Au JT du 20h de France 2, le célèbre animateur de l'émission littéraire "Apostrophes", Bernard Pivot, pour parler de son premier roman autobiographique "Oui, mais quelle est la question !" a été invité dans les dernières minutes du bulletin d'information à réagir aux caricatures sur le Prophète Mohamed publiée par Charlie Hebdo dans son édition de mercredi dans le contexte de l'embrasement du monde musulman provoqué par la vidéo contre l'islam.

Le présentateur du JT de 20h, David Pujadas, qui ne cite pas le journal, ne lui a posé qu'une seule question à ce propos en s'adressant à son illustre invité en tant qu'intellectuel, écrivain, homme de médias et journaliste : "Votre avis sur cette question des caricatures de Mohamed. On en parle depuis hier, maintenant ?"

La réponse de Bernard Pivot : "De deux choses l'une: ou elle tombe sous le coup de la loi française ou pas. D'après ce que je comprends,  non. Alors, évidemment, on peut dire que dans l'actualité, ces caricatures tombent mal, de se moquer de Mohamed actuellement, mais y a-t-il  un bon moment pour se moquer de Mohamed ?"

En ces moments de graves troubles, où le brasier provoqué par la vidéo contre l'islam ne faiblit pas, l'argument de Bernard Pivot qui s'en remet à la loi, à la liberté d'expression et d'opinion, tient-il la route dans ce contexte explosif ? Charlie Hebdo n'exacerbe-t-il pas les tensions et, en définitive, ne fait-il pas le jeu, au nom de la liberté de la presse, des manipulateurs de cette affaire ? La liberté de la presse n'aurait-elle pas à gagner en éthique et en déontologie à informer l'opinion publique sur les faits de cette affaire au lieu d'en rajouter, de conforter en quelque sorte la vidéo contre l'islam et, ce faisant, par ces caricatures, à conforter la vidéo contre l'islam. Dans un moment où toutes les dérives sont possibles dans une telle confusion, où Al Qaïda s'en mêle et appelle à des attentats contre les ambassades US, le journal satirique saisit l'opportunité "commerciale" pour ressortir les caricatures dénigrant le Prophète Mohamed.

Bernard Pivot n'ignore pas ces faits, lui, dont l'émission culte "Apostrophes" pouvait propulser un livre dès le lendemain du passage de son auteur à l'émission en créant de vives tensions entre écrivains prétendant à des nominations par divers jurys de prix littéraires. Et il n'en a jamais nié l'intérêt commercial. Mais, là, il ne s'agit pas de livres, mais du Livre, le Coran, du Prophète qui ont leur part du sacré dans la laïcité la plus avancée. Et ces attaques ne sont pa venues d'intellectuels comme Salman Rushdie que Bernard Pivot a reçu à plusieurs reprises dans le contexte des fetwas lancées contre l’auteur des Versets sataniques ; ce qui a accru l’audimat de son émission…

R.N