L’après In Amenas et la question de l'approvisionnement gazier de l'Europe

La sécurité de l'approvisionnement gazier se pose désormais avec acuité.
La sécurité de l'approvisionnement gazier se pose désormais avec acuité.

Les évènements récents d’In Amenas-Algérie- doivent être sérieusement médités. Car, il semble bien que les autorités algériennes assistent passivement aux nouvelles mutations énergétiques mondiales qui ont un impact stratégique sur son devenir.

98% d’exportation d’hydrocarbures à l’état brut et semi-brut à la fin de 2012 et 70% d’importation des besoins des ménages et des entreprises qu’elles soient publiques ou privées, le tissu productif étant en déclin (moins de 5% de l’industrie dans le produit intérieur brut). L’utopie serait de ne pas tirer les leçons de ces évènements tragiques et de ne pas tenir compte tant de la concurrence internationale, des nouvelles filières mondiales répondant à un nouveau modèle de consommation segmentée et de vouloir revenir aux schémas mécaniques dépassés des années 1970. Je recense cinq contraintes qui ont un impact sur le devenir énergétique de l’Algérie.

1. La première contrainte est le projet algéro-italien de Galsi d’un cout au départ de 3 milliards de dollars, le cout réactualisé en 2012 variant entre 3,5 et 4 milliards de dollars US, le temps étant de l’argent toujours en gestation.

Il convient de rappeler qu’un accord intergouvernemental relatif à ce projet a été conclu en novembre 2007 entre l’Algérie et l’Italie. Ce gazoduc devrait relier Hassi-R’mel à El Kala dans sa partie «on shore» sur une longueur de 640 km. Dans sa partie «off shore», le projet devrait relier El Kala à Cagliari, en Sardaigne, sur une distance de 310 km. Le niveau de participation de Sonatrach prévu était de 36% et, une fois concrétisé, il devait acheminer directement en Italie un volume annuel de 8 milliards de mètres cubes de gaz.

Dans le cadre de l’arrêté du 15 décembre 2009 relatif à la programmation pluriannuelle des investissements de production d’électricité, publié au Journal officiel du 10 janvier 2010 français, il était prévu que, pour la Corse, les nouvelles centrales thermiques fonctionnent au gaz naturel dès lors que le raccordement de la Corse au gazoduc Algérie-Italie via la Sardaigne réalisé. Or, le projet est toujours gelé comme je le rappelais dans une émission à la télévision française France 3 en décembre 2011, les élus de la Sardaigne s’étant opposés à son tracé initial.

2. Deuxième contrainte, le projet Medgaz, d’une capacité de 8 milliards de mètres cubes gazeux. Qu’en sera-t-il dans la mesure où, selon l’agence Reuters en date du 25 décembre 2012, deux partenaires du groupe Sonatrach dans le projet du gazoduc entre l’Espagne et l’Algérie seraient ont vendu leurs participations en raison de la crise qui sévit en Europe, notamment en Espagne. Ainsi, Endesa et Iberdrola sont en négociations pour leur retrait dans le capital de Medgaz, préférant acheter sur le marché spot le gaz du Qatar et du Nigeria . Il est à préciser que le capital d’Endesa est détenu à hauteur de 92 % par l’Italien Enel (ENEI.MI) qui est un leader de la distribution de gaz en Espagne, Iberdrola ayant 20% du capital de Medgaz aux côtés de Cepsa avec 20% ainsi que les françaises GDF et Suez avec 12 %.

3. Troisième contrainte : le projet NIGAL Gazoduc, d’environ 4.500 km, reliant la région de Warri (Nigeria) à l’Algérie et l’ Europe (2.500 km sur le territoire algérien, 750 km sur le territoire du Niger, 1.300 km sur le territoire nigérian), prévu pour le transport de 20 à 30 milliards de mètres cubes par an en majorité vers le marché européen. Rappelons la signature du Memorundum of Understanding entre NNPC et Sonatrach le 14 janvier 2002 pour la constitution d’une société d’étude et de promotion du projet et l’accord pour l’élaboration de l’étude de préfaisabilité le 08 mars 2003, qui devait être opérationnel en 2015.

Outre les conflits frontaliers en Afrique subsaharienne dont le Sahel qui entraineront des surcoûts, le coût initialement prévu par la société PENSPEN, entre 5 à 7 milliards de dollars est largement dépassé selon certaines estimations en 2012 15 milliards de dollars à prix constants, et une étude de l’Institut français des relations internationales réalisée par Benjami Augé en mars 2010 (voir site IFRI) l’estime même à 25 milliards de dollars. Ce projet qui devait bénéficier d’un apport financier européen dont la zone est en crise d’endettement, il est toujours en gestation. Avec ce coût très élevé, la rentabilité est évidemment posée.

4. Quatrième contrainte : le rapport 2012 de l’AIE selon lequel les USA, avec la révolution du gaz schiste, devrait être exportateur de pétrole vers 2017 et de gaz à l’horizon 2020, concurrençant ainsi sérieusement les leaders actuels, l’Arabie saoudite pour le pétrole et la Russie pour le gaz.

Si les prévisions de ce rapport se vérifient, ce serait un grand bouleversement géostratégique. Qu’en sera-t-il pour l’Algérie si le marché américain est fermé à l’horizon 2007-2020 représentants 30% des recettes en devises de l’Algérie marché algérien ? A-t-on d’ores et déjà pensé à d’autres destinations géographiques et partenaires tenant compte de la concurrence internationale et des coûts, y compris les coûts de transport ? En effet selon le rapport du ministère de l’Energie publié en 2011, la structure des exportations s’oriente de plus en plus vers les produits gazeux. La part des produits gazeux durant la période 1962-1999 ne représentait que 29% contre 43% durant la période 2000-2010.

Quant aux produits liquides, ils représentaient 71% des volumes exportés durant la période 1962-1999, contre 57% à la fin de 2010. Le pétrole brut exporté représentait 95% des hydrocarbures liquides en 1971 et se situait à 30% en 2010. Quant aux produits raffinés et GNL, leur part a augmenté substantiellement passant de 3% en 1971 à 28% en 2010. Les marchés européens et américains restent les débouchés traditionnels des exportations, ces deux marchés absorbant en volume respectivement 63 et 29% des ventes globales des hydrocarbures et en valeur de 56 et 35%. Avec l’éventuelle fermeture du marché européen, le marché gazier algérien sera fortement tributaire de la demande européenne.

5. Cinquième contrainte : le devenir du plus grand projet de gazoduc algérien Transmed qui fournit du gaz naturel algérien à l'Italie depuis 1983 à raison de 30 milliards de mètres cubes par an et qui devait être porté à plus de 34 milliards de mètres cubes gazeux à la fin de 2010 et 40 milliards à la fin de 2012 avec la nouvelle stratégie offensive de Gazprom à travers le North Stream et le South Stream. Le North Stream, inauguré le 8 novembre 2011 d’un cout estimatif de 12 milliards de dollars est un projet stratégique dont le tracé, d'une longueur de 1.224 km, doit à terme permettre de transporter 55 milliards de mètres cubes de gaz par an de Vyborg jusqu'à la ville allemande de Greifswald en traversant les eaux territoriales de la Russie, de la Finlande, de la Suède, du Danemark et de l'Allemagne. «Le volume de gaz fourni (sera) comparable à l'énergie produite par onze centrales nucléaires», a indiqué Vladimir Poutine lors de l’inauguration.

La première conduite, d'une capacité de 27,5 milliards de mètres cubes, a été achevée en mai 2011. Une deuxième est en cours de construction doublant la capacité de la liaison. Quant au projet de South Stream, concurrent direct de l’Algérie, afin de le mettre en œuvre, le russe Gazprom et Eni ont créé en 2008 la compagnie South Stream AG. En juin 2010, ils ont signé un mémorandum visant à associer le groupe français EDF au projet. En mars 2011, Gazprom et Wintershall Holding GmbH ont signé un mémorandum d'entente sur la participation de la compagnie allemande à la construction du tronçon sous-marin du gazoduc.

Tout comme Nord Stream, il doit permettre à la Russie de contourner l'Ukraine, principal pays de transit, pour se terminer en 2015. Lors de cette rencontre, le feu vert a été donné par la Turquie à la Russie pour faire passer South Stream dans ses eaux territoriales en mer Noire, cette dernière ayant signé un accord avec l'Autriche sur South Stream, dernier document nécessaire pour lancer le projet. Auparavant, Moscou avait déjà signé des accords intergouvernementaux avec la Bulgarie, la Serbie, la Hongrie, la Grèce, la Slovénie et la Croatie. Long au total de 3.600 km (la longueur du tronçon sous-marin sera d'environ 900 km et sa profondeur maximale de plus de 2.000 m), South Stream doit alimenter en gaz russe l'Europe occidentale, notamment la Bulgarie, la Serbie, la Hongrie, la Slovénie et l’Autriche, la Grèce et l'Italie via la mer Noire et les Balkans.

Il doit permettre à la Russie de contourner l'Ukraine, principal pays de transit. D'une capacité de 63 milliards de mètres cubes de gaz, le tronçon sous-marin doit entrer en service en 2015, le coût estimatif initial du projet étant évalué à 20 milliards de dollars. L’ensemble de ces projets, en plus de ce qui se passe en Syrie, ont remis en cause le projet Nabucco où, en décembre 2011, simultanément la Turquie et l'Azerbaïdjan avait annoncé la mise en place du gazoduc transanatolien qui devait absorber le gaz de Shah Deniz, initialement envisagé pour Nabucco, projet de gazoduc reliant l’Iran et les pays de la Transcausasie à l’Europe centrale.

6. De ce qui précède, j’en déduis que le prix du gaz conventionnel algérien dépendra de l’évolution de la croissance de l’économie mondiale, de son modèle de consommation énergétique, de l’évolution des prix internationaux en termes réels tenant compte des fluctuations des monnaies clefs, notamment le dollar et l’euro, et des coûts internes, pouvant découvrir des milliers de gisements mais non rentables financièrement.

Il serait également illusoire de miser sur un prix du baril à prix constant de plus de 130/150 dollars qui serait un prix plancher de seuil de rentabilité pur les énergies substituables. Le passage du charbon, dont les réserves exploitables dépassent 200 ans, aux hydrocarbures a été le fait de la hausse des prix du charbon. Tenant compte également de la protection de l’environnement, faisons confiance au génie humain ; on assisterait alors forcément à de nouvelles sources d’énergie plus rentables et donc au déplacement du modèle de consommation énergétique. Une adaptation à ces mutations devient nécessaire.

Car le constat en ce mois de janvier 2013 est qu’après 50 années d’indépendance politique, l’économie algérienne est une économie toujours rentière. Sonatrach c’est l’Algérie et l’Algérie c’est Sonatrach. Le bilan officiel de Sonatrach donne 600 milliards de dollars de recettes en devises entre 2000/2012, une richesse artificielle qu’il s’agit de transformer en capital productif. Cela a permis une dépense publique d’environ 500 milliards de dollars entre 2004 et 2013 (dont une fraction en dinars algériens) donnant des taux de croissance et de chômage virtuels et calmant le front social avec le retour de l’inflation du fait de l’inefficacité de la dépense publique.

Les 200 milliards de dollars de réserve de change estimées par le FMI fin 2012 sont également une richesse virtuelle provenant des hydrocarbures. Cette situation est-elle tenable dans le temps ? Tout en n’oubliant pas la forte consommation intérieure qui, avec le doublement des capacités d’électricité à partir des turbines de gaz et du faible prix (environ un dixième du prix international représentant à l’horizon 2017-2020 plus de 70 milliards de mètres cubes gazeux), quel sera le devenir de l’Algérie au niveau du marché mondial énergétique face à ces contraintes ?

Pour le gaz, pourra-t-elle exporter ses 85 milliards de mètres cubes gazeux prévus à un prix de cession rentable alors qu’elle peine à atteindre 60 milliards de mètres cubes gazeux ? Que sera l’Algérie à l’horizon 2025-2030 avec une population de 50 millions d’habitants face à ces bouleversements géostratégiques sans hydrocarbures traditionnels ? Le gaz de schiste est-il une solution à terme tenant compte des coûts et de la concurrence et des risques de la détérioration de l’environnement avec la facturation hydraulique? L’Algérie aura-t-elle réalisée à l’horizon 2025-2030 une transition d’une économie de rente à une économie hors hydrocarbures reposant sur l’entreprise créatrice de richesses dans le cadre des valeurs internationales et son soubassement la valorisation des compétences ?

Autant de questions stratégiques relevant de la sécurité nationale, qui interpellent les autorités du pays .

L’attaque d’In Amenas aura en tout cas révélé toute la vulnérabilité de l’économie algérienne. Sur le plan économique, les compagnies étrangères mus par la logique du profit, continueront d'opérer en Algérie dans les grands gisements les petits gisements devenant problématiques, sous réserve d'un taux de profit supérieur à d'autres zones avec des surcoûts de sécurité supportés par l'Algérie, réduisant donc la rente. Sur le plan politique il y a aura certainement des impacts car le pouvoir est assis sur la rente des hydrocarbures.

Abderrahmane Mebtoul, professeur des universités

(*) Article paru dans le quotidien économique français Les Echos

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Commentaires (4) | Réagir ?

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Atala Atlale

En lisant le post de M. Bebbouche concernant SH (article soir d'Algérie) j'en arrive à une seule conclusion affirmative : Ceux qui, - de par leurs hautes fonctions - permettent de telles atteintes à l'économie et à la sécurité nationales, ne peuvent être considérés comme des Algériens et par conséquent l' entité en charge de la souveraineté nationale, devrait réagir avant qu'il ne soit trop tard ! Après la lecture de l'article du Soir d'Algérie, j'ai l'impression de voir l'Algérie de Benm'hidi à terre en train de se faire dépecer par des prédateurs de nos ressources.

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Bey Mustapha BEBBOUCHE

Je vous soumets un article tiré du quotidien Le Soir d' Algérie; bonne lecture.

Par Reghis Rabah, consultant et économiste pétrolier

Au-delà de la polémique autour de la prise d’otages à In Amenas, les Algériens ont profité de la très forte médiatisation pour s’interroger sur l’opportunité et les finalités des groupements associatifs dans le secteur pétrolier en Algérie. Il faut signaler par ailleurs que cette affaire n’a pas manqué d’alimenter les discussions cacophoniques dans des tables rondes organisées notamment dans les pays européens.

Cette tragédie a mis en exergue, du moins pour les premiers concernés, un autre point faible de la grande entreprise Sonatrach, censée agir pour le compte de l’Etat, pour le développement et l’exploitation des hydrocarbures en Algérie. L’inquiétude suscitée par le PDG de cette entreprise autour de l’exode du personnel expatrié des sociétés BP et Statoil travaillant sur le site gazier de Hassi Moumen de In Salah en est une preuve irréfutable. Rien que sur ce site, on aurait perdu plus de 250 étrangers de différentes nationalités. A en juger par la mine des responsables en charge de l’activité de ce champ gazier, les travaux de développement risquent d’être retardés et l’entrée en exploitation prévue dans deux ans est sérieusement compromise. Comment ce mastodonte étatique qui prospecte, exploite, transporte et commercialise les hydrocarbures depuis sa création en 1963 se trouve aujourd’hui totalement dépendant de l’expertise étrangère ? Et quel type d’expertise ? Parlons-en ! Sonatrach, dont le poids dans l’économie nationale est incontestablement vital, serait-elle á l’image du pays, lui-même entièrement à la merci des hydrocarbures ? D’abord et comme par hasard, le champ de Tiguentourine et In Salah où se nouent ces associations sont les premiers découverts en Algérie. Les caractéristiques pétrophysiques, les difficultés de forage et surtout les travaux de «work over» sont censés être parfaitement maîtrisés par les équipes de l’entreprise nationale. Il faut peut-être rappeler pour l’histoire que l’exploration pétrolière du Sahara a commencé en 1952, dans une incrédulité quasi générale. Deux sociétés se sont d’abord engagées : la SN Repal (BRP) (1) et la Compagnie française des pétroles, suivies de peu par la Creps (2) et la CPA (3) appartenant à Shell. Les premières découvertes (1952-1955) ne concernaient que des accumulations de gaz sec, alors regardées comme un objectif mineur. Les découvertes d’huile ne se produisent qu’au début de l’année 1956, d’abord dans la bordure méridionale du bassin avec Edjeleh, puis le champ en question de Tiguentourine, situé à 70 km à l’ouest d’Edjeleh. (4) Hassi Messaoud et Hassi R’mel sont découverts presque plus de six mois plus tard. Mais auparavant, en 1954, a eu lieu la première découverte d’hydrocarbures ; il s’agissait d’une grosse accumulation de gaz qui a été trouvée à Djebel Berga, au sud d’In Salah. C’était là le premier grand gisement de gaz algérien dont les réserves étaient estimées à 100 milliards de mètres cubes, qui n’ont pu être exploitées par manque de débouché commercial. Ceci bien entendu après les recherches entamées en 1946 au nord du pays dans les calcaires fissurés et qui ont fait apparaître du pétrole à Oued Gueterrini, près de Sidi Aïssa, et le Chélif près de Relizane mais la quantité a été jugée á l’époque commercialement non rentable. Ces associations ont-elles pour but de partager le risque géologique, alors dans ce cas pourquoi se limiteraient-elles aux gisements déjà découverts ? Visent-elles le partage de la croissance ? Avec plus de 200 milliards de dollars de fonds souverains placés dans les banques étrangères, le pays en a-t-il vraiment besoin ? Recherche-ton un transfert de technologie ? Sonatrach, dont l’expérience en matière de séparation, traitement préliminaire, transport et liquéfaction du gaz est avérée, a manqué tout simplement de vision stratégique pour aboutir à une telle dépendance. L’Algérie, qui a pratiquement construit la première usine de GNL en 1964 à Oran (Camel), maîtrise les 4 procédés de liquéfaction et dispose d’une flotte importante de transport. Il n’y a pas si longtemps, les Russes qui sont pourtant les fournisseurs historiques de la technologie à l’Algérie souhaitaient s’associer avec Sonatrach pour bénéficier de sa riche expérience dans ce domaine. En fait, que fait-on exactement dans ce vaste partenariat ? Il s’agit d’acquérir des trains standards pour séparer la partie liquide du gaz proprement dit et procéder à un système d'épuration pour éliminer le sable et les sousproduits (azote, gaz carbonique, hélium, etc.) qui, extraits avec le gaz mais non combustibles, réduisent son pouvoir calorifique, ainsi que des composants corrosifs (soufre) néfastes aux infrastructures de transport. Si le contrat signé en 1998 entre Sonatrach et BP dans le cadre de partage de production se justifie à cette période spécifique durant laquelle l’Algérie manquait de capitaux pour financer les installations dans le Grand Sud, la validation beaucoup plus tard par le gouvernement de la vente évaluée à 50% des parts du partenaire BP à Statoil reste une erreur stratégique pour laquelle le secteur de l’énergie subit, selon toute vraisemblance, les revers aujourd’hui. Cette même erreur s’est reproduite dans la présence des deux partenaires avec les mêmes proportions dans le gisement de gaz sec d’In Salah (Krechba, Teguentour et Reg), actuellement dans leur phase de développement. D’autres vont se reproduire avec la présence dans le module de steamcracking à Arzew pour ne citer que ceux-là. Que ramène BP Amoco ou Statoil de nouveau dans les techniques de développement, d’exploitation et de traitement de gaz ? Et que va ramener Total comme expertise dans le craquage à la vapeur de l’éthane ou le naphta des raffineries que Sonatrach pratique à Skikda depuis plusieurs années ? Si ces partenaires veulent partager le risque avec Sonatrach, ce n’est certainement pas dans les gisements existants mais dans la prospection d’un vaste domaine minier de près de 761 754 km2. (5) C’est à la fois l’essence même de ce type de partenariat et de cette manière que les ressources en hydrocarbures seraient valorisées, ce qui est un gain pour le pays hôte et une assurance pour ceux qui en consomment. Ce n’est certainement pas le cas puisque sur 774 688 km2 du domaine minier occupé, seulement 3% sont en exploitation et Sonatrach en détient seulement 2%. Le reste est soit en phase de recherche soit en prospection. Les quelque 260 découvertes, pour la plupart en association, ne sont que d’ordre marginal et qui n’ont pas une très grande influence sur les réserves en place. Par contre, les Algériens ont pu suivre en direct que la gestion de ces associations a quelque peu dévié de ses objectifs, sinon comment admettre la très forte présence des sociétés de catering dans les bases des sites pétroliers ? Nos sociétés privées ne sont-elles pas capables d’assurer ce service accessoire ? Le nettoyage et le jardinage sont assurés par des ouvriers maliens et tunisiens. Nos ingénieurs compétents sont transférés dans d’autres pays pendant que des Occidentaux, des Philippins, des Turcs et bien d’autres les remplacent sur les sites algériens. Dans ce cas, qui capitalise, consolide et fertilise le soi-disant savoir-faire visé ? Et plus grave, un chauffeur nigérien aurait vendu la mèche au groupe terroriste et tout cela sous l’amertume d’un grand nombre de chômeurs algériens. Pourquoi alors s’étonne-t-on que les citoyens du Sud osent parler d’une néocolonisation de leur région ? Cette pratique moyen-orientale qui consiste à s’entourer d’étrangers de la base au sommet semble inadéquate en Algérie vu l’énorme potentiel existant (plus de 900 000 naissances chaque année et 69% de la population est jeune) (6). Alors, est-ce un manque de confiance ou une politique voulue pour pousser les nationaux à l’exil ?

R. R.

(1) - SN Repal : Société nationale de recherche et d’exploitation des pétroles en Algérie et BRP : Bureau de recherche pétrolière

(2) - Creps : Compagnie de recherche et d’exploitation des pétroles au Sahara

(3) - CPA : Compagnie des pétroles d’Algérie.

(4) - Travaux du Comité français d’histoire de la géologie sous la direction d’André Combaz 2002

(5) - Bilan du ministère de l’Energie et des Mines 2009 et qui est resté sans changements à ce jour.

(6) - Voir le site www. ons. dz

Voilà un sujet sur lequel j'aurai aimé entendre notre expert Mr. Mebtoul.

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