Mehdi Sayed, ma vie de clandestin en France

La couverture du livre
La couverture du livre

"Ma vie de clandestin en France" est un livre-confession. Une histoire vraie. L’histoire de Mehdi, le harrag tunisien qui a passé 17 ans d’errance en France.

La France d’en dessous, celle des bas-fonds, celle que personne n’évoque, celle qu’on préfère ignorer, Mehdi Sayed (*) connaît très bien. Il y est entré clandestinement à 14 ans pour y vivoter, patauger pendant 17 ans. Des années marquées par la drogue, la violence brute, les courses-poursuites avec la police.

Ce livre-témoignage décrit crument la vie des clandestins et interroge sur les frustrations de ces milliers de jeunes Africains jetés sur les routes à la recherche d’un improbable rêve. "Je rêve de ne plus rêver", confie Mehdi dans ce livre écrit avec Virginie Lydie.

En Tunisie, Mehdi a connu d’inavouables traumatismes. La perte de sa sœur, Malik, son cousin, tué en pêchant à l’explosif, puis l’impensable : séquestré avec un ami pendant plusieurs jours, Mehdi a subi les assauts bestiaux d’une meute d’hommes. L’adolescent décide de mettre les voiles pour la France. Mais là aussi, indésirable, sans papiers, il sera expulsé plusieurs fois. Il revient toujours. Il fait des petits boulots. Il connut l’exploitation dans des chantiers, la drogue. Sans papiers, il passe par la case prison, le centre de rétention et l’expulsion en août 2009.

Par un de ces paradoxes que seuls les harrag comprennent, Mehdi a préféré la prison en France à son pays, la Tunisie. Endurci par la vie, tête brûlée mais fragile, Mehdi a fui sa Tunisie natale, son enfance brisée à la recherche d’un ailleurs plus clément. Mais qu’a-t-il rencontré ? La vie d’un damné.

Ma vie de clandestin en France est un récit de vie dans toute sa cruauté. Car ici de clémence, il n’y en a point. La vie de Mehdi est un combat permanent. Rares ceux qui pourraient tenir devant autant de difficultés. Mehdi n’a pas désespéré devant les coups du sort. Car il a fait des rencontres fabuleuses. Comme celle de Virginie, la journaliste qui l’a aidé à écrire sa vie, le militant de lutte pour les sans papiers. Voire des policiers compréhensifs.

Sans prétention ce livre est un document intéressant écrit au plus près de la douleur de l’exil par un homme revenu de l’enfer des harraga.

Kassia G.-A.

(*) Mehdi Sayed est un pseudonyme

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Commentaires (2) | Réagir ?

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Atala Atlale

Cet homme debout, face à la mer, semble fasciné par cette immense nappe bleue, l’horizon lui paraît bien proche, comme un mirage qu’il ne pourra atteindre. Ne devrais-je pas succomber à mon tour également et partir, avec comme seul bagages une petite valise contenant quelques livres qui me suivent partout ; des classiques, et mes quatrains de Omar Kheyamme. Bien sûr mes raisons ne seraient pas les mêmes que celles de Mehdi S. n’empêche que si dans une barque de fortune tous les candidats à l’exil n’ont pas tous les mêmes motivations, ils possèdent néanmoins une même espérance : le rêve d’une vraie vie. Ne le croyez vous pas Kassia ?

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Atala Atlale

@Kassia

L’exil a toujours de profondes déceptions à l’origine. Elles sont diverses et constituent généralement des échecs qui s’accumulent explosent puis se renouvellent après chaque nouvelle espérance. Des fantasmes que chacun s’efforce de contenir. Ces jeunes qui se jettent à la mer pour rejoindre les rives du nord mènent dans leur pays, une vie continuellement en mode virtuel, je veux dire que leurs désirs d’échapper à leur quotidien est nourri par ces scènes de vie normale que les médias leur envoient des pays du Nord. Ce qui est dramatique est cette espèce de banalisation qui s’est installée chez nous sur ce phénomène nouveau où la désespérance est à son comble. J’avais une fois interpelé sur ce sujet, un cinéaste algérien rencontré il y a plusieurs années, accidentellement à Alger, ça seule réponse a été la suivante : « nous n’avons pas d’argent pour réaliser un film qui permette de traiter ce sujet » J’ai été très déçu car connaissant certains succès de ces films sur la guerre de libération. Cela ne m’a pas convaincu du tout. La culture en général semble avoir été ciblée de manière à ce que le message du vécu social n’ait pas l’écho exprimé ou transmis par les artistes. L’exil a t-il quelque chose de fécond ? Victor Hugo a écrit les Misérables durant son exil.