Tragédie nationale de Bouteflika : "Oui aux victimes, non aux Martyrs!"

Les Martyrs du Printemps noir.
Les Martyrs du Printemps noir.

Le Premier ministre d'Abdelaziz Bouteflika, Abdelmalek Sellal a déclaré ce mercredi que le sujet sur "les victimes de la tragédie nationale" est un "dossier ouvert" qui concerne "tous les citoyens qui ont souffert de la tragédie nationale sous toutes ses formes". Le statut de "victimes" est-il une arme répressive contre la reconnaissance officielle des "Martyrs" de 1963, d'Avril 1980, du Printemps noir de 2001 aux côtés des Martyrs de la guerre de libération?

Pour le FLN version Abdelmalek Sellal, la réconciliation nationale ne concerne pas que "les victimes de la tragédie nationale", c'est à dire en termes non officiels, les maquis du terrorisme islamiste. C'est, a-t-il au conseil de la Nation, ce mercredi, "un dossier ouvert" dans lequel viendraient s'inscrire "tous les citoyens qui ont souffert de la tragédie nationale sous toutes ses formes", sans préciser la ou les périodes de cette "tragédie nationale" ni même identifier ses "victimes", si ce n'est l'allusion faite aux "victimes" des maquis du FFS entré en guerilla en 1963 contre la prise de pouvoir d'Armed Ben Bella.

Si le terme de "victimes" semble être affectionné par le pouvoir, l'usage du mot " martyrs" est par contre banni des discours officiels. Dans l'esprit de la réconciliation nationale, l'appellation de "les victimes de la tragédie nationale", entendu la décennie noire,  désigne tout aussi bien les terroristes pseudo repentis et actifs dans les maquis que les familles de celles et ceux emportés par les massacres ou disparus. De plus, le statut de "victimes" admet la reconnaissance du bourreau comme étant lui-même une victime puisque officiellement le terroriste est "un égaré". La compensation matérielle, entre pensions, indemnités, faveurs socioéconomiques promises par le pouvoir pour honorer la mémoire de ces "victimes" ne relève pas de l'ordre du politique et, ainsi, cette mesure compensatoire fait du pouvoir d'Abdelaziz Bouteflika, un acteur au-dessus des conflits et des luttes politiques. Juste un distributeur automatique de billets de banque à toutes "ses" victimes : celles, pourquoi pas, puisque Sellal remonte à l'année 1963, d'Avril 1980, d'Octobre 1988, du Printemps noir de 2001, des crues de Bab El Oued, du séisme de Boumerdès, de l'hiver noir de 2012 et d'autres calamités naturelles ou politiques de ce demi-siècle d'indépendance du pays. D'autres victimes pourraient également s'y ajouter : Abane Ramdane, Mohamed Khemisti, Tahar Zbiri, Krim Belkacem, le général Bellounis, Antar Zouabri, Matoub LOunès que pouvoir commémore à titre de "victime" et de l'autre côté des frontières, Kadhafi...Par ce qualificatif de "victimes", la liste est longue, variée, hétéroclite au risque de faire de l'"Algérie des citoyens", celle d'"une Algérie des victimes".

Mais, toutes les victimes ne peuvent prétendre au statut de "Martyrs". Pour le moment, le terme de "Martyr" est sacré et le pouvoir n'y voit que "les martyrs" tombés aux champs d'honneur et du bout des lèvres, forcés de le reconnaître, l' attribue quoiqu'encore hors du champ officiel, aux illustres figures du mouvement national assassinés par les leurs durant la guerre ou durant l'autre guerre appelée "la décennie noire". Ainsi, les acteurs d'Octobre 88 ont beau réclamer pour les leurs tués par la police ou l'armée le statut de "Martyrs de la démocratie" comme reconnuissance officielle incluant implicitement celle de "victimes" qu'ils font face au silence et au mépris des autorités.

Le rang de "victime" pourrait même servir d'arme politique répressive contre la reconnaissance du statut de "Martyrs" utilisé dans les mouvements de résistance contre l'oubli et l'amnésie recherchés par le pouvoir. Ainsi, alors que le pouvoir use et abuse du terme de "victime", le mouvement citoyen des aârouch a toujours mis en avant "Les martyrs du Printemps noirs". Et, sur ce sujet précis, il est étonnant que des "victimes du printemps noir" ainsi désignées, aient eu observé, fin aôut 2012 un sit-in pour réclamer, à ce titre, leurs droits (indemnitaires) promis par le pouvoir. Manipulation? Intox? L'information rapportée par l'agence kabyle d'information Siwel précise que ce sit-in a été soutenu par "une aile" du mouvement citoyen. 

Mais le jeu du pouvoir que répercute Abdelamalek Sellal ce mercredi est beaucoup plus pervers dans le choix du mot "victimes" utilisés dans un pluriel politique. Car, par ce terme "fourre-tout", il nie toutes les causes par lesquelles ces citoyens algériens sont devenus des "victimes" et permet, de ce fait, une neutralisation - folklorisation des motifs autrement politiques qui sont ainsi confondus dans leur adversité. Massinissa Guermah devient une victime au même titre que le gendarme qui l'a tué dans un commissariat. Les "victimes" du maquis FFS de 1963 ne seront indemnisées que par le reniement de ce pour quoi ils ont participé à la guérilla… L'on voit apparaître ainsi toute la corruption du terme de "victimes" utilisé par le Premier ministre ce mercredi devant le conseil de la Nation au point où même le Plan d'action de son gouvernement semble être concocté pour les "Algériens victimes de..."

R.N

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Commentaires (2) | Réagir ?

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Amnay Djennadi

Écoeurant !

L'Etat algérien est depuis sa création (son géniteur étant la France) un Etat raciste, criminel, terroriste et négationniste! C'est l'Algérie entière qui est victime et martyr de cet "Etat"

mais les peuples ont les gouvernements qu'ils méritent et visiblement, nous méritons le pire! cceh deg-negh nefka afus !

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laid baiid

Nous sommes tous des victimes de ce système qui dure depuis 1962.

Nous avons été sequestrés, sauf ceux qui pouvaient obtenir une autorisation de sortie.

Nous avons été endocriner par le socialisme et l'arabisation.

Nous n'avons pas la liberté de parler ou de manisfesté. (sauf programation).

etc....

Nous sommes aussi des victimes