Les insultes ne me feront pas taire !

Le Matin 07-08-2013 35402

Les insultes ne me feront pas taire !
Meziane Ourad

Monsieur Hannachi Mohamed, vous portez un nom lourd, je comprends parfaitement que mon discours ne vous convienne pas.

Dites-moi, cependant, pourquoi m'adressez-vous vos griefs en arabe, cette langue qui m'est étrangère. Je vous rassure. A l'époque où vous n'étiez encore peut-être qu'un spermatozoïde, j'ai quitté le lycée technique du Ruisseau à Alger pour aller préparer un bac lettres en arabe. Par amour pour la philosophie et la littérature arabe.

En chemin, j'ai égaré ma religion, mon islam. J’ai compris très tôt que les foutouhates (conquêtes) islamiques étaient des opérations de colonisation. J’ai le droit 15 siècle après de le dire.

Monsieur Hannachi, je ne sais pas où vous êtes planqué mais moi, au temps où vous n'étiez rien, j'ai bouffé de la matraque et de la soupe aux cafards dans les prisons de Chadli, pour atteinte à la sûreté de l'Etat et autres joyeusetés qui toutes valaient la peine de mort.

Le courage n'est pas donné à tout le monde. Les meilleurs en sont morts : Djilali Liabès, Mahfoud Boucebsi, Tahar Djaout, Matoub Lounès, Alloula, Hasni....

L'ingratitude est bien répandue, aujourd'hui. La preuve, l'entreprise de recouvrement des créances d'électricité d'Afrique du sud vient d'adresser à Nelson Mandela, le père de la nation agonisant un ordre à payer de 496 euros! La mairie de Johannesburg a été obligée de s'excuser. Quelle honte ! Mandela ! Vingt-sept ans de prison au service du peuple et de la liberté. L'administration est conne. Le peuple aussi parfois. Souvent.

Serions-nous maudits ? Pourquoi chaque fois qu’on prend nos valises pour quitter un village ou une ville, un pays, une situation de tourments, on retombe toujours à pieds joints dans la tourmente ?

J’ai dit serions-nous maudits, je crois sérieusement que nous le sommes, sinon comment expliquer que des gens comme nous, simples, paysans à l’origine, ayant appris quelques langues et quelques chiffres, ayant appris à réfléchir, à lire, à analyser se retrouvent dans la gadoue eu Europe ou aux Amériques.

Il est très dommageable que moi, toi ou un autre, nous ne puissions pas nous parler. Nous avons été engendrés par la même misère, le même remugle. Nous avons été bercés par les mêmes chansons, les mêmes musiques : le kabyle, le sahraoui, le gnaoui, le raï, l’andalou, le chaâbi…

Il est impossible après ça on soit, on devient ennemis.

Nous avons quitté l’Algérie à un moment tragique, dangereux. Avec femmes et enfants. Nos femmes, dérangées par cette fuite en avant ont pu penser que nous avions traversé la Méditerranée pour le camembert et le Côte du Rhone. Non ! nous avons pris la mer pour fuir les barbes et les qamis, l'environnement transfiguré, un pays défiguré. Même pas peur ! L'Algérie, ce pays où plus personne ne vient, c'est mon pays. C'est là-bas que j'enterrerai mes parents. C'est là-bas que je serai enterré.

Sur les terres de mes ancêtres. Celles qu'occupent à ce jour les pouilleux d’"El Qaïda", dorlotés par Bouteflika et sa tribu. Je reviens à toi Hannachi, la parole du prophète n'est pas nécessairement meilleure que celle d'un autre !

Un philosophe juif anonyme disait: "Lorsque la bêtise gifle l'intelligence, alors l'intelligence a le droit de se conduire bêtement !"

Meziane Ourad

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