Le "Printemps" des gardes communaux

Les gardes communaux persistent et signent.
Les gardes communaux persistent et signent.

Marches, sit-in, coordinations. Le mouvement de protestation des gardes communaux s'amplifie. Il contrecarre tout le processus politique de la réconciliation nationale de Bouteflika qui veut l'avoir à l'usure

Le mouvement de revendications sociopolitiques des gardes communaux qui a fait pourrir l’été et le ramadhan au pouvoir qui comptait se prélasser en attendant qu’arrivent les élections communales, n’est pas prêt de s’éteindre, bredouille. Car, il s’agit cette fois d’une corporation de la résistance algérienne au terrorisme islamiste qui continue de tuer et de proliférer en toute impunité. Après le sit-in de Boumerdès la semaine écoulée, les protestataires qui campent au sens propre du terme, sans la connotation estivale, ont tenu jeudi dernier un sit-in soutenus par leurs familles. Pendant ce temps, que fait le Premier ministre censé répondre à leurs revendications ? Le Premier ministre, qui cet été, est devenu un simple coursier de Bouteflika en Afrique et cette fois, jeudi dernier, à Londres, aux Jeux olympiques, avec la sélection sportive qui s’annonce dès l’ouverture des compétitions par de piètres performances. Il n’a pas dit mot sur les revendications des gardes communaux, laissant le soin à son ministre de l’Intérieur et des Collectivités locales de pratiquer l’art de l’esquive en jouant tantôt aux pompiers, tantôt au policier, tantôt à une agence d’information versée dans l’art de corrompre les faits. Bouteflika lui-même, dont campagne publicitaire dans les journaux du monde a été, sitôt publiée, sitôt ternie par ce mouvement de protestation des acteurs de la résistance algérienne au terrorisme islamiste qu’il a couvé, choisit d’auditionner ses ministres sur tout autre chose que ce mouvement de protestation des gardes communaux et d’autres encore, ceux de de l’eau, de l’électricité, des routes, des médicaments, de l’importation de la viande congelée… Des auditions de complaisance, sous le signe de "veillées ramadhanesques" au rythme desquelles vit et/ou contraint de vivre le pays.

La colère des gardes communaux ne saurait être au menu de ce conseil des ministres estival. Bien évidemment, la stratégie du pouvoir est de laisser pourrir la situation, d’avoir à l’usure les protestataires, le temps de semer la zizanie dans leurs rangs, les fractionner comme il a tenté de le faire dans le fameux communiqué des services d’Ould Kablia qui fait état de plusieurs de leurs revendications sociales satisfaites et signés par des "représentants" du mouvement des gardes communaux. Qualifiant leurs revendications politiques d’"exagérées", Ould Kablia est passé à l’offensive en leur bloquant leur salaire du mois de juin après leur avoir interdit à trois reprises successives de marcher sur Alger pour soumettre leurs doléances au président de la République à El Mouradia où les tiroirs débordent de plateformes de revendications non lues, dont celle du mouvement des aârouch, la plateforme d’El Ksar, tombée aux oubliettes ; celle des syndicats autonomes des enseignants, des médecins, des anciens rappelés du service nationale…

La seule plateforme toujours en cours, dont il fait son bréviaire politique et idéologique est celle d’Al Qaïda au Maghreb islamiste. Il a bien ouvert sa table de négociations au groupe terroriste d’Ansar Eddine, s’empressant d’en faire un partenaire privilgié au moment même où les gardes communaux qui ont combattu les sbires algériens "émirs" d’Ansar Eddine au temps du GSPC réaffirment les années de lutte contre les maquis de Hattab, de Mokhtar Belmokhtar…. Pour les gardes communaux, c’est la police, la matraque, les communiqués mensongers ; pour les groupes d’Al Qaïda, c’est une flopée d’émissaires, de symposiums, de déplacements mobilisant un Premier ministre qui n’a plus que "ça à faire", un ministre des Affaires étrangères qui soutient l’option "dialogue" d’Abdelaziz Bouteflika et un ministre délégué chargé des Affaires maghrébines et Africaines qui fait des déclarations "à tout va" sur la situation au Mali, laissant parfois entendre que l’Algérie n’écarte pas une intervention militaire au Nord du Mali, parfois affirmant que l’option des négociations est la seule voie capable d’apporter la paix au Mali.

Autant dire que cette protesta des gardes communaux est une gifle magistrale donnée à la politique de concorde civile de Bouteflika qui, après sept années de sa promulgation, voit ceux qui ont lutté contre les futurs pseudo-repentis occupés la rue, revenir comme "Tombeza" (Rachid Mimouni) d’un passé cru définitivement enterré par le locataire "repenti" d’El Mouradia. Un crime qui n’est pas commis au moment des faits, rebondit et éclate. Désarmés aux heures sanglantes de la décennie noire, sommés de se taire, jetés même en pâture à ces "repentis" graciés qui occupent aujourd’hui des postes d’imam, Patriotes, GLD et gardes communaux qui comptent leurs martyrs de la résistance armée à l’islamisme politique et à ses bras armés, ont été dessaisis de leur sacrifice, leur honneur et traités presque comme des "traîtres". Près d’une dizaine d’années, autant dire, durant ce règne de Bouteflika, ils ont été confrontés au mépris des autorités entièrement dévouées aux ennemis de la République.

C’est pour cela, sans doute, que le "Printemps arabe" sera celui des familles des victimes du terrorisme, des disparus, des enfants nés au début des années 1990 aujourd’hui majeurs, filles et garçons, qui ne connaissent de leur Algérie que les égorgements, les massacres, les viols, les incendies, la terreur. Un jour ou l’autre, quand ils auront des enfants à leur tour, ils se retourneront vers ce passé qui leur a ravi père, mère, sœur, famille entière et demanderont non pas seulement une simple repentance mais des comptes pour juger les coupables, instigateurs et exécutants. Dans cette compréhension des choses, le mouvement de revendications des gardes communaux annonce ces prémices, même si pour l’instant, le pouvoir de Bouteflika veut le réduire à une simple protesta sociale comme il y a tant dans les rues algériennes. Or, il y a des signes avant coureurs de cette protesta qui renoue avec les fondamentaux de la lutte antiterroriste pour laquelle, justement, les gardes communaux, par leur résistance à la répression policière de Bouteflika, confèrent la dimension politique qui "réhabilite" le choix pour une Algérie citoyenne.

R.N

Plus d'articles de : Actualité

Commentaires (5) | Réagir ?

avatar
madjid ali

Bonne initiative comme ça ces paysans vont rentrées chez eux au lieu de salir les pavés d'Alger.

avatar
Atala Atlale

Il y a comme un air de pré-printemps qui pointe chez nous. Mais la bourse est là et, tout va rentrer dans l'ordre.

visualisation: 2 / 5