Crise au Mali : l'offensive diplomatique d'Alger

Abdelkader Messahel cherchera-t-il les failles de Bamako?
Abdelkader Messahel cherchera-t-il les failles de Bamako?

Après Paris où il a rencontré le ministre français des Affaires étrangères, Laurent Fabius, Abdelkader Messahel, ministre délégué chargé des Affaires maghrébines et Africaines s'est envolé pour une tournée dans "les pays du champ" qui le mènera à Bamako. A Malte, au Sommet des 5+5, le Premier ministre Andelmalek Sellal a rencontré à deux reprises le président français, François Hollande.

Il n'a pas plus tôt achevé sa visite jeudi dernier à Paris où il rencontré Laurent Fabius, le ministre des affaires étrangères français, M. Abdelkader Messahel, ministre délégué chargé des Affaires maghrébines et africaines, accompagné de hauts responsables du ministère de la Défense nationale a pris la route, hier, en Mauritanie "dans le cadre d'une tournée régionale qui le mènera successivement en Mauritanie, au Mali et au Niger", indique le ministère des Affaires étrangères dans un communiqué. Cette tournée, qui s'ajoute à celles, nombreuses, effectuées dans la région, au cours de cette année 2012, sera sans doute l'une des plus décisives qu'aura à faire Alger dans cette région où les perspectives du règlement de la crise au Nord-Mali ne sont plus celles qu'elles étaient avant la tenue de la 67e session au Siège de l'ONU à New York sur le thème de " l’Etat de droit", les 24 et 25 septembre derniers. 

Bamako et la Cédéao ayant scellé leur accord sur l'"inévitable" intervention militaire au Nord-Mali, quelle sera la marge de manœuvre  d'Alger qui s'est retrouvée isolée par la majorité des "pays du champ" qui, après une période de brouilles latentes entre Bamako et la Cédéao, se sont rangés sur l'option militaire au Nord-Mali sous le mandat de l'Onu toujours attendu.

Ces consultations, selon le communiqué du département des Affaires étrangères "seront mises à profit" pour "renforcer la coopération entre les pays du champ, à travers les mécanismes existants (Comité politique, comité d'état major conjoint - CEMOC - et l'Unité fusion liaison - UFL -) dans la lutte contre le terrorisme et le crime organisé transnational", a-t-on précisé de même source. Or, ces moyens invoqués, notamment le Cemoc, ont montré leur inefficacité dans la lutte contre Al Qaïda au Maghreb islamique dans les régions algériennes frontalières de l'Algérie, notamment l'attentat kamikaze qui a frappé Tamanrasset en juin dernier, le Q.G.du Cemoc.

Cette visite dans les pays du Sahel dans leur grande majorité acquis à l'option militaire au Nord-Mali sera-t-elle l'occasion pour l'émissaire d'Alger, de rechercher des failles dans la position de Bamako qui semble encore mue par les velléités du dialogue avec les groupes terroristes. Le président Dioncounda Traoré a lancé il y a quelques jours à peine ce message qui se résume ainsi : l'option militaire sera le dernier recours si d'aventure le dialogue échoue. Un appel qui a été suivi à Bamako par une manifestation populaire contre l'intervention militaire précédé, le mois d'août dernier par un grand rassemblement au stade de Bamako appelant à "la réconciliation nationale", et ce, au moment même où le Premier ministre Cheick Modibo Diarra avait annoncé que cette potion militaire est définitivement décidée avec la Cédéao.

Une autre faille que mettra à profit Alger pour son cheval de bataille, l'option d'une "solution politique négociée" dans la région est celle avancée par Wachington réitérée par le commandant en chef US de l'Africom : Bamako ne peut décider de déclarer la guerre au Nord-Mali en faisant perdurer la crise politique de ses institutions. Elle doit organiser des élections présidentielles et mettre fin à toute menace de coups d'Etat afin de légitimer toute décision dans ce sens. Certes, pour Messahel, les arguments du choix d'Alger ne manquent pas. Mais, c'est sans compter sur le danger d'Al Qaïda au Maghreb islamique qui frappe aux portes de Bamako et qui refuse tout dialogue s'il ne repose pas sur l'application de la chari'a, a déclaré, récemment, dans un entretien à une radion privée basée à Bamako, un chef "militaire" du Mujao, Oumar Ould Hamaha, ajoutant par ailleurs que son organisation terroriste dispose d'un arsenal militaire très important.

A Paris, Abdelkader Messahel, et le ministre français des Affaires étrangères, Laurent Fabius, ont eu des discussions sur la crise malienne, entretiens qualifiés d'"utiles et approfondis" affirmant que l’option politique demeure “incontournable” dans le cadre d'une “approche globale” défendue par ailleurs par le département américain d'Hillary Clinton; les deux parties ont rappelé que l’éradication du terrorisme et du crime transnational organisé, y compris par le recours à la force, demeure “l’objectif commun” des pays voisins, de l’Union africaine et de la communauté internationale. Il semble que c'est pour Alger une autre brèche par laquelle elle tentera de persuader les autorités de Bamako à la prudence, une attitude à laquelle a invité le secrétaire général des Nations unies, Ban Ki-moon. 

Mais, pour Alger, poursuivre et encourager le dialogue avec les parties en conflit au Nord-Mali dans cette "approche globale" n'est pas indemne de complots contre le MNLA par des contacts informels par les groupes terroristes sur le territoire de l'Azawad, comme cela a été déjà fait avec Ansar Eddine affilié à Al Qaïda au Maghreb islamique qui, depuis juin dernier, est devenu son interlocuteur privilégié. 

En dépit de ces "convergences" de points de vue en Alger et Paris, l’ambassadeur français à l’ONU, Gérard Araud, a annoncé, lors même de ces entretiens,  que la France allait proposer “dans les prochains jours” au Conseil de sécurité une résolution visant à préparer le terrain pour un feu vert ultérieur de l’ONU à une intervention militaire au Mali. Ce texte, a-t-il dit, combinera “une réponse politique et militaire à la crise malienne en appelant à l’ouverture d'un dialogue” entre Bamako et les islamistes qui contrôlent le Nord et en prévoyant l’entraînement sur place de l’armée malienne. Une proposition qui n'est pas sans déplaire à Alger mais qui risque de mettre la Cédéao sur les dents, encore une fois sommée d'expliciter les modalités de son intervention militaire au Nord-Mali exigées par le conseil de sécurité de l'Onu qui tiendra une réunion dans ce sens ce 19 octobre.

A Malte, le Premier ministre, Abdelmalek Sellal, s’est entretenu vendredi à deux reprises avec le président français, François Hollande et ce, avant l’ouverture du sommet des 5+5 à La Valette puis en marge des travaux de ce 2e Sommet des chefs d’Etat et de gouvernement achevé ce samedi 6 octobre. Lors de ces deux rencontres, Paris a estimé que la résolution de la France visant à préparer le terrain pour un feu vert ultérieur de l’ONU à une intervention militaire au Mali ne rencontrerait aucun obstacle.? De son côté,  Abdelmalek Sellal a déclaré que "L’Algérie a suffisamment payé pour savoir ce qu’est le terrorisme." Autrement dit, Alger agite le spectre d'une autre "décennie noire" sur les populations civiles des trois villes du Nord-Mali occupées par Ansar Eddine, le Mujao et Al Qaïda au Maghreb islamique, Tombouctou, Gao et Kidal; populations qui seraient ainsi prises en otage en cas d'une intervention armée de Bamako.

Alger passe à une étape supérieure de sa politique de dialogue défendue au Nord-Mali qui se veut assortie par une lutte antiterroriste renforcée appuyée par les Etats-Unis et la France, intégrée dans les "deux défis" que promet de mener en Afrique, le France de François Hollande, à savoir la lutte antiterroriste et le renforcement de la démocratie.

R.N

Plus d'articles de : Actualité

Commentaires (2) | Réagir ?

avatar
kamel ait issi

"Politique de reconcialiation défendue par ailleurs par le département américain d'Hillary Clinton " -

Sans blague, vous faites dire des choses a la Hilary que meme son mari ne peut faire. Les capacite's de prendre des decisions de ce genre s'arretent dans 21 jours, exactement.

Ici a washington, c'est tout a fait le contraire qui se dit. La doctrine ici est "la guerre continuera, declare'e ou pas, contre les islamistes et ceux qui leur offrent asile" - l'Algerie est pour le Mali ce que le Pakistan est pour l'Afganistan - et bouteflika, rien d'autre qu'un autre musharef.

avatar
anwa wiggi

Azul fellawen,

Alger veut épargner ses protégés tangos au Mali. Les apprentis sorciers sont coincés !

François Hollande le sait et va surement tirer sur la corde afin d'obtenir le maximum de notre Abdelaziz1er et en dernier recour, il y'aura une intervention militaire qui aura pour but d'ecraser cette vermine islamiste.

Après ça, beaucoup de choses seront plus claires, on comprendra qui est qui et qui a fait quoi.

Le monde saura qui est aqmi et qui est son concepteur. On connaitra la généalogie de cette nébuleuse islamiste (MIA, GIA, AIS, GSPC, AQMI et ses filiales Ansar dine et Mujao).