D'où viennent les drones de l'armée de Bachar Al Assad ?

Capture d'un drone iranien
Capture d'un drone iranien

C'est un bruit caractéristique que tous ceux qui ont travaillé un jour à Gaza connaissent bien : celui, entêtant, d'une lointaine tondeuse à gazon invisible qui va et vient dans le ciel.

Javier Espinosa, l'envoyé spécial du quotidien espagnol El Mundo pendant le siège de Homs, ne s'y est pas trompé : il a reconnu le vrombissement d'un drone dans le ciel syrien. Le recours à des avions sans pilote dans la répression de l'insurrection par l'armée syrienne est confirmé par des sources diplomatiques, des témoins syriens et étrangers, ainsi que des experts militaires.

A la faveur du soulèvement qui a débuté il y a un an, l'armée syrienne semble en avoir fait usage pour la première fois de son histoire. Ces drones pourraient d'ailleurs avoir été utilisés pour guider le bombardement du centre de presse improvisé dans le quartier de Baba Amro, à Homs le 22 février, causant la mort de Marie Colvin et de Rémi Ochlik, et blessant Edith Bouvier ainsi que Paul Conroy. Il faudrait pour cela que les engins utilisés puissent transmettre des images en direct. Une information impossible à confirmer pour l'instant. Tout comme le fait qu'ils sont armés ou pas, même si c'est peu probable.

L'origine de ces drones est difficile à établir. Ont-ils été fabriqués localement ou achetés à l'étranger, et à qui ? D'après The Aviationist, un blog spécialisé dans ce domaine, qui reprend des informations du site israélien Ynetnews.com, la Syrie produit ses propres drones, qui ne sont en fait que des répliques de modèles iraniens. Qu'il ait fourni la technologie ou les drones eux-mêmes, l'Iran, allié stratégique de la Syrie, a une expérience reconnue en la matière. Téhéran fabrique plusieurs types de drones, tels que le Mohajer-4, vu au-dessus de Homs, l'Ababil, le Mirsad-1 et le Pahpad (acronyme d'avion sans pilote en persan), filmé à Kafr Batna, dans la banlieue de Damas.

Ce n'est pas la première fois que la technologie iranienne est déployée dans la région. Il y a quelques années, le Hezbollah, parti chiite libanais, avait réussi à envoyer un Mirsad-1 au-dessus du nord d'Israël. Par la suite, en 2005, la milice armée alliée à l'Iran avait même intercepté des communications d'images entre des drones israéliens en vol au-dessus de Beyrouth et leur base en Israël. Il se peut donc que les drones utilisés en Syrie soient actionnés par des techniciens iraniens ou libanais.

La presse arabe, notamment le site d'opposition all4syria, a émis l'hypothèse que la Russie avait livré à la Syrie des drones achetés à Israël. Pour Emile Hokayem, spécialiste des questions de sécurité au Proche-Orient au sein de l'International Institute for Strategic Studies (IISS), il y a peu de chances que le matériel utilisé soit d'origine russe : "La Russie fait très attention au type de matériel qu'elle fournit à la Syrie. Elle possède des drones israéliens mais les revendre porterait gravement atteinte à sa réputation."

D'autres médias arabes hostiles au régime syrien, mais aussi des sources militaires françaises évoquent la possibilité d'appareils directement achetés à Israël, pourtant en état de guerre avec la Syrie mais principal producteur mondial de ce type d'engins.

L'un de ces avions sans pilote équipés de caméras s'est écrasé en février à Homs ; les rebelles de l'Armée syrienne libre (ASL) assurent l'avoir abattu. Après l'entrée de l'armée dans Baba Amro, la télévision officielle syrienne s'est empressée de montrer les restes calcinés en les présentant comme la preuve du "soutien sioniste" à la cause des "gangs terroristes" qui ensanglantent la Syrie, selon la version officielle du régime. Comme dans le cas de certains massacres et des bombardements de zone civile, le régime retourne contre ses ennemis les accusations dont il fait l'objet, en une étrange forme d'aveu.

Il est probable que des drones américains, et probablement israéliens, opèrent dans le ciel syrien. Mais ils volent à une telle altitude qu'ils sont difficiles àatteindre et impossibles à voir ou à entendre.

Reste à savoir pourquoi le régime recourt à des drones alors qu'il dispose d'avions de chasse et d'hélicoptères en nombre. "L'une des choses que Bachar Al-Assad a apprises de Kadhafi, c'est qu'utiliser de l'aviation militaire contre des civils pouvait provoquer une mobilisation internationale, note M. Hokayem. Il reste donc prudent." D'autant que si les insurgés parvenaient à abattre un hélicoptère de combat, cela aurait des conséquences désastreuses sur le moral des troupes.

Christophe Ayad

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Commentaires (6) | Réagir ?

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Mourad Idir

Mais d'où viennent les islamistes étrangers armés qui foutent le bordel en Syrie ?

Les va t-on en guerre veulent "démocratiser" la Syrie comme il l'ont fait pour la Libye.

Pourquoi le Matin est devenu pro-guerre ?

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Khalida targui

Bien dit Oziris, nos drones sont plus efficaces, la preuve tout le monde est beau gentil et sage comme une image chez nous. Et bientôt l'anniversaire de nos 50 années de bonheur avec en prime un cadeau du ciel. Des islamistes au pouvoir sans drone ni char ni une goutte de notre sang versé, ça c'est de la politique!

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