Lettre au conseil national du Front des forces socialistes

Ali Laskri, premier secrétaire du FFS.
Ali Laskri, premier secrétaire du FFS.

Le conseil national du FFS se réunit en ce moment en session ordinaire.

Après des années dans le service des soins palliatifs, l’épisode fiévreux qui a saisi ce grand corps malade de l’opposition algérienne, vient d’atteindre un nouveau pic avec la déclaration (publiée hier) de trois de ses anciens premiers secrétaires. S’agira-t-il, lors de la réunion d’aujourd’hui, de casser le thermomètre pour faire croire qu’il n’y a pas de fièvre ? En tout cas, la persistance du premier secrétaire à affirmer que la «participation aux élections législatives a été une participation tactique [et que] le nombre de sièges obtenus n’est pas le plus important et n’a jamais été [l’] objectif premier», est un signe avant-coureur du «déni». Le «déni», lorsque l’on vient de perdre un proche, est l’une des six étapes psychologiques à franchir pour «accepter» enfin l’incompréhensible, en l’occurrence ici : l’erreur d’appréciation. Vue de l’intérieur, la participation du FFS aux législatives n’allait pas de soi. Pour les participationnistes qui ont joué la carte de la menace de la désagrégation du pays, le prétexte était d’autant plus facile qu’ils ne consolidaient pas clairement leurs arguments. Comment l’entrée d’un FFS affaibli dans un hémicycle aussi parcellisé et gangrené, aurait-elle pu freiner de manière décisive la course folle du pays vers le chaos ? Le mystère ne s’éclaircit pas davantage lorsque le premier secrétaire ajoute à cela que le « but était la mobilisation, ou plutôt la ‘remobilisation’ politique des forces algériennes, l’investissement politique auprès de la base militante du parti et des citoyens afin de réhabiliter l’action politique. » Le fait est là : le taux de l’abstention qu’on imaginait important avant et pendant la campagne à atteint le jour du scrutin le score de 57 %. Cela est ni plus ni moins une hoggra en sens inverse. Et il serait grossier d’attribuer la totalité de ce pourcentage à la dépolitisation qui frappe notre peuple.

La «remobilisation» ne se décrète pas quand les perspectives ne sont pas partagées, surtout à la veille d’une  élection et après des années d’immobilisme. C’est là l’une des leçons qu’il faut tirer de cet épisode électoral. Si le régime algérien est l’unique responsable de l’atonie politique que connaît le pays, le FFS, lui, est le seul responsable de ce qui se passe dans ses rangs et à sa tête. La marche forcée vers la participation, que l’appareil du FFS à fait prendre au parti, est une potion amère que des militants et des responsables ne digèrent pas. Les rumeurs qui entachent sa probité doivent déciller les yeux de ceux qui n’avaient pas encore pris toute la mesure de sa fragilisation. Le spectre de la guerre fratricide que chacun redoute ou espère est-il en train de se profiler plus tôt que prévu ? Le FFS n’est certes pas une fin en soi, mais un Front des forces socialistes en bonne santé, solidaire et en ordre de marche, est un radeau pour les Algériens et surtout pour sa jeunesse. Le conseil national, vers qui tous les yeux se tournent en ce moment, doit savoir qu’il est attendu de sa part plus qu’une déclaration de pure forme. Cette instance est souveraine entre deux congrès. Etant juge et partie dans cette histoire – il a avalisé le choix de la participation envers et contre l’incompréhension d’une bonne partie de la base – il doit donc envoyer un signal fort de manière à rassurer et à remobiliser tous les militants. Des propositions allant dans ce sens ont été formulées depuis longtemps par les militants de l’immigration et de l’intérieur du pays. Et lors des discussions de la pré-campagne, des idées pour un front construit et mobilisateur n’ont pas manqué d’être exprimées. Il appartient maintenant à cette instance de faire l’autre partie du chemin.

Nadia Taalba

Militante, ex-responsable du FFS Immigration Ile de France

Paris, le 22 juin 2012

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