Ce n’est déjà plus le troisième mandat qu’il nous faut éviter, mais le désastre national !

Ce n’est déjà plus le troisième mandat qu’il nous faut éviter, mais le désastre national !

J’observe que l’année débute avec le dramatique paradoxe de GI’s entrant en Algérie sur de gros porteurs pendant qu’en sortent des jeunes Algériens sur des embarcadères et je me tourne alors vers mes amis qui s’amusent, une fois de plus, une fois de trop, à se tromper de débat ou, pire, à se tromper d’anxiété. Que leur dire ? Eh bien, pour commencer par le moins grave, que ce spectacle d’une camora en train de se reconduire pour un troisième mandat à la force du déshonneur et du mensonge, que ce spectacle là n’est pas le nôtre. Assez de s’exciter sur les fourberies des uns et sur le silence des autres comme des boolmakers s’exciteraient sur une course de chiens. Ce carrousel des serfs manque de panache et de pedigree. Ce n’est pas la parade de la Cavalerie de Saumur, c’est tout au plus un manège de chevaux de bois où l'on court la bague. Et il manque à nos protagonistes la noblesse du lévrier et cette majesté que Jack London a si souvent décrite chez le chien husky : le caractère farouchement indépendant !

Et puis, quoi de plus normal qu’une coterie décadente qui s’agrippe au trône pour s’épargner le procès sur sa décadence ?

Mais ah, Dieu, si ce n’était que cela, le prix de la méprise ! Car n’est-il pas déjà trop tard pour tout ? Réalisons la situation : ce n’est déjà plus le troisième mandat qu’il nous faut éviter, mais le désastre national ! Ces GI’s installés clandestinement dans notre désert pendant que nos enfants s’expatrient encore plus clandestinement, n’est-ce pas le signe que nous sommes déjà placés devant le funeste choix entre une solution à l’irakienne et une autre à la kényane ? Car il s’est écoulé deux mandats avant celui pour lequel on épilogue, et ils ont abouti à ceci : le laminage de l’Etat ! Inutile de le chercher, l’Etat algérien n’existe plus ! Ou seulement sous cette forme hybride de clans qui s’étripent pour le bout de gras.

Cet Etat là, l’Etat de Bouteflika, est trop faible pour combattre le terrorisme, trop corrompu pour redistribuer équitablement le revenu national et tracer la voie pour la jeunesse. Il ne remplit plus sa fonction de protecteur ni encore moins celle de régulateur. Alors tendons l’oreille à ces bruits de bottes : ce sont les Américains qui viennent mettre de l’ordre chez nous ! Et écoutons cette colère des gens affamés et désespérés : ceux qui n’ont pas pu prendre la mer s’apprêtent à demander des comptes !

A quel prix tout cela ? Et vers où irons-nous ?

Voilà la vraie anxiété que je vois se profiler en 2008. Fatalité ? Sans doute pas. Mais en sortir exige de nous autre chose qu’une algarade autour du troisième mandat qui, lui-même, n’a désormais plus de sens : Bouteflika est-il sûr de gouverner en 2009 un pays encore gouvernable ?

Mohamed Benchicou

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Commentaires (16) | Réagir ?

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Abdesselam Ali-Rachedi

Il faut savoir raison garder. Les GI's qui s'entrainent dans le Sahara algérien, ça n'est pas nouveau. Pour preuve, une video de Youtube, datant de plusieurs mois, et reproduisant un documentaire de la chaine américaine ABC, que tout un chacun a pu visionner, et où l'on voit soldats américains et algériens s'entrainer côte à côte. Dans l'absolu, il n'y a rien d'anormal à cela, surtout si l'on sait que des officiers algériens sont formés aux USA. En somme, ce n'est que de la coopération sécuritaire. Quant au désastre national, je crois malheureusement que nous y sommes déjà, depuis au moins deux décennies. Peut-être qu'un peu naïvement, nous avions cru pouvoir en sortir assez facilement et qu'aujourd'hui nous en ressentons une certaine amertume. Contrairement aux anciens régimes d'Europe de l'Est, le régime algérien a montré une étonnante capacité de résistance au changement. C'est là la vraie question. Que Bouteflika soit reconduit ou que quelqu'un d'autre le remplace, si la nature du régime demeure inchangée, le désastre sera toujours là. Pour en sortir, il nous faudra nous convaincre que le système est un tout et qu'il nous faudra nous débarrasser à la fois de la façade civile du régime (nationalistes et islamistes confondus) et du coeur même du système, à savoir la police politique et le cabinet noir. Seule une mobilisation de la société civile, à grande échelle, pourra amener ce résultat. Le problème, c'est que la conscience citoyenne n'est pas suffisemment développée pour qu'un tel scénario soit envisageable à court terme. Il faut donc laisser le temps au temps et garder espoir !

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khelaf hellal

Une image trés touchante sur la détresse de nos jeunes qui ne savent plus à quel Saint se vouer. Le désastre est déjà là ; il faut créer le déclic, libérer les consciences, briser les tabous et amener nos jeunes à se révéiller, à réagir pour s'en sortir d'eux-memes avant qu'il ne soit trop tard. A moins d'un sursaut révolutionnaire, d'une prise de conscience trés forte de la société juvénile, la menace du désastre est omniprésente. Il n'y a plus rien à espérer des "Vieux" et des "tartuffes" (chioukhas) de notre pays qui ne rêvent de rien, qui n'aspirent plus à quoi que ce soit dans leur vie et qui trouvent la solution et le confort dans la religion, rien que la religion pour détourner les génerations futures.

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