L'attaque "complexe" du consulat Us en Libye aurait été planifiée

L’ambassadeur des Etats-Unis en Libye et trois autres Américains ont été tués dans une attaque contre le consulat à Benghazi qui semble avoir été «planifiée», suscitant une onde de choc à Washington et dans le monde.

Initialement mise sur le compte d’hommes armés en colère contre un film anti-islam, l’attaque résulterait d’un assaut planifié plutôt que de débordements d’une foule en colère, a affirmé mercredi un responsable américain. "C’est l’hypothèse de travail en ce moment", a ajouté ce responsable sous couvert d’anonymat. Selon cette source, les extrémistes se sont servis de manifestants qui protestaient contre le film comme d’un prétexte pour s’en prendre au consulat américain avec des armes de petit calibre mais aussi des lance-roquettes.

"Il y a des détails encore assez flous, mais clairement on a la signature d’Al-Qaïda", a déclaré de son côté Mike Rogers, président républicain de la commission du renseignement au Congrès américain, sur la chaîne CNN. D’autres responsables américains s’exprimant sous couvert d’anonymat ont parlé d’une "attaque complexe" tout en refusant de se prononcer sur l’identité de ses auteurs. Les autorités libyennes ont présenté leurs excuses aux Etats-Unis et pointé du doigt à la fois les partisans du régime déchu de Mouammar Kadhafi et Al-Qaïda après cette attaque survenue mardi soir, jour du 11e anniversaire des attentats du 11-Septembre aux Etats-Unis commis par le réseau islamiste.

Il ne faut pas perdre de vue que Benghazi est un fief des islamistes salafistes. Plusieurs officiers supérieurs ont été la cible d'attaques de ces islamistes en armes. Le gouvernement avait déjà expliqué son incapacité à s'attaquer à ces milices organisées et surarmées. Il est évident que le démantèlement de l'arsenal militaire de l'ancien régime pendant la  révolution a permis à tous les Libyens qui le souhaitent de posséder une arme. Autre indice, la destruction de mausolées par ces mêmes salafistes a révélé l'impuissance des nouvelles autorités à s'attaquer à la violence armée.

Sam Bacile : un pseudo

Les protestations contre le film Innocence of Muslims ont commencé à faire tache d’huile avec des rassemblements devant des représentations américaines à Casablanca, Tunis et Khartoum. Une manifestation est prévue jeudi à Téhéran devant l’ambassade de Suisse qui représente les intérêts américains. Pour la deuxième soirée consécutive, des islamistes ont manifesté devant l’ambassade des Etats-Unis au Caire, après un appel des autorités à la retenue. Les puissants Frères musulmans ont appelé à un rassemblement vendredi à travers l’Egypte.

Signé par un certain Sam Bacile - un pseudonyme -, qui décrit l’islam comme un "cancer", le film se veut une description de la vie du prophète Mohamed et évoque les thèmes de l’homosexualité et la pédophilie. "Son réalisateur est bouleversé par le meurtre" du diplomate et se cache, selon un collaborateur Steve Klein qui a dit à l’AFP lui avoir parlé au téléphone tout en ignorant où il se trouve. Selon des médias américains, il s’agirait d’un promoteur immobilier israélo-américain, mais son nom était introuvable sur internet avant les événements des derniers jours.

Mardi soir, des hommes armés ont attaqué notamment avec des roquettes le consulat à Benghazi (est), considéré comme un fief des islamistes radicaux, selon des sources de sécurité. Des bombes artisanales ont été lancées et des affrontements ont opposé forces de sécurité aux hommes armés parmi lesquels des salafistes, ont indiqué des témoins. Le consulat a été incendié après avoir été pillé et vandalisé, selon eux.

L’ambassadeur Chris Stevens, qui avait soutenu ardemment la révolte contre le régime Kadhafi, et trois fonctionnaires du consulat ont péri. De trois à cinq civils américains ont été blessés selon un responsable américain. Des agents de sécurité libyens ont également été tués, d’après un diplomate libyen à l’ONU. La mort de l’ambassadeur serait dû à une asphyxie au monoxyde de carbone, a indiqué une source de sécurité.

"Les Etats-Unis condamnent dans les termes les plus forts cette attaque scandaleuse et choquante", a dit M. Obama lors d’une intervention solennelle à la Maison Blanche. Il a tenu à souligner que nombre de Libyens avaient tenté d’aider les Américains pendant l’attaque, et avaient transporté la dépouille de l’ambassadeur à l’hôpital. 

Al-Qaïda ou les pro-Kadhafi ?

De son côté, la secrétaire d’Etat Hillary Clinton a condamné un "attentat choquant pour toutes les consciences" et accusé "un petit groupe sauvage" de l’avoir mené. Le plus haut gradé américain, le général Martin Dempsey, a quant à lui téléphoné au controversé pasteur américain Terry Jones pour lui demander de ne plus soutenir le film. Ce dernier s’est rendu célèbre pour avoir brûlé un exemplaire du Coran.

L’attaque de Benghazi est la première de cette envergure contre une ambassade occidentale en Libye depuis la chute du régime de Mouammar Kadhafi en octobre 2011. Elle illustre une fois de plus l’incapacité des autorités à assurer la sécurité dans un pays où les milices armées font la loi.

A Tripoli, le président du Congrès général national, plus haute autorité politique du pays, Mohamed al-Megaryef, a "présenté (ses) excuses aux Etats-Unis, au peuple américain et au monde entier" pour cette "attaque lâche". "Ce qui s’est passé hier, coïncide avec le 11 septembre et a une signification claire" a-t-il dit, en allusion à Al-Qaïda.

Malgré tout, l’Assemblée nationale libyenne a élu mercredi soir le vice-Premier ministre du gouvernement sortant, Moustapha Abou Chagour, chef du nouveau gouvernement de transition. Sa principale tâche sera justement de mettre en place une armée et une police professionnelles pour faire face à l’escalade des violences.

LM/AFP

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