Syrie : au moins 146 morts au premier jour de la trêve

Un attentat meurtrier et la riposte de l'armée syrienne ont mis fin à la trêve qui avait été négociée pour l'Aïd al-Adha. Premier échec de l'émissaire de l'ONU.

Au moins 146 personnes ont péri vendredi dans des violences en Syrie, un bilan proche au premier jour d'une trêve mort-née âprement négociée par l'émissaire international Lakhdar Brahimi, a rapporté samedi l'Observatoire syrien des droits des l'Homme (OSDH). L'ONG, qui s'appuie sur un réseau de militants et de sources médicales dans des hôpitaux militaires et civils à travers le pays, a recensé 53 civils, 50 rebelles et 43 soldats tués vendredi, soit un bilan qui dépasse la centaine de morts, comme chaque jour depuis que la révolte contre le régime s'est transformée en conflit armé au cours des derniers mois.

La trêve instaurée vendredi matin en Syrie à l’occasion de l’Aïd al-Adha a volé en éclats au bout de quelques heures avec un attentat meurtrier à Damas et une annonce de l’armée qu’elle avait engagé des ripostes à des attaques rebelles. A l’appel de l'émissaire international Lakhdar Brahimi, rebelles et armée s'étaient engagés jeudi à faire taire leurs armes durant les quatre jours de la fête musulmane du sacrifice, tout en se réservant le droit de riposter.

Mais après avoir marqué le pas dans la matinée, avec une baisse autant du nombre de victimes que de celui des «points chauds», les violences ont fait au moins 81 morts vendredi à travers le pays, selon un bilan provisoire de l’Observatoire syrien des droits de l’Homme (OSDH). Dans un communiqué lu dans l’après-midi à la télévision officielle, l’armée a annoncé avoir riposté après des attaques rebelles à Deir Ezzor (est), Deraa (sud), Idleb (nord-est) et dans la province de Damas.

"Des groupes terroristes armés ont attaqué des positions militaires, violant ainsi clairement l’arrêt des opérations militaires auquel a souscrit le commandement de l’armée. Nos valeureuses forces armées sont en train de répondre à ces violations", a affirmé le texte. Dans la terminologie officielle des autorités syriennes, les «terroristes» signifient les rebelles.

Dans le même temps, la télévision syrienne et l’OSDH ont annoncé un attentat meurtrier à la voiture piégée dans le sud de Damas. L’explosion a fait huit morts et 30 blessées, selon un bilan de l’OSDH. Dans le sud du pays, au moins 11 soldats ont été blessés dans l’explosion d’une voiture piégée à un barrage dans la ville de Deraa, où un tireur embusqué a tué trois personnes, selon l’OSDH. Le Front al-Nosra, un groupe jihadiste rebelle qui a revendiqué la plupart des attentats ces derniers mois, avait catégoriquement rejeté toute idée de trêve.

Dans la matinée, les combats s'étaient limités principalement autour de la base militaire de Wadi Deif, près de Maaret al-Noomane (nord-ouest), où 10 soldats et quatre rebelles sont morts dans un assaut des combattants du Front al-Nosra, selon l’OSDH.

L’armée a riposté en bombardant le village limitrophe de Deir Charqui, tandis que des accrochages étaient également signalés dans la province de Damas, à Homs (centre) et brièvement à Alep (nord), selon la même source.

"Tu as détruit la Syrie"

Jeudi, l’ONU avait dit espérer «de tout coeur» que la trêve tienne, tout en reconnaissant «ne pas être certain» que cela arrive, selon les propos d’un porte-parole. En avril, une trêve négociée par Kofi Annan, le prédécesseur de M. Brahimi, avait déjà volé en éclats au bout de quelques heures. Vendredi matin, la télévision d’Etat a montré le président Bachar al-Assad priant dans une mosquée du quartier chic de Mouhajirine à Damas, affichant un sourire et une déconctraction contrastant avec le conflit meurtrier qui a fait dans son pays, selon l’OSDH, plus de 35.000 morts depuis mars 2011.

L’OSDH, basé au Royaume-Uni, s’appuie sur un réseau de militants et de sources médicales dans les hôpitaux civils et militaires à travers le pays. Il affirme que ses bilans recensent les victimes civiles, militaires et rebelles. Comme chaque vendredi, des militants hostiles au régime ont manifesté à Damas et dans tout le pays, selon l’OSDH et des militants. Ainsi dans la province d’Idleb (nord-ouest), des manifestants ont scandé à l’adresse de M. Assad: "Traître, lâche, tu as détruit la Syrie".

Un responsable de l’Armée syrienne libre (ASL) a dénoncé des tirs contre des manifestants. Selon l’OSDH, les forces de sécurité sont intervenues à Raqa (nord-est), tirant des grenades lacrymogènes sur les manifestants, et dans la province de Deraa (sud), où trois personnes ont été blessées par balles. A Alep, des affrontements entre des rebelles et des miliciens kurdes ont fait neuf morts, tandis que deux soldats et deux rebelles ont péri dans la province alentours.

Dans cette grande ville commerçante où la foule se presse d’ordinaire dans les magasins, les marchés et les restaurants au premier jour de l’Aïd al-Adha, les rues étaient désertes vendredi, selon un journaliste de l’AFP. "Bien qu’il n’y ait pas eu de tirs ce matin, rien ne nous donne le sentiment que c’est la fête", a confié Hany, 35 ans, un restaurateur dans le quartier central d’Aziziya qui n’a pas enregistré la moindre réservation pour la journée.

Et à Damas, les routes reliant les banlieues et la capitale étaient coupées.

AFP

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