La CIA torturait les opposants à Kadhafi et les renvoyait en Libye

La CIA et le MI5 ont torturé puis renvoyé en Libye des opposants islamistes à Kadhafi
La CIA et le MI5 ont torturé puis renvoyé en Libye des opposants islamistes à Kadhafi

Human Rights Watch (HRW) dit avoir des preuves de deux nouveaux cas d'utilisation par les Etats-Unis du "waterboarding", une technique d'interrogatoire simulant la noyade, sur des Libyens détenus par les forces américaines en Afghanistan.

Les services de renseignements américains et britannique ont collaboré avec l'ancien dictateur libyen. "Non seulement les Etats-Unis ont livré à Kadhafi ses ennemis sur un plateau, mais il semble que la CIA ait d'abord torturé nombre d'entre eux", dit Laura Pitter, spécialiste de la politique antiterroriste à HRW. C'est ce qu'affirme un rapport publié jeudi, de cette organisation de défense des droits de l'homme. Elle dit par ailleurs avoir obtenu de nouvelles preuves de la façon dont les Etats-Unis et certains de leurs alliés, notamment le Royaume-Uni, ont arrêté des opposants en exil à l'ancien dirigeant Mouammar Kadhafi et les ont renvoyés en Libye.

HRW dit se fonder sur des interviews de victimes, ainsi que sur l'étude d'archives rendues publiques après le soulèvement en Libye l'an dernier. Elles comprennent notamment de la correspondance entre de hauts responsables libyens et la CIA ou les agences de renseignement britanniques MI5 et MI6.

Ces documents montrent comment, entre le renoncement par le colonel Kadhafi aux armes de destruction massive fin 2003 et la révolution libyenne de 2011, le dirigeant libyen et les services de renseignements étrangers ont travaillé discrètement ensemble pour combattre l'islamisme.

"L'ampleur des actions de l'administration Bush semble beaucoup plus grande qu'on ne le pensait et souligne l'importance de l'ouverture d'une enquête de grande ampleur sur ce qui s'est passé", ajoute-t-elle dans un communiqué.

Les deux cas les plus dramatiques mentionnés par le rapport, qui traite de 14 cas, concernent le témoignage de deux anciens détenus libyens en Afghanistan, Mohamed Choroeïa et Khalid al Charif. Selon Human Rights Watch, les deux détenus disent avoir eu la tête recouverte et avoir reçu de l'eau glacée sur la figure jusqu'à avoir le sentiment de suffoquer, sensation associée à cette technique d'interrogatoire condamnée par le président Barack Obama et les organisations de défense des droits de l'homme comme relevant de la torture.

Les récits des deux Libyens contredisent les affirmations de l'ancien président George W. Bush, de l'ex-directeur de la CIA Michael Hayden et d'autres responsables américains selon lesquelles lasimulation de noyade n'a été utilisée que sur trois personnes soupçonnées d'appartenir à Al Qaïda mais qui n'étaient pas libyennes : Abou Zoubaïdah, Khalid Cheikh Mohammed et Abd al Rahim al Nachiri.

Dans son rapport, HRW présente en détails le cas d'un autre Libyen connu sous le nom d'Ibn al Cheikh al Libi, qui dirigeait un camp d'entraînement en Afghanistan.& Les informations données par Libi pendant ses interrogatoires sur d'éventuels contacts entre l'Irak et Al Qaïda ont aidé le gouvernement Bush à obtenir le soutien de l'opinion publique pour la guerre contre l'Irak en 2003.

Le secrétaire d'Etat de l'époque, Colin Powell, avait souligné ces allégations dans un discours devant le Conseil de sécurité des Nations unies resté célèbre, en février 2003. Toutefois, Libi s'était ensuite rétracté sur l'Irak et Al Qaïda. Selon Human Rights Watch, sa famille affirme que, tout en gérant un camp d'entraînement, il était contre la stratégie et l'action d'Al Qaïda et ne cherchait qu'à renverser Kadhafi.

Il a pourtant été arrêté au Pakistan, remis aux autorités américaines, envoyé un temps en Egypte, remis à nouveau aux forces américaines et ensuite renvoyé en Libye.

Human Rights Watch dit avoir organisé en 2009 une brève rencontre avec Libi dans sa prison libyenne. Mais il aurait refusé de parler aux représentants de HRW. Deux semaines plus tard, dit HRW, la Libye annonçait qu'il s'était suicidé. Human Rights Watch a demandé à Barack Obama l'ouverture d'une enquête sur les pratiquesaméricaines en matière d'interrogation et de détention. Le ministre de la Justice, Eric Holder, a annoncé la fin de l'enquête la semaine dernière sur ces questions, sans annoncer d'inculpations au pénal.

Le commandant Belhaj veut des excuses

Le commandant militaire de Tripoli, Abdelhakim Belhaj, a demandé lundi des excuses à la Grande-Bretagne et aux Etats-Unis après la découverte de documents selon lesquels les deux pays l'auraient livré en 2004 au régime de Kadhafi, dont il était un opposant et qui l'a soumis à la torture. Selon des documents des services de renseignements libyens, Abdelhakim Belhaj, à l'époque militant islamiste et opposant au régime de Mouammar Kadhafi, aurait été capturé par la CIA à Bangkok en 2004, avec sa femme enceinte, et livré aux autorités libyennes.

Il fut alors incarcéré pendant sept ans dans la prison Abou Selim de Tripoli où il affirme avoir été interrogé par des membres des services secrets britanniques. "Ce qui m'est arrivé était illégal et mérite des excuses", a-t-il affirmé à la BBC. Il a par ailleurs affirmé au quotidien britannique The Guardian qu'il envisageait de poursuivre devant la justice les gouvernements britannique et américain. "On m'a injecté quelque chose, suspendu à un mur par les bras et les jambes et placé dans un conteneur entouré de glace", a-t-il indiqué sur son séjour en prison. 

LM/Reuters/Belga

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Commentaires (1) | Réagir ?

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kamel ait issi

De ce cote du lac, on ne voit pas de difference entre ghadafi et les egorgeurs... En toute franchise et realisme... cela fait des decennies que je vis dans ce monde... meme pas de difference entre asiatiques, africains et europeens... ou meme marsiens ! Meme le semblant de democratie, c'est pour mettre d'autres faux jetons en marche, pour le reste du monde...