Lutte contre l'informel à Alger : des coups d'épée dans l'eau ?

Le marché informel a proliféré sous le règne d'Abdelaziz Bouteflika
Le marché informel a proliféré sous le règne d'Abdelaziz Bouteflika

Opération coup de poing depuis hier matin contre les marchands à la sauvette dans les rues d'Alger. Moins d'une année après avoir lâché du lest sur ce phénomène, le pouvoir de Bouteflika, craignant l'effet de contagion de la Révolution du Jasmin en Tunisie et pour faire passer ses réformes et les législatives, revient à la charge...

Opérations coups de poings ce matin à Alger contre le secteur "informel" sur une offensive médiatique dont n'a jamais bénéficié la lutte antiterroriste. Dans son édition d'hier, jeudi 30 août, le quotidien arabophone Ennahar annonce que les policiers chargés de "libérer" les rues et les parkings des étals improvisés ou réquisitionnés depuis des années sous couvert de la loi du "quartier" seront équipés de matraques et de pistolets à impulsion électrique Taser.

Mais ces mesures sécuritaires traduisent-elles une volonté politique d'éradiquer un secteur de l'informel qui, selon les experts de l'ONS (Office national des statistiques) constitue près de 50% de la main-d'oeuvre totale non agricole dans son enquête effectuée le 4ème trimestre 2010, prouvant, chiffres à l'appui, que ce phénomène a proliféré sous le règne du président de la république, Abdelaziz Bouteflika.

C'est d'ailleurs lui, qui, craignant un phénomène de contagion de la Révolution du jasmin partie de Sidi Bouzid, a, lors du conseil des ministres du 3 février 2011, donné instruction au gouvernement "d’alléger les formalités et procédures destinées au transfert du petit commerce informel sur la voie publique vers des sites aménagés, en concertation avec les associations et représentants des concernés." Dans le communiqué du conseil du gouvernement du 3 février 2011, le chef de l'Etat établit une relation évidente entre les émeutes réprimées dans le sang de janvier de la même année et les mesures d'incitation à ce marché "parallèle" qualifié "d'emploi d'attente". Il invite les pouvoirs publics à "augmenter les capacités d’accueil des dispositifs d’emplois d’attente pour répondre à une importante demande, tout en renforçant leur attractivité" lit-on dans le communiqué.

Mais ces mesures "incitatives" ne sont pas seulement la conséquence des émeutes de janvier 2011 ; elles ont été conçues par le chef de l'Etat pour faire passer ses réformes et ses élections législatives qu'il n'aurait pas voulu voir contestées par un retour de bâton de cette chasse aux étals informels. Ainsi, moins d'une année après avoir lâché du lest à un marché "noir" qu'il a créé, fait proliférer, le pouvoir veut en reprendre le contrôle par une opération "coup de poing" sans réelle portée politique dans un tissu économique national délabré.

Sur le court terme, cette opération policière du ministre de l'Intérieur Dahou Ould Kablia va achopper, comme les précédentes d'avant janvier 2011, sur une absence flagrante de textes juridiques adéquats et, présentement, au moment même où les policiers ont envahi les rues d'Alger, hier, jeudi, aux aurores, par la vacance de l'Etat sans ministre de la Justice de plein exercice.

Le parti au pouvoir, le FLN qui vient de rafler les sièges au parlement, suffit-il à Bouteflika comme critère de référence politique pour engager des mesures coercitives contre le marché "informel" pris dans sa manifestation "sécuritaire" alors qu'il est manifestement la conséquence et la vitrine du pouvoir qui s'en nourrit ?

RN/APS

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Commentaires (5) | Réagir ?

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reda merrad

Bonjour Monsieur Djeffal, parfaitement, l'informel c'est aussi de mettre à des postes de responsabilités des grandes entreprises telles sonatrach et sonelgaz, une bande d'incompétents à toute épreuve.

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Abdellaziz DJEFFAL

C'est quoi l'informel ? C'est le fait d'exercer une activité quelconque en dehors du cadre légal. Vendre des légumes et des fruits sans y être autorisé, faire travailler des gens sans les déclarer à la sécurité sociale, faire élire un maire sans qu'il soit choisi par ses concitoyens, gouverner un peuple en dehors de la Constitution, rendre une justice contraire aux lois de la République... Nous sommes tous dans l'informel. Vive l'informel !

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