La stratégie de transition démocratique de Benbitour

Ahmed Benbitour est lancé à l'assaut de la présidence avant les autres.
Ahmed Benbitour est lancé à l'assaut de la présidence avant les autres.

À l’occasion des Présidentielles de 2014, les Algériens se retrouvent encore une fois confrontés à l’inépuisable espoir de la normalisation de la vie politique, qui est en permanence confisquée par l’autorité militaire. À cette occasion Ahmed Benbitour propose une stratégie de contournement de cet obstacle par les urnes, pour restituer le pouvoir aux civils et instaurer une véritable démocratie.

Depuis l’entrée officielle de l’Algérie dans le processus de transition démocratique, suite à la révision de la Constitution en 1989, qui a permis l’ouverture du champ politique au pluralisme, la situation reste toujours bloquée à cet instant fondateur, par la reconduction indéfinie de l’échec de la normalisation politique. L’occasion des Présidentielles 2014 ne déroge pas à la règle et les annonce déjà sous la crainte de ne pouvoir voir se réaliser l’inépuisable espoir d’une amorce de normalisation politique. 

Cette situation est à imputer pour l’essentiel à l’institution militaire qui se présente comme une force prétorienne au service de ses chefs, qui font et défont les pouvoirs pour la seule motivation du maintien de leur hégémonie politique sur la société. Elle se place donc au-dessus des institutions civiles et occupe des fonctions différentes de celles de défense nationale contre la volonté populaire. 

L’institution militaire joue de manière permanente le rôle de parti politique de substitution, par le truchement du FLN, en affaiblissant les capacités politiques des partis d’opposition. Elle a étendu son rôle professionnel de la défense nationale à l’ordre intérieur en contrôlant l'État et en maintenant l'ordre dans la société. Cette expansion de rôle a empêché le développement d'institutions civiles. Dans ces conditions, le principal défi qui se pose au processus de transition démocratique est d’arriver au contrôle de l’armée par des civils pour permettre à la société de s’organiser et d’élire librement ses représentants. Or, l’intrusion de civils dans les affaires internes de l’institution militaire est perçue comme une ingérence étrangère à son corps constitué. L’image que se fait l’armée d’elle-même est de se considérer comme intouchable et comme le seul représentant légitime de la révolution de Novembre, en s’auto proclamant en tant que « famille révolutionnaire », dont l’image est profondément enracinée dans l’histoire nationale et les traditions militaires. Au point de passer pour un traître pour quiconque s’aventure à contester cette image hégémonique, devenue au demeurant presque sacralisée.

Quelle stratégie adopter donc pour vaincre la résistance des militaires à se soumettre au commandement d’un gouvernement civil démocratique. La question revient au même, si on se la pose à soi-même, en tant que citoyens assoiffés de liberté et de dignité. Quelle stratégie adopter pour vaincre la résignation et la fatalité dans laquelle nous sommes reclus devant l’immensité de la tâche à accomplir, pour nous libérer de l’aliénation de cet enchaînement qui fait de nous des soumis à l’ordre militaire et dépourvus de toute souveraineté.

C’est ce que tente de faire apparemment Ahmed Benbitour à travers son initiative de changement pacifique du système de pouvoir, en s’appuyant sur les expériences de transitions démocratiques de pays ayant réussi ce pari semé d’embûches, a priori insurmontables. Tels que, les pays d’Amérique Latine, d’Europe du Sud et de l’Est et même d’Afrique, qui ont fini par rendre à leurs peuples la justice sociale, la liberté, la dignité et la souveraineté, en réalisant la transition démocratique par le transfert du pouvoir de l’autorité militaire aux civils. La stratégie de transition démocratique adoptée par Ahmed Benbitour repose effectivement sur ces expériences, adaptées à la particularité de la situation algérienne. 

L'expérience de ces pays dans la mise en application d'un plan de transition démocratique, appliqué lui-même à l’armée, montre que le succès d’une telle initiative, dépend de nombreux facteurs. 

Le facteur inconditionnel pouvant rendre cette transition démocratique possible est la mobilisation des forces du changement autour d’un projet de démocratisation, dont le consensus et la cohérence interne doivent être sans failles pour pouvoir vaincre la résistance de l'armée. Car, l’existence d’une forte coalition politique très structurée et ancrée profondément dans la société n’est pas sans influencer la résistance de l’armée à se soumettre à la réforme que cette dernière lui imposerait. Ahmed Benbitour parie à cet effet sur l’éveil politique du peuple et le retour de l’élite de la démission pour espérer atteindre cet objectif dans une coalition nationale ouverte à toutes les forces du changement. 

C’est par les urnes et la mobilisation massive des électeurs pour empêcher la fraude, que cette coalition représentative de la volonté populaire pour le changement compte arriver démocratiquement au pouvoir et s’imposer aux militaires. À ce jour, une mobilisation considérable est en train de se faire autour de cette initiative. Des cercles de soutien apparaissent de jour en jour sur les réseaux internet et l’adhésion est tout autant massive à ces cercles de soutien. Ce sont généralement des universitaires, des étudiants ou une élite constituée des professions libérales tels que, des médecins, des avocats, des cadres de l’administration ou d’entreprises publiques, ou de simples citoyens. Dans l’éventualité où la fraude venait à se reproduire, malgré cela, la mobilisation autour de cette initiative pourrait se prolonger dans la forme d’une contestation pacifique illimitée, jusqu'au rétablissement de la légalité. Car la volonté de cette initiative est celle d’un peuple uni autour d’un leadership, qui ne laisserait aucune place au bricolage politique des militaires.

Dès lors que cette première étape aura été accomplie, se pose la question de comment vaincre la réticence de l’armée au contrôle gouvernemental démocratique civil. Encore une fois, l’expérience des pays ayant réussi la transition démocratique montre que la réticence de l’armée sera vaincue principalement par la perception de compétence du leadership de la coalition civile dans des tâches essentielles. Cette compétence est exprimée dans des facteurs comme la vision en profondeur du développement de la société, la stratégie pour la réaliser, les opérations et les tâches spécifiques à accomplir, y compris pour ce qui relève de la qualité d’un plan de réforme militaire pour la réalisation du changement dans l'armée par l’amélioration de son cadre professionnel et de la revalorisation du statut de son personnel. Car, pour les militaires, il n’y a rien de plus important pour le rétablissement de leur dignité institutionnelle que la professionnalisation militaire. 

La démocratisation de l'armée ne peut être effectuée efficacement que s'il y a un contrôle politique clair et ferme par le pouvoir civil. Ce contrôle politique implique la démobilisation de l'armée et la restauration de l'autorité de civils au pouvoir. Dans ce cas, la coalition de démocratisation devrait montrer aux militaires les effets positifs des politiques de démobilisation et les effets négatifs des rôles et fonctions non professionnelles (Sécurité intérieure et police politique). La redéfinition institutionnelle de l'armée comme un atout national dépendra de cette démobilisation. La réussite de redéfinition du rôle et la capacité du leader politique à maîtriser efficacement la résistance militaire, par la professionnalisation de l'armée, signifie la dépolitisation de leur chaîne de commandement et la réorientation de leur mandat de l'ordre interne à la défense nationale seulement.

Pour achever la transition démocratique, le nouveau pouvoir civil doit introduire un changement constitutionnel quant au contrôle politique présidentiel de l'armée, en lui octroyant la capacité de nommer le haut-commandement dans chacune des forces et de pouvoir forcer la démission de ses membres, hostiles au changement en les remplaçant par des cadres loyaux. Mais ce contrôle politique serait inefficace s'il n’est pas complété par une direction forte pour la professionnalisation de l’armée, fournie par l'autorité civile. Pour cela, le plan de transition démocratique d’Ahmed Benbitour se fonde principalement sur la restructuration du noyau sur lequel repose le système de pouvoir militaire : "la modernisation de l’armée avec la définition d’une doctrine militaire […] Une vision stratégique et intégrée entre les cinq dimensions : militaire, diplomatique, économique, culturelle et informationnelle […] Dans ce modèle, l’armée devient une institution qui agit en partenariat avec les autres institutions de la République dans un environnement caractérisé par la transparence et la responsabilisation." 

De l’ouverture du débat avec les cadres de l’armée disposés au changement autour de ces deux facteurs cruciaux, qui sont la professionnalisation de l’institution militaire et la constitution d’un pouvoir civil porteur d’un projet de développement intégré de la société, dépendra la réussite de la transition démocratique et le transfert du pouvoir des militaires aux civils. 

Youcef Benzatat

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Commentaires (10) | Réagir ?

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Khalida targui

quand vous parlez de l'armée, il faut préciser qu'il y a les generaux pourris, les cadres qui leur obeissent bessif et les soldats qu'on mene à la baguette, il faut couper la tete à l'armée algerienne pour sauver le bled c'est tout et c'est à l'interieur que la revolte pourra se faire, chiche y-a-t-il encore des officiers qui aiment un chaoui leur pays pour se dire bezaf y-a n'a marre c'est facile pourtant c'est eux qui commandent les troupes

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Arthur François

Je suis de votre avis, j'ajoute que pouvoir actuel détient " le couteau "qu'il a acquis illégalement et qu'il n'ai pas prêt à le lâcher démocratiquement, parce qu'il ne voudra pas se faire tuer avec en attendant c'est lui qui nous tue.

S'il y a au sein de l'armée Algérienne des hommes intègres qu'ils arrêtent la dérive, le peuple suivra s'ils attendent que ce même peuple commence alors il n'y aura que du statu quo, et notre pays meurent tous les jours un petit chouia.

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oziris dzeus

Mr Benbit, en 2000 vous avez été ministre de boutef. Boutef est il un civil ou un militaire? ya quelque chose qui va pas dans vos arraisonements. et puis pourquoi encore 15 ans de transition?. 15 ans est un contrat militaire. on n'est pas sorti de la caserne pour sitot. mr benbit tu es comme boutef. tu fais parti du systéme boutéfien et tu veut le faire durer encore 15 années en attendant un autre qui parlera de 15 autres années de transistion en 2030. mais tu prend les algériens pour des alliénés. benbit tu est un disciple du gourou et tu joue ton rôle a merveille. les algériens te donne le rythme selon ta propre danse. benbit tu va faire le con encore longtemps? si tu est sincére () dit que les 15 ans de boutef sont une perte de temps et d'argent pour l'algérie et qu'il fallait soutenir zeroual au lieu de devenir ministre de boutef. ton programme n'est basé sur rien de concret, tes dires sont ceux de boutef en 1998et 1999. tu va faire quoi appliqué les résolution du congrés de la soummam ou mettre en oeuvre l'appel du 1er novembre. benbit rentre chez toi et boutef fera de même. tu n'est qu'un liévre pour boutef S. l'algérie est devenu en 1999 BOUTEFLAND avec le soutien de la france et boutef est allé au val de grâce pour avoir le soutien et le parrainage de la france pour son cadet S qui est maintenant prét a devenir locataire a vie d'elmouradia, surtout aprés avoir été (impliqué) dans sonatrach 2. on ne devient responsable dans le BOUTEFLAND que si on a un dossier noir. et il serait surprenant que toi benbit tu puisse avoir un dossier noir. donc le clan de malheur te fait joué le liévre dans cette course 2014 et il y a aussi les rabateurs.

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