formés aux Etats-Unis à coup de devises. Outre le lancement d’un complexe sidérurgique à Bellara (Jijel) et d’un complexe de production d’engrais à Souk-Ahras, le partenariat algéro-qatari se développe également dans les télécommunications. Dans ce domaine précis et sous un silence troublant du gouvernement actuel, il y a eu une reconfiguration du capital actuel Watania Télécom, propriétaire de la licence de téléphonie mobile Nedjma. Ainsi, l’augmentation de la part de la société de télécommunications qatarie Qtel est passée de 52,2% à 92,1%. Notons que le groupe Qtel, dont le siège se trouve dans la capitale qatarie, est une société de télécommunications internationale largement présente dans le Moyen-Orient, l'Afrique du Nord et le Sud-Est asiatique. Elle comptait près 85 millions d'abonnés jusqu'en avril 2013 et regroupe des sociétés de Télécom pionnières. Maintenant, ils s’intéressent à l’or de Tirek - Amesmessa, après l’escroquerie du partenaire australien avec Sonatrach.

En dépit des assurances données par le ministre des affaires étrangères dans une interview qu’il a accordée au quotidien d’Oran en 2011, le déplacement à plusieurs reprises du président de la république au Qatar (alors qu’il se déplace très peu ailleurs) déroute sur le contour trouble de sa relation avec l’Algérie. Il a abrité encore une fois et durant la même année un événement majeur de réputation mondiale pour les industriels du pétrole et du gaz. C’est pour la première fois que le congrès mondial du pétrole se tienne au Moyen Orient depuis sa création en 1933. Plus de 5000 délégués représentant prés de 60 pays ont été présents. Le Qatar en tant que pays organisateur n’a pas raté l’occasion de faire un travail de coulisse pour la mise en œuvre de ses intentions de ratisser large sur le marché du gaz. Les observateurs ont remarqué qu’il n’y a jamais eu de résultats concrets de toutes les rencontres qui se sont tenues à Doha. Durant la dernière rencontre s’est tenu à Doha les 15 et 16 novembre 2011 en présence de chefs d’Etat,les résultats ont été simplement des ronrons, eu égard à la problématique générale de la commercialisation du gaz naturel dans le monde. La poignée de main entre Bouteflika et Abdeljalil de Libye sous "les bons soins" du Cheikh Hamad Bin Khalifa Al Thani, a été plus médiatisée et semble plus importante que le contenu des points inscrits à l’ordre du jour. Pourtant, de ce statut du Forum des Pays Exportateurs de Gaz (FPEG), les observateurs s’attendaient de ce premier sommet de Doha à des montages de partenariat, de création d’instrument de capitalisation, de consolidation d’expérience et de formation. Mais aucune de ces questions n’a été sérieusement examinée. Par contre, chacun surveille l’autre sans engagement et surtout en gardant jalousement sa part de marché.

Les grands exportateurs comme l’Iran, la Russie et le Qatar tentent d’imposer leurs idées d’exporter au maximum et de garantir des débouchés sûrs et stables donc orienter tous les membres en dehors des contrats à long terme qui logiquement les arrange pour diversifier leurs clientèles afin de rester puissant sur le marché gazier. En d’autres termes, une forme de leadership comme le fait l’Arabie Saoudite au sein de l’OPEP. Ils se doivent de rester compétitifs non seulement par rapport aux autres sources d’énergie mais aussi aux autres pays. Le Qatar spécialement vise l’Europe de l’Ouest pour chasser sur les terres de l’Algérie. A la limite, la Russie et l’Iran se contentent de leurs marchés traditionnels. Le premier par exemple s’est toujours intéressé à l’Europe de l’Est et celle du Nord. L’Algérie et les autres petits producteurs cherchent à défendre le prix de vente de leur gaz et les indexer aux produits concurrents et d’en tirer le maximum possible pour le développement de leur pays respectif. Ils ne pourront le faire qu’avec des contrats long termes dans lesquels le prix et les formules de leur révision sont fixées à l’avance et participent aux investissements. C’est justement ce que refuse les Qataris en créant des barrières dans les principales places par casser les prix. Alors si tout les pays notamment occidentaux mettent ce pays à l’indexe malgré le recyclage énorme des pétrodollars dans leurs banques, on peut se demander que lui trouve l’Algérie qui ne reçoit aucun centime.

Rabah Reghis, consultant et Economiste Pétrolier

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Commentaires (27) | Réagir ?

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adil ahmed

merci

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adil ahmed

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