Renault veut réduire sa production en France mais se lancera en Algérie

Carlos Ghosn, PDG de Renault.
Carlos Ghosn, PDG de Renault.

D’un ton rassurant, le PDG de Renault, Carlos Ghosn, a annoncé que le constructeur ne devrait pas fermer de sites en France mais s'adapterait toutefois à la conjoncture. En construisant ailleurs par exemple.

Le PDG de Renault Carlos Ghosn a assuré lundi 1er octobre que le constructeur automobile n'avait "pas de projet" de fermeture de site en France, admettant toutefois qu'il pourrait être amené à réduire sa production si la baisse de ses ventes dans l'Hexagone se poursuivait. "Si on a une année 2013 du même acabit que 2012 et que les perspectives 2014 ne sont pas meilleures, cela veut dire que nous devrons nous adapter aux nouvelles conditions de marché", a déclaré Carlos Ghosn sur Europe 1.

"Ca veut dire réduire sa production par rapport à la demande", a-t-il expliqué. Interrogé sur la possibilité pour Renault de fermer des sites en France, Carlos Ghosn a répondu: "Je ne pense pas, nous n'avons pas de projet". Puis il précise son analyse : "Si, par exemple, sur 2013 nous voyons une très légère baisse de l'Europe et une récupération à partir de 2014, l'essentiel sera préservé", a-t-il toutefois indiqué. Sur les neuf premiers mois de l'année, les ventes du groupe Renault (marques Renault et Dacia) ont chuté de 19,8%, la baisse atteignant même 33,4% pour le seul mois de septembre. Mais, a-t-il ajouté, "si le marché continue de baisser à coup de 10% par an, personne ne pourra résister à ce genre de spirale".

Il y a quelques jours il avertissait dans un entretien au Figaro : "Toute entreprise est liée à son pays, je ne connais aucune entreprise qui soit viable, qui puisse prospérer à partir d'une base qui ne soit pas compétitive." Puis alarmé, il ajoute : "Le danger est réel. Je ne vous parle pas d'un danger à trois mois ou à six mois (...), je suis obligé de réfléchir sur des échéances de trois ans, de cinq ans et de dix ans". Selon le PDG de Renault, "la décroissance des marchés va automatiquement induire une baisse de l'emploi dans les entreprises". Malgré la mauvaise conjoncture économique en Europe, le constructeur est toujours à la recherche d’investissements ailleurs qu’en France. Depuis quelques années déjà et, aujourd’hui encore plus, dans l’attente d’une prochaine reprise du marché, la direction de Renault sortir la construction de la France.

Usine en Algérie

Dans cette conjoncture de crise où on parle de chômage et de fermeture d’usines et d’une chute des ventes de véhicules en Europe, le PDG de Renault évite d’évoquer les négociations avancées pour la construction d’une usine de voitures en Algérie à partir de l’année prochaine. Si les constructeurs automobiles français sont au creux de la vague dans leur pays, cela ne les empêche pas d’investir ailleurs. Il y a eu l’usine du Maroc, celle en Chine, puis celle très probablement en Algérie. Il est vrai qu’on ne parle pas de corde dans la maison d’un pendu, dit-on. Devant les délocalisations et le chômage exponentiel, le patron de Renault ménage l’image de la marque dans l’opinion française. Mais il sera bien obligé de le faire prochainement, puisque les négociations auraient bien avancé entre Alger et la marque à losange.

De nouveaux éléments ont été révélés par le PDG de Renault, dans l’entretien au Figaro. Tout en rappelant la position de leader en Algérien, il ajoute : "Nous ne pouvons pas ignorer le souhait du gouvernement algérien de se doter d’une usine qui alimenterait le marché local et éventuellement des marchés hors d’Europe. On n’a pas le choix, on le fera. S’il y a une usine en Algérie, nous ferons tout pour qu’elle soit Renault". Qu’entendait dire Ghosn par "on n’a pas le choix" ? Subit-il des pressions politiques ? Lesquelles ? De la part de l'Algérie ? Ou des autorités françaises ? Ou alors, en construisant cette usine il veut barrer le chemin au constructeur allemand Volkswagen qui a émit le souhait de lancer son usine en Algérie. Il est cependant difficile de croire qu'un capitaine d'industrie à la tête d'un groupe comme Renault va mettre des milliards juste pour céder à des pressions politiques. Dans ce projet comme dans celui de Chine, c'est l'intérêt économique du groupe que le PDG défend ; pas celui de l'Algérie, en tout cas. Deuxième point : jusqu'à présent, les responsables de Renault parlaient d'une usine pour pourvoir le marché algérien particulièrement dynamique en véhicules de la marque, voilà que Carlos Ghosn évoque les marchés hors Europe. Le projet, dont la signature interviendra probablement avec la venue de François Hollande en Algérie ne cesse décidément de changer de lieu et de perspective avant d'être concrétisé.

Yacine K./AFP

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Fouad GUERMOUCHE

SECTEUR AUTOMOBILE EN ALGÉRIE.

MÛREMENT RÉFLÉCHIR AVANT DE DÉCIDER.

Par Abdelhamid ABDEDDAÏM.

« L’argent est gagné par tous ceux-là qui, avec patience et observation, vont derrière ceux qui le perdent. » (Benito PEREZ-GALDOS 1843-1920. In l’Aïeul).

Dans un article, paru le18 septembre 2012 sur le Quotidien d’Oran et intitulé « Algérie, au lieu de Renault, pourquoi pas Peugeot ? » est suggéré un choix pour le moins manichéen comme si la décision était aussi simple que dans un casino où il s’agit toujours de se prononcer pour le rouge ou le noir ou impair et manque.

L’avenir d’un pays aussi fragile que le nôtre malgré des discours outrageusement optimistes, se joue en Bourse du moment où une crise internationale du secteur automobile se profile implacablement à l’horizon dans une incertitude totale et telle que les experts les plus ferrés eux-mêmes n’arrivent pas à dissiper. Si, naguère, et plus précisément dans les années soixante-dix, l’Algérie a opté pour Renault, tout en négociant avec les leaders mondiaux de l’époque : Volkswagen et Toyota, ce n’était pas dû au fruit du hasard : la roulette n’a pas sa place dans un secteur aussi stratégique qui engage la survie des générations futures et la firme Peugeot n’avait pas sa place hier, encore moins aujourd’hui la crise automobile la touchant de plein fouet risquant même de l’engloutir à jamais.

Investir dans Peugeot au plus bas de sa capitalisation boursière paraît attractif de prime abord, les premiers intéressés par la situation devraient être les concurrents du secteur en cherchant les alliances et les investisseurs des pays du Golfe par exemple, sans oublier la Chine qui dispose de moyens matériels et humains astronomiquement plus puissants que les nôtres.

L’histoire récente doit nous inciter à plus de prudence et les expériences de la Libye avec Fiat et de l’Arabie saoudite avec Mercedes-Benz sont autant de précédents négatifs à prendre en compte avant une prise de décision lourde de conséquences.

Le choix de l’Algérie c’est la prospective avant la Bourse et, opter pour Renault n’est pas du tout erroné ; le pays n’a pas à hésiter. En revanche, se contenter du montage sans la maîtrise des phases d’intégration est Le problème primordial à résoudre. La France qui aurait été tentée par le patriotisme économique si cela eût été possible dans l’esprit de la construction européenne, ne se hasarderait dans cette voie que si elle constituait un salut possible pour le sauvetage d’une entreprise familiale historique et c’est l’Algérie qui viendrait à la rescousse avec des moyens d’expertise inexistants à l’heure actuelle.

L’option vitale pour notre pays est un arrimage avec un constructeur présent à l’international et qui maîtrise mieux son développement dans le long terme : le véhicule de demain n’aura aucun rapport avec les projections attendues par les spécialistes. Nous devons choisir parmi ceux qui seront dans le haut du pavé dans un futur qui n’est pas aussi lointain comme on pourrait le penser. Si cela est essentiel, le dimensionnement de notre usine ne peut en aucune manière se contenter des besoins du marché local, sans quoi sa rentabilité serait aléatoire, voire impossible, eu égard à une faible économie d’échelle. C’est pourquoi le Maghreb de l’automobile peut être facteur d’accélération de l’Union politique et permettra non seulement de s’assurer un volume important du marché mais également de développer une sous-traitance complémentaire génératrice d’emplois pérennes.

La complémentarité de l’usine Renault de Tanger doit être intégrée dans les négociations avec le constructeur pour permettre au Maghreb de peser sur le destin économique de nos pays, faute de quoi, nous risquerons de rester à jamais à la traîne des restructurations industrielles dans le secteur automobile. Il va de soi qu’il s’agit là de politique industrielle et c’est précisément cet aspect qui devrait être mis à l’avant d’une construction maghrébine qui bute sur un nationalisme exacerbé qui n’est pas dans l’intérêt de nos pays respectifs, l’avenir appartenant aux ensembles régionaux. Il va sans dire qu’un secteur aussi stratégique que l’automobile ne doit pas être pris à la légère et ce n’est pas dans la Bourse ou le casino que son sort doit être réglé. Les experts les plus avertis doivent en étudier tous les aspects, politiques et économiques, à même d’assurer à nos pays la perspective d’un développement programmé et harmonieux.

Qu’y a-t-il de surprenant que la famille Peugeot ne soit pas hostile à l’arrivée de capitaux algériens dans PSA ? Mais sa survie qu’elle cherche désespérément à défendre ne lui laisse aucune autre alternative que le premier investisseur tenté par l’aventure. Or, il est utile de souligner que les investisseurs institutionnels avertis ont littéralement ignoré ce scénario et nous espérons que notre pays n’en serait, encore une fois, ni le cobaye ni le paradigme. Rebrab, PDG et Réda Hamiani, Président du FCE, suggèrent une plus grande ouverture du marché. Qu’à cela ne tienne. Ils n’ont qu’à nous indiquer le chemin par lequel leurs entreprises ont pénétré le mur de l’Union Européenne, mais avec les moyens de l’Etat, leurs conseils sont plus aisés à prodiguer. Les secteurs dont ils ont la charge sont réputés à faible valeur ajoutée et leurs activités ne concernent que les industries manufacturières et le commerce, domaines où les risques sont quasiment nuls dès lors que l’Etat couvre leurs besoins en matières premières totalement payées en devises.

Le secteur automobile, pour s’y engager demande autrement plus de réflexion qu’un bricolage à la va-vite annoncé entre deux portes.

Il y a bien longtemps que nous avons délaissé toute stratégie de développement cohérente pour nous satisfaire de schémas faits, de demi-mesures ou de pensées libérales d’un autre siècle : aller en Bourse ou placer l’épargne de l’Etat à l’Etranger alors que le pays n’entrevoit aucune solution pour résorber un chômage de masse relèvent d’un mauvaise vision de la gestion macroéconomique. Seuls les grands projets industriels dans les secteurs de la mécanique, de l’électronique ou des énergies renouvelables sont à même d’assurer au pays des réserves d’emplois doublement appréciables : par le nombre d’emplois créés et par leur durée qui, appréhendés dans cette seule vision, pourront largement contribuer à la stabilité sociale et au relèvement du niveau de vie actuellement bien mis à mal.

En conclusion, ni l’entrée au capital de PSA, ni la réalisation d’une usine « low-coast » ou de montage avec Renault ne sont de l’intérêt du pays sans la définition d’une stratégie industrielle dans laquelle le crédo de l’automobile prend une place prépondérante dans une perspective d’intégration maghrébine. Sans le Maghreb, point de salut pour nous comme pour les autres, nous le devons à nos peuples respectifs. C’est de cela qu’il s’agit. Boursicoter avec les moyens de l’Etat, c’est aller vers des aventures périlleuses que mêmes les pays rentiers évitent.

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R A M E S S E S II

Oui juste que la deuxiéme chaine de production de Renault Douai vientd' être supprimer et même au niveau de la chaine restante, Renault commence à mettre les gens au chomage! ça c'est quoi, c'est une ouverture d'usine, le monde à l'envers, moi je n y crois pas trop en cette Renaultdz.

Même que ça sera juste une usine de montage du genre ce qui se passe à Tanger et en Slovenie, est ce le nouvel Eldorado pour les constructeurs version Afrique, aprés l'Europe centrale et de l'est!