"Amoureux-nés" ou l'harmonie des contraires

La couverture du roman de Mohand-Lyazid Chibout alias Iris.
La couverture du roman de Mohand-Lyazid Chibout alias Iris.

Y a-t-il un âge pour aimer ou un autre pour détester ? Y a-t-il un âge pour s’aimer ou un autre pour se détester ?

La lecture d’Amoureux-nés d’Iris (nom de plume de Mohand-Lyazid Chibout) paru aux éditions Edilivre nous enseigne beaucoup sur cet état d’esprit à l’instant T épris d’une passion folle à l’égard de celui s’égarant dans l’obsolescence des sentiments car confronté aux aléas de la vie des temps modernes. Laissant confronter amour loyal rêvé à celui chimérique vécu, l’auteur cherche par son verbe à équilibrer la part des choses en s’adonnant à la virtuosité de ses penchants, d’où l’ambiguïté dans l’emploi des méthodes contraires à la quête du bonheur. L’obéissance et l’obédience portent leurs noms dans une partie d’un cœur tout en entraînant l’autre dans la transgression et l’indocilité.

Père décédé, mère désabusée, Mélyssa plonge dans des confusions de sentiments à la recherche d’un grand amour pouvant remplacer celui de son père, cet amour à la fois protecteur et charnel pour son âge... nubile. La monotonie de ses jours ombrés l’ont amenée à faire la connaissance d’un jeune étudiant croisé dans les halls de sa faculté. Ensemble, et sur ce chemin de la loyauté bordé de sincérité et de projets communs, ils se sont conquis. De leur connivence née avant l’heure, une passion a germé à la merci de leurs ententes morales et physiques, bien que leur passé ait été douloureux. S’adonner à cette passion qui les habite et s’éprendre l’un de l’autre de cette frénésie sans nom, durable de surcroît, qui les maintient en vie, plonge chacun d’eux dans la connaissance d’autrui au point de tolérer les défauts. Tout le sens de leur amour est là. Toute la philosophie de leur amour se résume dans "simplement aimer en répondant à l’arborescence de leur spontanéité sans fard ni retard. Mélyssa disait qu’avec toi, j’ai tout, et Micipsa répétait "Sans toi, je n’ai rien". 

Etudiants tous les deux, la présence de l’un aux côtés de l’autre est imparable, mais, en répondant à quelques caprices féminins, Mélyssa tente maintes fois de fuir la monotonie pour à la fois pimenter leur relation et inciter son amour à se manifester plus qu’il ne l’était. Cette attitude dérangeait Micipsa, et plus les jours passaient, plus il sentait que Mélyssa l’échappait. Elle dans son coin à se nourrir d’idées saugrenues en laissant le temps moisir ses pensées et leur relation, et lui dans ses recoins à noircir ses pages vierges, ce refuge auxiliaire auquel se livre une âme sensible, d’où leur amour en déliquescence. Même les mots pleins de sens de sa maman évoquant la politique abrupte à laquelle se livre le régime en menant le pays à son naufrage et à sa ruine, ou d’autres sur la philosophie de la vie n’ont pas apporté de positif à sa fille. (…) Ces petites négligences et ces petits détachements progressifs de ma part sont venus pour te pousser toi, à ton âge, à juger les hauts et les bas de la vie, à chercher et à attendre des égards et des soins, non seulement de ta mère mais aussi de celui qui prendra en mains, consciemment et intelligemment, tes égarements, d’être prudemment à la recherche des admirations masculines. On est tenté par notre inclination humaine, il n’y a pas de mal à cela, mais quand on est considérée tel un objet de plaisir sous des yeux qui nous imaginent automatiquement au lit, là ma fille est le pire de toutes les humiliations. Il est si doux, si consolant de parler de ce qu’on aime et avec qui on aime. La femme, la trentaine passée, voit son visage dans les reflets de son mari, contrairement à son âge ingrat, ses contours ronds et bien proportionnés ont été portés vaniteusement. C’est par amour du jeu qu’elle tombe dans le jeu de l’amour. A mon âge, je me juge de cette inconséquence morale comme une bassesse mais point de regret dans mon tréfonds car sans ça, je…

Ce qui est beau dans ce roman est cette faculté de son auteur ayant su et pu ménager l’amour au détriment de tout. Dire que ce qui est semé à la bonne saison se cultive à la bonne saison, et que les mots ne changent rien en nous tant que nous ne pourrions changer ce qui est déjà en nous. Lire les oeuvres d'Iris, autrement dit Mohand-Lyazid Chibout, est une chose, mais les adopter et les adapter en nous relève de cette faculté propre de soi de s’immiscer dans chacun de ses mots venant nous épargner des maux auxquels s’exposent nos instincts cloîtrés. La conscience et la réalité se réveillent et s’entremêlent dans cette chute : "Mélyssa, tu es la fleur de mon âge / La fleur de tous les âges."

R. N.

Amoureux-nés, d’Iris. Editions Edilivre, juillet 2010. 356 pages. 21.00 €.

D’autres œuvres d’Iris :

Traduire un silence, aux éditions Sefraber, mars 2010. 284 pages. 18,50 €.

La finitude (La haine de soi), à paraître aux éditions Kirographaires. 316 pages. 21,95 €.

Plus d'articles de : Culture

Commentaires (1) | Réagir ?

avatar
karim haddad

Par Lina Amiri | avril 10, 2013 11:40

Cheikh Chems Eddine,

4462

2

37

1

Google +

Abonnez-vous à notre Newsletter

Réagir :

Étonnant

Stimulant

Drôle

Inquiétant

Passionnant

Insensé

Important

Étrange

Suivre : Algerie, Cheikh Chems Eddine, Jil FM, mariage des enfants, pédophilie

La polémique commence à enfler en Algérie après l’intervention très remarquée du Cheikh Chems Eddine, imam et animateur d’une émission religieuse sur la chaîne Ennahar TV dans une émission de la chaîne Jil FM, de la radio algérienne. Ce dernier est allé jusqu’à justifier une relation entre un adulte et une fillette de 12 ans !

Le mariage des enfants est interdit en Algérie, mais pour le Cheikh Chems Eddine, ce n’est pas si simple. Être mineur n’empêche pas d’être dans une relation amoureuse et même il justifie ce type de mariage par des explications scientifiques et morales. Invité dans l’émission Derba de la radio Jil FM, l’imam a assumé des propos surprenants il y a deux jours, rapporte le quotidien L‘Expression. Interrogé par l’animateur de l’émission, Brahim «Irban» sur l’histoire d’un homme de 37 ans qui se disait amoureux d’une jeune fille de 12 ans, ce dernier a défendu le cas de cet Algérien, «Il y a une explication scientifique pour cet amour entre cet homme de 37 ans et cette fillette de 12 ans. Lui, il a 37 ans dans le corps, mais dans l’esprit il a peut-être le même âge que la fille», a expliqué l’homme religieux au micro de Jil FM.

Et d’ajouter, «il se peut qu’il soit adulte même dans son esprit et que cette fille de 12 ans soit mûre. 12 ans, mais c’est une femme ! S’ils s’aiment tous les deux. Dans ce cas, si ses intentions sont sincères, c’est-à-dire qu’il la veut pour épouse, je ne vois pas de contrainte à ce genre de mariage. » L’imam pourtant connu pour ses conseils religieux à la télévision ne s’est jamais dérobé et a assumé ses propos jusqu’au bout. «Je parle comme ça parce que je suis sûr qu’il aime sincèrement cette fille et sans arrière-pensée, avec comme objectif le mariage. »

De son côté la Direction de Jil fm a diffusé un message officiel pour prendre ses distances, par rapport aux propos du Cheikh. » La Direction de Jil FM tient a faire cette mise au point. Conscient de la responsabilité que nous avons auprès de nos auditeurs et de la mission de service publique de notre chaîne, nous tenons préalablement a nous excuser auprès des auditeurs sur les propos tenus par l’invité et qui ont pu choquer certain même si l’intention n’était pas de défendre ou de prendre à la légère le témoignage d’un auditeur sur une situation délicate. Il n’a jamais été question dans cette émission de porter atteinte à la sensibilité ni a heurter les auditeurs sur un sujet aussi grave sur la protection de l’enfance «, a précisé la radio.

Il est difficile de croire qu’à l’âge de 12 ans, cette fille peut-être considérée comme une femme. Le mariage des enfants, interdit en Algérie et dans de nombreux pays, continue malheureusement d’être pratiqué dans de nombreux pays. On estime à 70 millions le nombre d’enfants (âgés de moins de 18 ans) forcés à se marier alors qu’ils n’ont pas atteint l’âge adulte. Et pourtant il s’agit d’un véritable fléau, les fillettes, qui sont les plus concernées, mariées trop jeunes courent souvent vers l’échec scolaire. Même leur santé est mise à mal, car elles se retrouvent très vite mères alors qu’elles n’ont même pas quitté l’enfance, et rencontrent des complications.