Oui, mais comment convaincre la population, M. le président ?

Oui, mais comment convaincre la population, M. le président ?

Le pouvoir réalise le prix du mensonge. Combattre le terrorisme n'étant pas seulement affaire de logistique et de tactique militaire, mais d'abord celle d’un vrai soutien populaire, il observe qu’il ne l'a plus. Aussi cet appel d’Abdelaziz Bouteflika, ce samedi 22 mars au colloque international sur le terrorisme qui se tient à Alger, à la société de s’impliquer, sonne-t-il comme un aveu d’impuissance. Car comment convaincre la population, M. le président ? Vous n'avez plus pour elle de vrai projet politique post-terrorisme et elle n'a plus pour vous la confiance vitale : à quoi, dit-elle, ont servi les années rouges sinon à réduire davantage le champ démocratique et à enraciner le népotisme et la corruption ? Ajoutons à cela que l'ardeur populaire des années 90 a été démolie par l'ingratitude du régime et, surtout, par la « réconciliation nationale. » Le pouvoir algérien a fait le plus mauvais usage de la mobilisation populaire de la précédente décennie. Il ne l'aura plus jamais.

Et puis, il y a le prix du mensonge. Comment être écouté quand on appelle à la vigilance en juillet 2007 après avoir ressassé durant cinq ans que le terrorisme était vaincu ?

En vérité, le pouvoir est structurellement et idéologiquement inapte à mettre fin au terrorisme. Pis : c’est le pouvoir qui, en traitant avec les tueurs, redonne, régulièrement, son second souffle au terrorisme.

En choisissant de s’installer en Algérie, Al Qaeda a choisi l’État le plus faible. Il faut croire, pour une fois, les dirigeants algériens quand ils avouent leur perplexité, de la bouche du ministre de l’Intérieur, Yazid Zerhouni, ou du chef de la police, Ali Tounsi : le régime grabataire algérien est incapable de contenir le terrorisme d’Al Qaeda. Coupé de sa société, il ne bénéficie plus de l’apport de la population dans la traque des terroristes, comme c’était le cas dans les années quatre-vingt-dix. Corrompu, livré à des mafias de toutes sortes, il a laissé se développer des réseaux parallèles par lesquels transitent les arsenaux terroristes qui peuvent à loisir faire entrer des hommes, des armes ou même des camions bourrés d’explosifs. Traversé par des courants mafieux qui ne songent qu’a s’éterniser autour de la rente, il n’est obsédé que par sa survie, et prêt à toutes les capitulations pour se maintenir à la tête du pays. Et c’est ce qu’il fait : en dépit de son impuissance et pour rester au pouvoir, il ne cesse de tendre la main à la seule force qui le menace, les groupes armés islamistes, affichant une vulnérabilité et une aptitude constante à l’abdication dont se nourrit Al Qaeda.

La vérité est que le terrorisme ne sera vaincu en Algérie qu’avec le départ de ce régime.

Le Matin

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Commentaires (18) | Réagir ?

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mikah fiad

Du haut du somment, on voit en bas deux types de societé civiles:Il y a celle qui se manifeste a chaque fois qu'on a besoin d'elle afin d'apporter les soutiens necessaires aux causes injustes. Mais celle ci elle est bien fictive :fabriquée de toute pieces et toujours presente. Il y a l'autre societé :celle là est bien reeelle qui ne repond qu'aux appels des causes justes. Mais comme ces appels actuels ne sont pas dignes de foi :il ne faut pas s'attendre à une reation!

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Yusf Aqaciwali

Cet article est parfait comme réponse à cet appel à la société civile. Cependant l'appel en question ne s'adresse qu'à "la société civile" reconnue comme telle, non pas par nous autres ghachi, mais par ceux qui ont les clés de répartition distinctive des habitants de Algérie. En d'autres termes il s'agit là d'un appel pour renforcer la lutte contre les opposants à l'instauration d'une dynastie néocalifale. La société civile à laquelle on s'adresse c'est bien celle là qui est désignée comme telle non pas pour son statut naturel mais pour son statut conjoncturel de société acquise à la politique des deux mandats et des suivants pour parachever l'ouvre en cours. Inutile donc de répondre, nous ne sommes pas concernés. El hadra bin thnin ou thaleth wach dekhlou?

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