Hollande contaminé par la superstition de ses visites en Algérie

Le président Hollande lors de sa conférence de presse.
Le président Hollande lors de sa conférence de presse.

Encouragé par l’élan et les résultats d’un stage de huit mois qu’il a effectué à l’ambassade de France à Alger en 1978, croyant fermement aux paroles de l’ex-président de la république algérienne, feu Ahmed Ben Bella de porter chance à tout ceux qui lui rendent visite, François hollande, pense que ce voyage, au demeurant surmédiatisé lui portera encore une fois chance pour redresser sa chute dans les sondages en France.

Le hasard a fait que tous ses séjours en Algérie ont été fortement coachés pour une connaissance parfaite du pays, de son peuple et surtout de la nomenklatura au pouvoir. Son passage auprès du corps diplomatique français lui a permis de comprendre et de maîtriser tous les artifices d’encanaillement des hommes d’affaire algériens au moment même où un visa en France valait son pesant d’or. D’abord, il sera encadré durant son stage par un certain Hubert Colin de Verdière qui lui ouvrira plus tard la porte de l’Algérie une fois devenu lui-même ambassadeur. Les deux hommes ont pratiquement visité le pays de fond en comble pour se faire une idée précise. Avec son ami, il a pu apprécier selon certaines indiscrétions les soirées mondaines en compagnies de certaines écervelées en quête d’outre mer. Son deuxième guide serait un certain Kader Arif né à Alger mais fils d’un harki et on peut se demander comment peut-il porter l’Algérie dans son cœur. Ils s’entretenaient des relations si intimes qu’il le nommera plus tard ministre délégué aux anciens combattants dans son premier gouvernement.

Cet homme, membre du Parti socialiste est réputé chasseur de tête pour le compte des entreprises françaises. Etant Algérien de souche et libre de circuler dans son pays d’origine, il a vite identifié le mal des jeunes Algériens en rupture de confiance avec le pouvoir en place pour contribuer et tenter le tout pour le tout afin de priver l’Algérie de l’énergie considérable de sa jeunesse. Le lendemain de son arrivée à Alger, il a appelé à l’allégement dans la délivrance des visas pour les algériens, sachant parfaitement l’importance qu’accordent les jeunes à ce problème. Ils ne leur dit pas ce qu’ils trouveront en Europe en général et la France en particulier dont le chômage est au plus haut et la croissance au plus bas de leur niveau normal. Il a envoyé comme éclaireurs avant même la confirmation de sa visite Yamina Benguigui, chargé de la francophonie, fille d’un nationaliste semble t-il de la première heure mais qui a préféré choisir l’autre côté de la barrière. Dans son propre site internet, elle se défini comme issue de l’immigration maghrébine mais ne cite jamais le pays d’où elle vient. On a commencé à l’entendre parler de l’Algérie uniquement après le déclenchement de la crise d’endettement que connaît la France. Dès qu’il accédé au poste de premier secrétaire du part socialiste en juillet 2006, il est aussitôt revenu à ses anciens souvenirs pour proposer à Stéphane Le Foll, son chef de cabinet d’antan et aujourd’hui ministre de l’Agriculture pour l’accompagner en Algérie. Il envisageait de se présenter aux primaires socialistes et donc recherche dans ce pays une recharge de sa lampe magique de la chance. Outre son chef de cabinet et Kader Afif, trois personnalités et pas des moindres l’ont accompagné dans ce voyage. Ils sont tous originaires de Constantine. Benjamin Stora, un juif de Constantine, élevé avec Enrico Macias, Faouzi Lamdaoui, un ingénieur de formation, délégué à l’égalité au PS et qui devient plus tard le chef de cabinet de sa campagne électorale, enfin George Morin dont la connivence avec le pouvoir algérien est notoirement connue. Rien qu’en appliquant l’adage "dis moi qui tu fréquentes, je te dirai qui tu es", on se rendra compte ce que vraiment François Hollande souhaite pour l’Algérie.

Pour ce qui est de sa prestation durant ce voyage en tant président de la république française, il n’a sur le plan mémoriel rien ramené de nouveau ou d’ajouter de substantiel à ses prédécesseurs. Comme Jacques Chirac en 2005, François Hollande a reconnu le massacre de Sétif perpétré le 8 mai 1945, "le jour même où dans le monde triomphaient la liberté et la justice, la France manquait à ses valeurs universelles". Mais il a évoqué aussi ceux de Guelma et de Kherrata qui demeurent de la même manière "ancrés dans la mémoire et dans la conscience des Algériens". Nicolas Sarkozy avait lui aussi dit en décembre 2007 que le "système colonial a été profondément injuste, contraire aux valeurs de la République", donc les propos de François Hollande ne constituaient pas une grande innovation. Il faut souligner aussi que même si les membres des deux chambres devant lesquelles il a prononcé son discours ont été réglés par le pouvoir en place pour applaudir, leur mécanisme n’a pas fonctionné lorsqu’il a parlé d’Albert Camus mais les applaudissements ont repris dés qu’il a repris les termes en valeur absolue comme "souffrance, brutal, injuste, Kateb Yassine, Yasmina Khadra, etc." C’est un message très fort des éléphants du vieux parti algérien, pour lui rappeler qu’on apprend pas aux vieux singes de faire les grimaces. De l’autre côté de la rive, il n’a pas non plus récolté grand-chose, l’extrême droite le traite d’applaventriste devant les Algériens pour s’ouvrir à l’immigration en accordant plus de visas aux étrangers. La droite traditionnelle voit en son discours une hémiplégie pour mettre de côté les dispositions de la loi de 2005 qui reconnait certains bienfaits de la colonisation.

L’association des harkis de France l’attend au tournant puisqu’il n’a soufflé mot en leur faveur. Les pieds-noirs eux attendent leur indemnisation, non encore à l’ordre du jour, etc. Donc, en définitive, aucun signe avant-coureur ne présage une amélioration quelconque de son audience dans les deux rives. Sur le volet économique, ce n’est pas Noël non plus. L’accord signé le jour même de son arrivée pour un partenariat avec Renault dont la forme confirme les intentions des entreprises françaises qui aiment vendre en Algérie mais investissent au Maroc. En effet, la présence en force des Chinois n’a pas empêché la France de rester le premier fournisseur de l’Algérie avec plus de 7,03 milliards de dollars et le quatrième client avec 6,61 milliards de dollars. Les services économiques et notamment la Chambre de commerce française de commerce ne rate pas l’occasion pour rappeler un fait d’une extrême importance : les entreprises françaises sont les plus présentes dans les secteurs hors hydrocarbures. En plus de différentes banques domiciliées en Algérie, de nombreux projets industriels sont en phase de finalisation, notamment une nouvelle cimenterie Lafarge et un centre de biotechnologies de Sanofi. Ces investissements ont atteint 2,5 milliards de dollars et pourraient devenir de plus en plus importants à l’avenir. Le plus important reste le complexe de vapocraquage à Arzew, près d'Oran, entre Total et l'entreprise publique Sonatrach, un investissement de 5 milliards de dollars. Le projet coince sur la détermination du prix du gaz destiné au complexe.

Les investissements français, même s'ils sont sous-représentés dans le secteur des hydrocarbures, sont assez diversifiés et couvrent aussi bien l'agroalimentaire, l'industrie ou les services. De passage à Alger en octobre dernier, Nicole Bricq, ministre du Commerce extérieur, avait fait valoir que les entreprises françaises en Algérie contribuent au développement de l’économie algérienne avec 35 000 emplois directs et près de 100 000 emplois indirects. Les banques françaises Société générale, BNP et Natixis se sont installées en Algérie bien avant l'introduction, en 2009, de la règle du 51% – 49%. Elles font de bonnes affaires – Société générale est la première banque privée d'Algérie , même s'il est arrivé qu'elles se plaignent des freins mis au développement de leurs réseaux d'agences. Pourtant, à en croire les chiffres de l'ambassade de France, fin 2010, 71% des investissements français en Afrique du Nord étaient réalisés au Maroc (9,1 milliards d'euros), contre 15% en Algérie (1,9 milliard d'euros), 7% en Libye (884 millions d'euros) et 7% en Tunisie (842 millions d'euros). Des chiffres qui traduisent, selon Alger, une "frilosité" des entreprises françaises à sortir de l'optique purement commerciale pour aller vers l'investissement. Un analyste d’un journal électronique Maghreb émergent constate que, chaque année, l'Algérie est l'un des rares pays avec lesquels la France présente un solde positif, alors que son commerce extérieur est déficitaire. Or, constate cet analyste, il y a un engouement des entreprises françaises pour le Maroc, "disproportionné par rapport à son potentiel réel", alors qu'à l'inverse, l'Algérie, avec un marché potentiel à prés 3 milliards d'euros en termes d'investissements, "reste quelque peu snobée".

Personne ne nie l'existence de lourdeurs bureaucratiques en Algérie en plus d’une certaine instabilité juridique, mais aussi paradoxalement que cela puisse paraitre les entreprises françaises s'adaptent, voire même trouvent leur compte dans ce climat quelque peu disproportionné. Un autre sujet qui peut fâcher les deux rives : la possible exploitation du gaz de schiste par la France en Algérie, comme le révèle en exclusivité le magazine Le Point, qui affirme en citant Laurent Fabius qu’"un accord permettant d'expérimenter une alternative à la fracturation hydraulique sur le territoire algérien sera signé". Si tel était le cas, l’on ne peut qu’imaginer la réaction des écologistes des deux côtés, farouchement opposés à ce mode d’extraction du gaz. En venant en Algérie, pour la quatrième fois, François Hollande aurait du d’abord passer chez madame Soleil.

Rabah Reghis, consultant, économiste pétrolier

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mohamed boudebza

C’est d’autant plus vrai que si vous lisez le quotidien nationale El Watan d’hier vous vous rendrez compte que le projet Renault a dorés et déjà commencé la propagande en achetant !/3 de page sur ce même journal pour susciter l’adhésion des citoyens : « ENSEMBLE PARTICIPONS Á l’ESSOR ËCONOMIQUE DE NOTRE PAYS » de quel pays s’agit-il la France ou l’Algérie ? Cette tactique utilisée il y a plus de cinq ans par BP dans le projet du gaz de In Salah montre l’offensive de Renault pour contrecarrer l’opposition des spécialistes á l’intérieur de SNVI et le fond national d’investissement qui ont senti l’arnaque de ce projet. Jean-Christophe Kugler, directeur des opérations de la région Euromed-Afrique a déclaré ceci : « le projet n’aurait pas pu se concrétiser sans le soutien de Cherif Rahmani qui est allé droit au but » C’est une confirmation directe qu’il s’agit bien d’une injonction d’en haut et qu’on a forcé la main de ces responsables pour signer le projet. En plus, lorsqu’on connaît les déboires de ce pauvre spolié de Rahmani dans les colonnes du Matin. DZ et les biens que possède sa petite famille en France, on en déduit que ce n’est pas un responsable libre pour concrétiser un projet avec les français en toute transparence. Pourquoi le projet a tardé voire même renvoyé par les spécialistes algériens á plus tard sans l’intervention de Rahmani ? :

1-il demande tout de suite l’exclusivité du marché algérien mais conditionne l’intégration au dynamisme des sous traitants algériens. Lorsqu’on connaît leur capacité de créativité, l’échec de la partie algérienne devient certain.

2-Il s’agit d’une usine de montage et donc nos ouvriers ne vont rien capitaliser que le modèle « SYMBOL » et feront uniquement du tourisme en France pour une forte facture de frais de formation dans les centres de formation de Renault

3-L’entreprise va tenter de récupérer ces investissements par un POT très court et dira ensuite ce n’est pas de notre faute mais celle de la partie algérienne qui n’a su assurer un transfert de technologie comme a dit auparavant Berliet, Philips et bien d’autres entreprises qui sont passées en Algérie.

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