Le dur métier de vivre

Le dur métier de vivre

J’ai lu quelque part : "Aucun des livres que j’ai lus, excepté ceux consacrés à ma profession, ne m’a jamais servi dans l’exercice de mon métier."

Cette déclaration m’a rappelé une scène. Elle eut lieu environ deux mille quatre cents ans auparavant.

« À un musicien qui était occupé à régler les cordes de sa harpe, Diogène dit : « N’as-tu pas honte de t’intéresser à corriger ton instrument de musique, et non pas les défauts de ton âme ? »

Aujourd’hui, je demande : combien de temps passent les personnes devant leur miroir, pour s’assurer une beauté physique, par rapport au temps consacré à la beauté de leur esprit ? Autrement dit : quel pourcentage est utilisé pour paraître, relativement à celui d’être ? Enfin, dans l’action quotidienne, quelle est l’importance du premier et du second ?

Là est l’une des causes principales de l’aliénation servile des citoyens. En voici un sinon le principal aspect : ne s’intéresser qu’à son propre « métier », c’est-à-dire à l’activité qui permet de gagner l’argent nécessaire à la satisfaction des besoins élémentaires. Ils sont semblables, à peu près, à ceux des animaux : manger, se vêtir, se loger, se soigner, faire des enfants, plus quelques menus autres plaisirs, éventuellement.

Cette activité est normale, quand il s’agit de besoins indispensables à la vie biologique.

Et je ne parle pas des personnes dont le métier est directement lié à un changement social positif, tels un inventeur de vaccin ou d’un produit permettant un meilleur rendement en agriculture, ou, encore, un artiste qui nous offre de l’authentique beauté. Non, j’ai en vue les métiers ordinaires, par exemple de travailleur manuel, secrétaire, fonctionnaire, ingénieur, médecin, militaire, prêtre, policier, bourreau, intellectuel mandarin, etc.

À ces gens, allez dire que leur métier est inscrit dans un système social fondé et fonctionnant sur l’exploitation et la domination d’une minorité sur la majorité, et que les uns en profitent, d’une manière directe ou indirecte, et certains autres en sont les victimes volontaires, conscientes ou inconscientes.

Les interlocuteurs les plus cléments vous riront au nez, les plus méchants auront recours aux mots les plus abjects pour vous insulter.

Voici un exemple significatif. Au cours de son procès, à Jérusalem, Adolf Heichmann, l’organisateur du transport des condamnés-es aux fours crématoires d’Auschwitz, déclara n’avoir fait que son « travail » de fonctionnaire.

Si vous reprochez à un général d’avoir fait tirer les soldats sur de jeunes manifestants pacifiques, il répondra également : « Je n’ai fait que mon métier ! » Si vous lui demandez : « Mais n’avez-vous pas lu des livres qui vous expliquent qu’avant le métier, il y a la vie et la manière de la concevoir ? » Il répliquera : « De tous les livres que j’ai lus, seuls ceux qui ont trait à ma profession m’ont été utiles. »

Les inventeurs et les constructeurs d’armes de guerre considèrent n’avoir fait que leur « métier » ; idem les aviateurs qui ont lancé leurs bombes sur la population civile. Même les médecins qui se sont livrés à des expériences sur des prisonniers de guerre réduits à des cobayes, en Allemagne nazie et au Japon fasciste, étaient persuadés qu’ils exerçaient uniquement leur « métier », et, certainement, aucun livre qui aurait pu leur montrer l’aspect criminel de leur profession ne les avait intéressés. Ils ne mélangeaient pas « métier » et morale. De cette dernière, ils s’en foutaient complètement. Ils la considéraient destinée uniquement aux imbéciles utopiques et aux « losers », les perdants sociaux.

Malheureusement, aussi, trop de travailleurs manuels ou de techniciens subalternes, eux aussi, méprisent totalement les livres qui ne leur servent pas à l’exercice de leur profession. Même quand ils assurent la production d’armes de guerre, employées à massacrer des citoyens vivant dans d’autres pays. «Que voulez-vous, déclarent-ils ? Nous devons bien nourrir nos enfants !» Ceux des autres, ils n’y pensent pas. Ils n’ont pas lu les brochures et les livres qui les mentionnent.

Les gens qui ne considèrent que l’exercice de leur métier, généralement, refusent de savoir qu’il est inséré dans un système social déterminé. Il leur suffit de tirer de leur activité professionnelle le gain désiré. Rien d’autre ne les intéresse. C’est l’une des causes de la difficulté de changer les sociétés en faveur de plus de justice et de solidarité.

Les gens motivés uniquement par leur activité professionnelle pensent ceci : les personnes qui se mêleraient d’autre chose sont des charlatans, des donneurs de leçons, des intellectuels prétentieux, des moralistes inopportuns, des fauteurs de désordre, pour ne pas employer des termes que la décence interdit de nommer.

Ainsi, les livres lus ne doivent concerner généralement que le « métier ». Quant aux autres, ils ne sont pas lus ; dans le cas contraire, ils ne servent à rien.

Effectivement, il n’y a pire sourd que celui qui ne veut pas entendre. Et pire aliéné que celui qui ignore de l’être.

En effet, que penser d’une personne qui, hors les livres qui lui ont permis de servir son « métier », n’a trouvé aucun intérêt dans les autres ?… Soit cette personne a lu des ouvrages inutiles, prouvant par là son manque de discernement dans le choix ; soit elle a lu des ouvrages où d’autres trouvent un bénéfice, mais pas elle.

De fait, on ne sait trouver que ce que l’on cherche. Et on cherche uniquement ce à quoi on accorde un intérêt. Si on se préoccupe de la vie personnelle, on finit par trouver les livres utiles. Si, au contraire, on accorde de l’importance qu’à son métier, le cerveau ne saura trouver d’avantage que dans les ouvrages qui permettent d’exercer ce métier.

Ceci étant dit, en dehors du métier professionnel, n’y a-t-il pas des personnes qui trouvent dans des livres un intérêt non seulement évident, mais précieux, au point que le contenu de ces œuvres change le sens même de leur vie ? Par exemple, des romans, des poèmes, des essais en histoire, psychologie, philosophie, morale, etc.

Si tel n’est pas le cas, pourquoi, de la part des dominateurs sociaux, de tout temps et partout, l’existence de la censure, de la haine des livres, des bûchers de livres et de leurs auteurs ? Pour ne conserver que les ouvrages ayant comme objet uniquement un métier, utile à permettre le maintien du système d’exploitation-domination caractérisant la société.

Pour revenir à l’observation de l’antique philosophe, mentionné auparavant, qu’est-ce qui est le plus important, vient en premier, décide de tout le reste : exercer une profession ou le métier de vivre ?

« Science sans conscience n’est que ruine de l’âme », écrivit un homme qui s’occupait d’abord de la vie et non de la profession, Montaigne.

Dès lors, quand une personne avoue que les seuls livres lus qui lui ont été utiles sont ceux ayant rapport avec l’exercice de son métier, que doit-on penser de cette personne, de sa conception de la vie, de sa position dans la société ? Bref, quelle est son humanité et sa citoyenneté ?

Ne trouve-t-on pas cette déclaration sur l’inutilité des livres non sur le métier dans la bouche d’un tortionnaire, d’un militaire assassin de civils, d’un ingénieur inventeur de bombes atomiques, d’un banquier rapace, d’un prêtre d’inquisition, d’un imbécile quelconque, aliéné et asservi, dont la seule chose qui compte est son métier ?

Cela me rappelle un médecin que j’ai personnellement connu. Il ne s’occupait que d’exercer son métier dans le seul but d’amasser de l’argent. « J’ai étudié pour ça ! s’écria-t-il. La vie ?... La politique ?… La morale ?… L’éthique ?… La culture ?… Combien d’argent cela peut rapporter? », demanda-t-il en ricanant, avec une expression laissant entendre que j’étais un crétin.

Il ajouta : « Moi, je fais mon boulot, et le reste au diable ! »

Alors, vu que la personne m’était proche, je me permis cette demande :

« Et, aux législatives, tu as voté pour qui ? »

Il me toisa, étonné, tant ma requête lui paraissait stupide :

« Eh bien, naturellement, pour ceux qui m’assurent la garantie et la tranquillité d’exercer mon métier ! »

- C’est-à-dire ?

- Le FLN, bien entendu !… Est-ce qu’il ne dirige pas le pays depuis l’indépendance ? Est-ce qu’il ne nous a pas libéré du terrorisme ? Est-ce qu’il n’a pas construit l’autoroute et les mosquées ?

Ma mémoire ou plutôt mon imagination alla dans un certain passé. Est-ce qu’un médecin comme celui que j’avais devant moi n’est pas une réplique d’un médecin allemand à l’époque nazie, ou stalinienne ? N’est-ce pas sur ce type d’individus que repose toute domination sociale, parce que gens de « métier » et dominateurs y trouvent leur compte ?

Bien entendu, j’avais compris. Inutile de me hasarder, avec ce genre de personne, à parler de morale, d’éthique, du sens de la vie, et de conseiller la lecture de certains livres. Cette personne n’a lu et ne saurait trouver de l’utilité que dans les ouvrages qui ont une relation avec son métier. Les autres, ils ne lui serviront à rien !… Normal ! Son seul horizon intellectuel est son métier. Son seul but : l’argent. Ne parlons pas d’horizon moral, cela portera cette personne à « raisonner » uniquement avec ses « tripes », donc à insulter, et avec arrogance. L’histoire a montré et continue à montrer quelles en sont les conséquences sociales ; le totalitarisme, sous une forme ou une autre.

Partout et toujours, les dominateurs, quelle que soit leur idéologie, ne condamnent-ils pas les livres « inutiles », notamment parce qu’ils posent des questions et proposent des solutions sociales, d’un point de vue éthique ?

Avant le métier comme profession, ne faut-il pas, d’abord, se soucier du métier de vivre ? Puis, trouver les livres qui aident à l’exercice de cette seconde activité ?… Cette dernière ne devrait-elle pas être notre premier souci ? N’est-elle pas la plus belle et digne caractéristique de l’être humain, celle qui le distingue de son aspect animal ? Celle qui permet de raisonner avec un cerveau bien fait, et non pas avec des « tripes ». Ces derniers sont la méthode de Hitler, formulée dans son « Mein Kampf » (Mon combat), et de toute sorte d’intégriste, religieux ou laïc.

Considérons l’Algérie actuelle. L’un de ses graves maux n’est-il pas dans le trop grand nombre de citoyens qui « raisonnent » et aiment « raisonner » avec leurs « tripes » ? Cette manière ne réduit-elle pas son auteur à un élémentaire tube digestif, oubliant totalement l’existence d’un cerveau ? Et ne porte-t-elle pas, si la situation le favorise, à égorger celui qui a une opinion différente, surtout si elle se base sur la raison et l’équité ?

Que l’on me concède l’évocation d’un cas personnel, par deux exemples. Cela fera comprendre que je n’écris pas pour prêcher mais uniquement pour communiquer une expérience personnelle à qui voudrait y trouver matière de réflexion pour la sienne.

D’une part, après avoir constaté la faillite de l’idéologie marxiste-léniniste à laquelle je croyais, il m’a été difficile d’affronter les ouvrages susceptibles de m’en fournir les explications. D’autre part, à un autre moment, me trouvant dans une situation psychologique très difficile, de rares amis me conseillèrent la lecture de certains livres.

Dans les deux cas, l’un idéologique et l’autre psychologique, j’ai résisté un certain temps avant de les ouvrir. Ma répugnance avait un seul motif : la peur de remettre en question mes certitudes. Elles m’avaient animé et dirigé depuis tellement longtemps. Bref, comme dirait un autre, je me demandais à quoi bon passer d’une « chapelle » à une autre.

Je finis par comprendre que la seule et meilleure manière d’employer correctement mon cerveau est de le soumettre à la lecture de ce qu’il refusait, ne pas craindre de constater que mes certitudes étaient des erreurs. A ce sujet, j’appris deux choses très précieuses.

La première fut exprimée par un savant dont je ne me rappelle pas le nom. Il avait déclaré : la science, la connaissance ne procèdent pas vers plus de vérité, mais vers moins d’erreur. Puis, dans un autre livre, j’ai lu ceci : Il n’y a que les sots qui refusent de changer d’idées, quand la réalité et l’expérience l’exigent.

Dès lors, j’eus le courage d’affronter les œuvres redoutées. J’en fus capable parce que je ne cherchais plus de passer de « vérité » à « vérité » plus correcte, mais d’une erreur à une hypothèse moins erronée. Quitte à remettre en question par la suite cette dernière, si la réalité l’exige, notamment l’intérêt du peuple laborieux. Il est la boussole de mon existence, la balance où je pèse la valeur de ma vie.

Concluons.

L’écrivain et poète italien Cesare Pavese intitula son dernier livre, son journal intime, « Il mestiere di vivere » (Le métier de vivre). Nazim Hikmet, le poète turc, appela un de ses recueils poétiques « le dur métier de l’exil ». De ces deux expressions j’ai tiré l’expression : le dur métier de vivre.

Il dépend du difficile apprentissage de la lecture des livres appropriés. Ils existent, bien que rares et pas aisés à trouver, parmi l’énorme production produite et contrôlée par les castes dominantes.

Mais la majorité des enseignants, dans tout le système scolaire de tous les pays, se contente de son « métier » pédagogique, dans le sens corporatif et restreint du terme : communiquer ce que l’idéologie dominante leur demande, en échange d’un salaire.

En outre, agissent, d’une part, des théologiens et, d’autre part, certains théoriciens laïcs. En matière de vie sociale, pour « compléter » le métier, ils recommandent, chacun selon son idéologie bien délimitée et exclusive, la lecture d’un nombre restreint d’ouvrages. Ils les considèrent exhaustifs. Tous les autres sont décrétés inutiles, quand pas nuisibles. Si on a la curiosité de lire les livres condamnés, nous y découvrons généralement la critique de la domination sociale et des propositions pour l’abolir, en faveur d’une coopération égalitaire entre les êtres humains.

Dans le monde entier, la production énorme de gadgets électroniques dissuadent les jeunes de la lecture de livres. La meilleure preuve en est la régression de leur capacité orthographique. Mais cette situation bénéficie à la caste dominante de deux manières : d’une part, les actionnaires des manufactures produisant ces gadgets gagnent plus de dividendes, et, d’autre part, les gouvernants ont affaire à des citoyens plus aliénés, donc plus manipulables.

Considérons l’Algérie. Est-ce un hasard, le nombre dérisoire et la médiocrité de la plupart des librairies ? Comment expliquer cette déclaration convaincue de citoyens : « En dehors des livres concernant mon métier, le seul que je lis et où je trouve toutes les réponses à ma vie est le Saint Coran » ? Enfin, le temps passé sur Facebook, en croyant bien vivre, ne s’effectue-t-il pas au détriment de la lecture de livres concernant la vie authentique ?

Oui, dur est le métier de vivre, quand on est conscient de sa première exigence, la dignité. Elle se préoccupe non seulement de l’estomac mais tout autant du cerveau, des « tripes » et de l’équité. Ce souci réclame la lecture de livres particuliers. Leur étude remet en question, parfois très douloureusement, notre confort mental aliéné, de dominateur ou de dominé. En compensation, l’apprentissage du métier de vivre est si agréable, quand nous découvrons la valeur de la liberté personnelle réelle, complétée par la solidarité collective active.

Kaddour Naïmi

[email protected]

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Commentaires (8) | Réagir ?

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algerie

جزاكم الله خيرا

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Quelqun EncoreQuelqun

Je crois qu'en dépit des explications des uns et des autres, la tendance est à la démonstration de force.

Bel 3ârbia -Et Avarwaq peut en témoigner- la question (s'il y en a réellement une???) serait de savoir ce que "lire" devrait vouloir dire. Nos kabytchous les plus anciens nous ont toujours dit "... Dounnith, dh'Léqraya... ", traduction àpeupresque : "... la vie est "lecture"... " au sens apprentissage, ou bien méditation. Jusque-là, ce ne sont certainement pas mes innombrables échecs qui m'aideront à soutenir le contraire. En effet, de désillusion en désillusion, la "lecture de la vie" ne m'a toujours pas servi ; les rares fois où elle a tenté de le faire, ce fut pour me punir justement de ne l'avoir pas assez "lue".

Maintenant, s'agissant de la lecture vue par Monsieur Naïmi, et au risque de passer pour un radoteur, nighak akidyahdhou Rabbi, édjagh chwitt n'l'espace de liberté idhaghdyéqiméne sans nous narguer de n'avoir pas tenté de "déchiffrer" La Pléiade. Ma Préfète de région a passé son temps à lire et lit jusqu'à maintenant, lorsque moi, l'agent sous sa coupe, je naviguais entre les boîtes branchées du coin, les cabarets de Paris et de sa banlieue, les Sciences du langage, le foot, et même... certains lieux... comment dire déjà? disons des lieux où les massages vous font oublier vos kabyles de collines!

Nighak à Si Naïmi, oser comparer mon sentiment d'oppression à la vue des lecteurs du métro et des trains au "Layadjouz" des barbus fous de Dieu me titille au plus profond, mais mettons cela sur l'abus de langage puisque nous ne faisons que tmén... chir !

Là où je bloque carrément, c'est lorsque vous insinuez que se déclarer non-lecteur et atteint de "lecturophobie naissante", on serait tout simplement asservi. Je vous passe le caractère dominateur et dominant de la qualité de propriétaire terrien de mon arrière Grand-père, ya salam!

Si la lecture est si libératrice, l'écriture, elle, devrait donc être THE acte par lequel toute velléité de domination serait anéantie, puisque sans écriture, point de lecture! Or, vous devez le savoir mon cher M. Naïmi, les courtisans, ça a toujours existé (et existe encore) y compris parmi les plumes les plus réputées (dont certaines de vos références).

En résumé, l'une des libertés dont j'ose encore jouir (hachak) sans avoir à m'en excuser est le rejet de la lecture; j'aime ne pas aimer lire! Est-ce grave Douctour? Vais-je en mourir? Vais-je aller en prison? J'ai remarqué que chez la plupart des lecteurs "m'as-tu vu (e) ", le langage était peu développé (je parle de TOUTES les formes du langage, y compris non verbal (e) ). On lit pour soi, en se disant qu'on aura toujours quelques citations pour se tirer d'affaire si, par malheur, on était d'une soirée, d'un dîner, d'une sortie... confronté aux autres quoi !

Enfin, je ne sais pas pourquoi, cet article et le débat qu'il suscite déjà me font penser à la chanson de Lounis Aït Meguelette " Akka à Mmi Ara Thoughalédh Dh'Akkarouy"... une sorte de recette ou de mode d'emploi pour chef en devenir.

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