Syrie : la mystérieuse disparition du vice-président

Farouk Al Sharaa a servi Hafedh El Assad et son fils Bachar.
Farouk Al Sharaa a servi Hafedh El Assad et son fils Bachar.

Farouk al-Sharaa, dont la défection a été démentie par le pouvoir, n'est toujours pas apparu en public.

Où est le vice-président Farouk al-Sharaa ? Vendredi, la chaîne al-Arabiya, à capitaux saoudiens, annonçait sa défection. Elle était vite démentie par la télévision d'État syrienne, puis par le propre bureau du vice-président, qui publiait même un communiqué dans lequel Farouk al-Sharaa se réjouissait de la nomination du diplomate algérien Lakhdar Brahimi comme nouveau médiateur de l'ONU pour la Syrie.

Le seul démenti qui manquait était celui de Farouk al-Sharaa lui-même, que l'on n'avait toujours ni vu ni entendu dimanche en fin de journée. Il n'était pas aux côtés du président Bachar Al-Assad, apparaissant lui-même pour la première fois depuis un mois, en prière dans une mosquée à l'occasion de la fête de l'Aïd el-Fitr. Des rumeurs insistantes affirment que le vice-président aurait fait défection il y a une dizaine de jours, à la suite de son cousin Yaroub, un haut dirigeant sécuritaire. Contrairement à ce dernier, qui s'est exprimé jeudi à la télévision saoudienne, Farouk al-Sharaa serait toujours en Syrie, protégé par l'Armée syrienne libre (ASL) qui tenterait de le faire sortir. Une tâche difficile, le régime ayant déployé de grands moyens et offrant une récompense élevée pour sa capture, continue la rumeur.

Le responsable de la communication du Commandement conjoint de l'ASL de l'intérieur, Fahad el-Masri, ne souhaitait dimanche "ni confirmer ni infirmer". Il démentait en revanche avoir évoqué "une tentative de défection qui s'est soldée par un échec".

Ce qui est certain, c'est que le vice-président syrien était invisible depuis plusieurs mois, hormis une brève apparition le 20 juillet, où il représentait le président, absent, aux obsèques du beau-frère de ce dernier, le vice-ministre de la défense Assef Shawkat, tué dans un attentat deux jours auparavant.

Coup dur pour le régime

La défection de Farouk al-Sharaa, si elle se confirmait, porterait un coup très dur au régime sur le plan symbolique. Caution sunnite d'un pouvoir centré sur la minorité alaouite, Farouk al-Sharaa a été nommé vice-président en 2006, après la défection de son prédécesseur Abdelhalim Khaddam. Mais il avait surtout été, pendant vingt-deux ans, le visage fréquentable de la Syrie, l'inamovible ministre des Affaires étrangères et homme de confiance d'Hafez Al-Assad, puis de son fils Bachar, négociant avec Israël ou les États-Unis. Il avait été présenté en janvier par la Ligue arabe comme un "homme de consensus" pour diriger un gouvernement de transition. Sa disgrâce vient sans doute de là, et aussi d'un curieux article du quotidien israélien Maariv, dont le spécialiste militaire avait affirmé, en décembre 2011, que Farouk al-Sharaa était allé négocier secrètement à Moscou le départ de Bachar Al-Assad.

Sur le terrain, selon l'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH, basé à Londres), 190 Syriens ont trouvé la mort samedi, dont 62 à Damas et dans les environs, victimes de bombardements de l'armée. Des manifestations pacifiques ont eu lieu dans la région de Damas et à Idlib. Alep, au nord, reste le théâtre d'affrontements violents, en particulier autour de l'aéroport.

Pierre Pier

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